Salariés protégés : des propos racistes et sexistes répétés justifient un licenciement disciplinaire.

Par Frédéric Chhum, Avocat et Marion Coadic, Juriste.

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Explorer : # licenciement disciplinaire # propos racistes # propos sexistes # salarié protégé

Dans un arrêt du 7 octobre 2022 n°450492, le Conseil d’Etat considère que les propos racistes et sexistes récurrents, tenus par un chef de service, salarié protégé à l’égard de trois salariés de son service, constituent une faute d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement.

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1) Faits et procédure.

Un inspecteur du travail refuse de valider le licenciement d’un salarié protégé pour motif disciplinaire.

A la suite d’un recours hiérarchique formé par l’employeur pour excès de pouvoir, la Ministre du travail a annulé la décision de l’inspecteur du travail et autorisé le licenciement du salarié.

Par un jugement du 6 mai 2019 (n°1811062/3-1), le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision de la Ministre du travail.

Dans un arrêt du 19 janvier 2021 n°19PA02121 [1], la Cour administrative d’appel de Paris a considéré que le licenciement ne devait pas être autorisé.

L’employeur s’est pourvu devant le Conseil d’Etat.

2) Arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris.

La Cour administrative d’appel de Paris après avoir constaté que le salarié protégé, chef de service, avait prononcé, à l’encontre de trois salariés de son service, « des propos faisant explicitement référence, d’une part, au sexe de ces salariés et, d’autre part, à leur origine et à leur religion supposées », qualifie ces propos de « brutaux ou maladroits », « déplacés et sexistes » et « présentant un caractère blessant pour leurs destinataires ».

Selon la Cour administrative d’appel de Paris, en l’absence d’antécédents disciplinaires du salarié protégé, le fait d’avoir proféré de tels propos ne constitue pas une faute d’une gravité suffisante permettant de justifier le licenciement.

3) Réponse du Conseil d’Etat.

Dans son arrêt du 7 octobre 2022, le conseil d’Etat annule l’arrêt de la Cour administrative d’appel.

Le conseil d’Etat retient que les propos tenus par le salarié

« visaient systématiquement et de manière répétée des salariés ayant pour point commun d’être des femmes, supposément d’origine magrébine et de confession musulmane, qui, au surplus, se trouvaient sous sa responsabilité, et ne pouvaient, dès lors qu’ils revêtent un caractère raciste pour certains, et sexiste pour d’autres, être réduits à des propos triviaux, la cour, en estimant qu’ils ne constituaient pas une faute d’une gravité suffisante de nature à justifier son licenciement, en prenant en compte l’existence de tensions entre le salarié et son employeur et l’absence d’antécédents disciplinaires de ce salarié protégé, a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ».

4) Analyse de la décision.

Le salarié protégé est assujetti à un dispositif spécial puisqu’il ne peut être licencié sans autorisation donnée par l’inspecteur du travail.

L’inspecteur du travail doit rechercher si les faits reprochés au salarié sont suffisamment graves pour justifier le licenciement disciplinaire, au regard des règles propres à l’exécution normale du mandat dont il est investi.

L’inspecteur du travail a refusé la demande d’autorisation de licenciement, décision suivie par la Cour administrative d’appel au motif que les propos ne pouvaient constituer une faute d’une gravité suffisante.

Le Conseil d’Etat censure ce raisonnement et considère que des propos racistes et sexistes tenus par un salarié protégé, sont d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement.

Compte tenu des fonctions du salarié protégé, ces propos ne pouvaient être réduits à des propos triviaux, le licenciement disciplinaire est justifié.

Cet arrêt doit être approuvé.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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