« Ce qui est ambigu s’interprète par ce qui est d’usage… ».
Code Napoléon, article 1159
Toutes les Professions dans tous les pays où s’exerce la libre concurrence pratiquent ce qui est communément appelé des Conditions Générales de Vente (CGV), le contrat pour la rédaction duquel ces conditions vont servir pouvant être dans les relations interindustrielles soit un contrat de vente soit un contrat d’entreprise. Aussi, les organisations professionnelles se sont dotées depuis de nombreuses années de tels outils.
Ces documents sont généralement rédigés au sein des syndicats professionnels, qui ont pour mission la représentation d’un secteur, ainsi que la constatation de ses usages.
Les auditions autour du projet de loi LME (modernisation de l’économie ou projet LAGARDE) au mois de juin 2008, ont d’ailleurs montré que les CGV jouent un rôle capital dans le règlement des litiges, mais également que le cadre réglementaire de la sous-traitance, constitue un enjeu capital pour une bonne partie des PME & PMI françaises. Un député rappelait d’ailleurs que cette réglementation « date de plus de trente ans. Dans l’attente d’une remise à jour, il est nécessaire de préserver les conditions générales de vente, « socle » des relations commerciales ».
D’ailleurs, la loi française n’impose-t-elle pas au fournisseur de se doter de Conditions générales de Vente afin de les communiquer aux acheteurs sur demande (1) ? Les PME/PMI peuvent ainsi s’inspirer de ces CGV professionnelles pour former la trame de leurs propres CGV d’entreprise. Enfin, la sanction des abus constituent une sorte de recueil des « usages » qui sert de référence aux magistrats.
Il en va de même sur le plan international, où la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente internationale de marchandises rend applicable tout « usage » largement connu et régulièrement observé dans la branche (2).
Ainsi, les CGV professionnelles, représentant l’usage, remplissent une fonction que ne peuvent, par définition, remplir les CGV de chaque entreprise, trop souvent soumise au rapport de force avec leur donneur d’ordre.
Enfin, elles contribuent à faire échec aux clauses illégales que cherchent à imposer les acheteurs, et notamment la classique : « (…) les présentes CGA sont applicables dès l’acceptation de la Commande dans les conditions définies à l’Article trois (3), dans leur intégralité comme seules conditions contractuelles applicables entre le Fournisseur et notre Société, le Fournisseur renonçant à ses propres conditions générales de vente ».
Elles rappellent par ailleurs quelques règles de droit, et notamment le principe selon lequel le client ne peut se faire justice en débitant sans motif et sans l’accord du fournisseur des sommes au titre d’inexécution : « Il en est de même du paiement de la différence entre le montant total de la facture et le prix des pièces susceptibles de donner lieu, sur contestation du Client, à des avoirs ou notes de crédit, éventuellement consentis par le Fournisseur en application de l’article (…). Le Client ne peut se dispenser de payer tout ou partie d’une somme due au Fournisseur ou en retarder le règlement en raison de prétentions quelconques de sa part, notamment au titre des droits à garantie, sans l’accord du Fournisseur ».
En conclusion, les CGV répondent à une impérieuse nécessité en offrant aux parties contractantes le cadre juridique précis à l’intérieur duquel est appelé à se former en toute clarté l’accord des volontés. Leur légitimité est au demeurant admise dès lors qu’elles ne visent pas à restreindre sans justification les obligations des membres d’une profession ou la libre concurrence en général. Enfin, elles sont le gage de la transparence exigée par l’article L. 441-6 du Code de Commerce : « Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle ». D’autant que le même article rappelle que « celles-ci constituent le socle de la négociation commerciale ».
(1) Article L441-6 du Code de commerce.
(2) Article 9, 2.
Par Thierry CHARLES / Docteur en droit / Directeur des Affaires Juridiques d’Allizé-Plasturgie
Membre du Comité des Relations Inter-industrielles de Sous-Traitance (CORIST) au sein de la Fédération de la Plasturgie