La remise en état en matière d'urbanisme prononcée par le juge pénal pour un changement de destination irrégulier. Par Sébastien Avallone, Avocat.

La remise en état en matière d’urbanisme prononcée par le juge pénal pour un changement de destination irrégulier.

Par Sébastien Avallone, Avocat.

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La Cour de cassation établit que le juge pénal peut ordonner la remise en état en matière d'urbanisme pour un changement de destination irrégulier, même en l'absence de travaux. Cette décision élargit le champ d'application de la loi pénale et permet de poursuivre les contrevenants pour de simples changements de destination.
Description rédigée par l'IA du Village

La Cour de cassation estime qu’il est possible de prononcer une mise en conformité des lieux au visa de l’article L480-5 du Code de l’urbanisme en présence d’un changement de destination irrégulier.

Cass.Crim. 6 févr. 2024, FS-B, n° 23-81.748.

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Dans une récente décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation [1], la juridiction judiciaire a estimé que :

  • D’une part, en application des dispositions des articles L610-1 et L480-5 du Code de l’urbanisme, les infractions aux dispositions des plans locaux d’urbanisme peuvent donner lieu à mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la seule circonstance que l’infraction porte sur l’utilisation de bâtiments de manière non conforme à celle autorisée par le PLU ne faisant pas obstacle à ce qu’une telle mesure à caractère réel soit prononcée.
  • D’autre part, la cour d’appel, qui était saisie des infractions consistant à avoir, en violation du PLU n’y autorisant que les activités aquacoles, dédié la partie supérieure d’un bâtiment à une activité commerciale de restauration et construit une terrasse implantée sur le domaine public maritime, n’a pas excédé sa saisine en ordonnant une telle mesure, dès lors que ces permis de construire, dont les préconisations n’ont pas été respectées, avaient été délivrés en application de ce document de planification et sur le fondement de l’activité d’ostréiculteur du demandeur.

En l’espèce, un pétitionnaire avait obtenu un permis de construire pour l’extension d’un bâtiment ostréicole.
Changeant la destination de l’ouvrage autorisé en y créant un restaurant et l’agrandissant plus que ne le permettait le permis de construire, l’ostréiculteur a commis une infraction d’urbanisme. La destination nouvellement créée n’était pas autorisée par le Plan Local d’Urbanisme et ne figurait pas au permis de construire.

Les juges du fonds considéraient que les infractions commises n’était pas régularisables et prononçaient la remise en état conformément au permis de construire initialement accordé.

Cette décision présente un intérêt particulier par l’affirmation nette que la seule circonstance que l’infraction porte sur l’utilisation de bâtiments de manière non conforme à celle autorisée par le PLU ne fait pas obstacle à ce qu’une mesure de restitution soit prononcée. Pour le dire autrement, si l’extension non autorisée peut bien être démolie, il est aussi possible de poursuivre un justiciable et obtenir une remise en état pour un changement irrégulier de destination.

Ainsi, même si les travaux ont été régulièrement autorisés, il est envisageable de poursuivre le contrevenant pour l’affectation à une destination non prévue dans l’autorisation. Par extension, le changement de destination sans travaux pourrait donc tout aussi bien donner lieu au prononcé de mesures de restitution.

Il est possible de voir qu’il y a là une forme d’amplification des discussions qui ont animé la juridiction administrative relativement au champ d’application de l’article L481-1 du Code de l’urbanisme.

Pour mémoire, le tribunal administratif de Paris dans sa décision du 5 octobre 2022, considérait qu’il y avait méconnaissance du champ d’application de la loi dans le fait d’infliger une astreinte administrative au visa de l’article L481-1 pour un changement de destination sans travaux.
Le Conseil d’État avait alors eu une interprétation beaucoup plus large desdites dispositions dans sa décision Ville de Paris du 23 mars 2023 n°468360.
Il affirmait alors que :

« il résulte de ces dispositions, prises dans leur ensemble et eu égard à leur objet, que, si elles font référence aux " travaux ", elles sont cependant applicables à l’ensemble des opérations soumises à permis de construire, permis d’aménager, permis de démolir ou déclaration préalable ou dispensée, à titre dérogatoire, d’une telle formalité et qui auraient été entreprises ou exécutées irrégulièrement ».

Le Conseil d’État cassait la décision du tribunal administratif de Paris et ouvrait la voie à une utilisation beaucoup plus large des dispositions de l’article L481-1 du Code de l’urbanisme.

S’agissant maintenant des poursuites pénales en cause dans l’arrêt de la chambre criminelle, il peut être indiqué que l’article L480-4, servant de base légale aux poursuites, dispose simplement : « Le fait d’exécuter des travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-5 en méconnaissance des obligations imposées (…) ». On pourrait raisonnablement estimer que les infractions d’urbanisme commises sans « exécuter des travaux » n’entraient pas dans le champ d’application de ces dispositions. Cela pourrait d’autant plus se justifier que la loi pénale est, en application de l’article 111-4 du Code pénal, « d’interprétation stricte ».

Pourtant, de manière relativement (peu) surprenante, la Cour de cassation a choisi d’étendre le champ de la loi pénale en ouvrant la possibilité de prononcer des mesures de restitution pour de simples changements de destination.

Sébastien Avallone,
Avocat en droit public et droit de l’urbanisme, Docteur en droit public
Barreau de Montpellier
s.avallone chez avocat-avallone.fr

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[1Crim. 6 févr. 2024, FS-B, n° 23-81.748.

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