Plus particulièrement, sont interdits la production, la fabrication, le transport, l’importation, l’exportation, la détention, l’offre, la vente, l’achat ou l’utilisation de cannabis (et de THC, à l’exception du delta 9- tétrahydrocannabinol) [2].
La violation de ces interdictions est sanctionnée pénalement.
Sont ainsi réprimés :
le trafic de stupéfiants (incluant la production, la fabrication, l’importation et l’exportation, le transport, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition ou l’emploi illicites de cannabis) [3],
l’usage illicite de stupéfiants [4], et
la provocation à l’usage et au trafic de stupéfiant [5].
Ce principe souffre cependant de trois exceptions, en passe d’élargissement.
a) Le commerce de cannabis à des fins de recherche, de contrôle ou de fabrication de dérivés autorisés.
Le Directeur général de l’agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) peut d’abord autoriser la réalisation de certaines opérations relatives au cannabis lorsque celles-ci sont réalisées à des fins de recherche, de contrôle ou de fabrication de dérivés [6].
Seules sont concernées les opérations de production, fabrication, transport, importation, exportation, détention, offre, cession, acquisition et emploi de cannabis (plante et résine, toutes variétés confondues) et de THC.
On notera que les opérations de culture de cannabis ne sont pas autorisées ici. Il appartient donc aux opérateurs souhaitant mettre en place des activités de recherche, de contrôle ou de fabrication de dérivés, de s’approvisionner à l’étranger, l’importation, étant quant à elle autorisée.
b) Le commerce de cannabis dépourvu de propriétés stupéfiantes.
Le législateur a ensuite autorisé [7], à titre dérogatoire, la culture, l’importation et l’exportation, ainsi que l’utilisation industrielle et commerciale de la plante de cannabis, dès lors qu’elle :
appartient à la catégorie Cannabis Sativa L (seule variété autorisée),
contient moins de 0,20% de delta-9-tétrahydrocannabinol.
Cependant, seules les graines et fibres de cannabis peuvent être utilisées dans le cadre de la fabrication de produits à base de cannabis. [A contrario, sont interdits la fabrication et la commercialisation de produits à base de cannabis issus d’autres parties de cannabis, comme les feuilles ou les fleurs, quand bien même celles-ci ne contiendraient pas de THC.
Sur ce point, un arrêté visant à étendre l’utilisation de toutes les parties de la plante de cannabis dépourvue de propriétés stupéfiantes devrait bientôt être promulgué afin de tirer les conséquences d’un récent arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE).
En effet, la CJUE a jugé dans un arrêt « Kanavape » [8], très largement commenté, que le droit français, qui interdit la commercialisation du CBD légalement produit dans un autre Etat membre lorsqu’il n’est pas extrait des graines et des fibres de la plante Cannabis sativa L, n’est pas conforme au droit européen en ce qu’il s’apparente à des mesures d’effet équivalent à des restrictions quantitatives à l’importation, contraires au principe de libre circulation des marchandises [9].
Le projet d’arrêté soumis à la Commission Européenne début juillet prévoit ainsi la possibilité de cultiver, d’importer, d’exporter et d’utiliser à des fins commerciales et industrielles toute partie du Cannabis Sativa L dès lors qu’il a une teneur en delta-9-tétrahydrocannabinol inférieure à 0,20%. A noter que le projet prévoit néanmoins certaines restrictions pour les fleurs et les feuilles.
Ce projet devrait être publié d’ici la fin de l’année 2021. A suivre donc …
c) Le commerce de cannabis à des fins thérapeutiques.
Enfin, le législateur français a ouvert en 2013 [10] la possibilité de réaliser certaines opérations portant sur des spécialités pharmaceutiques contenant du cannabis ou du THC.
Sont ainsi autorisées les opérations de fabrication, transport, importation, exportation, détention, offre, cession, acquisition et emploi de spécialités pharmaceutiques à base de cannabis, ayant fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché [11] (y compris les autorisations d’accès précoce).
A noter qu’ici les opérations portent sur les spécialités pharmaceutiques à base de cannabis et non pas sur le cannabis lui-même. La culture et la production de cannabis ne sont donc logiquement pas admises.
Deux médicaments, le Sativex® et le Marinol®, tous deux à base de THC et de CBD, ont ainsi obtenu une autorisation de mise sur le marché, respectivement en 2014 et 2018. Ils n’ont cependant jamais été commercialisés, faute d’accord sur le prix pour le premier et le second étant toujours en attente des avis de la commission de transparence de la Haute Autorité de santé (HAS) et du Comité économique des produits de santé (CEPS).
En parallèle de cette exception, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 pose les jalons d’une expérimentation nationale relative à l’usage médical du cannabis [12] visant à :
(i) évaluer la faisabilité du circuit de mise à disposition du cannabis pour les patients (prescription par les médecins, délivrance par les pharmaciens, approvisionnement en produits et suivi des patients) et,
(ii) recueillir les premières données françaises sur l’efficacité et la sécurité de son utilisation dans un cadre médical en vue de déterminer si elle pourra, à terme, être généralisée.
Dans le cadre de cette expérimentation, la prescription de médicaments contenant du cannabis, est autorisée, en seconde intention, pour les pathologies suivantes [13] :
les douleurs neuropathiques réfractaires aux thérapies (médicamenteuses ou non) accessibles ;
certaines formes d’épilepsie pharmaco-résistantes ;
certains symptômes rebelles en oncologie liés au cancer ou au traitement anticancéreux ;
les situations palliatives ;
la spasticité douloureuse de la sclérose en plaques ou des autres pathologies du système nerveux central.
L’ANSM a sélectionné des couples « fabricants / exploitants » habilités à produire et à distribuer les médicaments utilisés pour l’expérimentation en France.
Compte tenu de la règlementation actuelle, aucun fabricant français n’a pu candidater pour fabriquer ces médicaments, la culture et la production de cannabis contenant plus de 0,20% de THC n’étant pas autorisées en l’état en France.
Si l’expérimentation devait aboutir à un élargissement du recours au cannabis à des fins thérapeutiques, il nous semble que l’extension de la réglementation relative à la culture et à la production de cannabis devrait être envisagée, afin de pouvoir réaliser ces opérations en France sans avoir recours à l’importation.
La règlementation française applicable au cannabis évolue et est à surveiller.
L’utilisation du cannabis à titre thérapeutique de manière plus élargie devient envisageable. La France semble se rapprocher ainsi de la règlementation de nombreux autres pays de l’UE a ce sujet.