En l’absence de précision au contrat, le changement de lieu de travail dans un secteur géographique différent de celui où le salarié exerce son emploi constitue une modification du contrat qui est soumise à l’accord préalable du salarié. Seule la clause de mobilité permet à l’employeur d’imposer à son salarié une modification du lieu de travail (changement de secteur) et ainsi, de parer à l’éventualité du refus du salarié. Par cette clause, le salarié accepte en effet expressément et par avance une nouvelle affectation géographique. La situation n’est toutefois pas aussi simple puisque la jurisprudence s’est attachée à délimiter les contours de la validité d’une clause de mobilité puis son application, le dernier arrêt rendu par la Cour de cassation sur ce sujet datant du 23 janvier 2008.
Le principe reste toujours la validité d’une clause contractuelle de mobilité géographique. Sauf abus de l’employeur qui userait de cette clause dans le but exclusif de nuire au salarié, la mutation relève du pouvoir de direction de l’employeur et s’impose au salarié. Cependant, depuis une décision rendue par la Cour de cassation le 19 mai 2004, la clause de mobilité n’est valable qu’à la condition de prévoir un « périmètre de mutation ». Dans cette affaire, le juge a invalidé la clause rédigée de la manière suivante « pour des motifs dictés par l’intérêt de l’entreprise, le lieu de travail pourrait être modifié », et ce en l’absence de limite dans laquelle la mutation pouvait intervenir. Un arrêt du 7 juin 2006 va plus loin puisqu’il exige de l’employeur de définir très précisément dans le contrat de travail la zone géographique d’application de la clause de mobilité, ce qui empêche que l’entreprise se réserve la faculté d’étendre unilatéralement le périmètre de la mobilité (dans cette affaire, la clause de mobilité concernait « toute la zone d’activité de l’employeur », zone qui avait depuis l’embauche initiale été étendue à l’ensemble du territoire national). Par ces deux arrêts, la Cour de cassation considère donc que le salarié doit être en mesure d’identifier la zone géographique de mutation éventuelle lorsqu’il signe son contrat de travail.
A partir de là, et à la condition que la clause de mobilité soit valable, l’employeur peut de manière effective décider d’affecter son salarié en un autre lieu de travail. Dans ce cas, il n’a pas besoin de l’accord préalable de son salarié mais doit néanmoins respecter un certain délai de prévenance pour lui permettre de s’organiser. Si l’application de cette clause qui emporte demande de mutation du salarié est dictée par l’intérêt de l’entreprise, le salarié ne peut s’y opposer. Or, souvent, le salarié est réticent à devoir déménager compte tenu principalement de ses obligations familiales. Son refus légitime néanmoins un licenciement. C’est l’apport de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 23 janvier 2008 qui confirme que « le refus, par un salarié dont le contrat de travail contient une clause de mobilité, de la modification de son lieu de travail constitue en principe un manquement à ses obligations contractuelles mais ne caractérise pas à lui seul une faute grave ». Il faut remarquer l’utilisation du mot « en principe » pour s’apercevoir que tout est affaire d’espèce. Pour autant, il est aujourd’hui clair que seul un licenciement pour cause réelle et sérieuse est susceptible d’être prononcé.
Aussi, que l’on se place côté employeur, ou côté salarié, il est essentiel de rédiger précisément la clause de mobilité et de la négocier compte tenu des enjeux qu’elle génère.
Jean-Philippe SCHMITT, Avocat à DIJON (21)
Spécialiste en Droit du Travail
Soc. 23 janvier 2008 n° 07-40.522, Publié au bulletin