Les conditions pour la demande de revendication.
La demande de revendication de marchandises est possible uniquement si le créancier remplit les conditions suivantes détaillées à l’article L624-16, 2ᵉ alinéa, du Code de commerce :
- Livraison des marchandises ;
- Accord préalable écrit avec une clause de réserve de propriété ;
- Absence de règlement des marchandises ;
- Présence des marchandises en nature au moment de l’ouverture de la procédure collective ;
- Suivi de la procédure de revendication :
- a) Envoi de la demande de revendication au mandataire dans un délai de maximum 3 mois après la publication du jugement de liquidation ou redressement judiciaire [1],
- b) En cas de refus ou d’absence de réponse dans un délai d’un mois après la réception de la demande de revendication,
- c) Saisie du juge commissaire dans un délai d’un mois à compter de l’expiration du délai d’un mois pour répondre [2].
La réponse tardive mais positive de l’administrateur judiciaire.
Dans un arrêt récent rendu par la Cour d’Appel de Douai (3 avril 2025 RG n° 23/02409), la cour a considéré que la réponse de l’administrateur judiciaire même tardive était valable, si elle acceptait la demande de revendication.
En l’espèce, l’administrateur avait acquiescé à la demande de revendication par téléphone et avait promis de payer le prix des marchandises soit environ 240 000,00 €. Préalablement, le créancier avait identifié les marchandises sur une liste de l’inventaire des biens toujours présents chez la société en liquidation.
Toutefois, la réponse écrite arriva deux jours après le délai d’un mois pour répondre.
L’administrateur avait été interrogé le 5 mai par LR/AR et sa réponse arriva le lundi 7 juin par email et LR/AR.
Dans ce cas, nous avions deux hypothèses, soit considérer que cette réponse était valable puisque c’était un acquiescement. Soit au contraire, comme le délai d’un mois avait expiré, assimiler cet acquiescement tardif à un défaut de réponse dans le mois suivant la demande et saisir le juge commissaire dans un délai d’un mois.
Le texte de l’article R624-3 alinéa 2 du Code de commerce prévoit que :
« A défaut d’acquiescement dans le délai d’un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d’un mois à compter de l’expiration du délai de réponse ».
Toutefois, la logique et le bon sens voudraient que, si l’administrateur judiciaire accepte la demande de revendication avant l’expiration du délai d’un mois pour saisir le juge commissaire, le créancier ne soit pas obligé de le saisir. L’acquiescement est un accord. C’est ce qu’a décidé la Cour d’Appel de Douai dans son arrêt du 3 avril 2025 :
« La saisine du juge-commissaire par le créancier dans le délai de l’article R624-3 du Code de commerce suppose un refus opposé par l’administrateur ou un défaut de réponse et l’acquiescement à la demande de revendication dispense le créancier de saisir le juge-commissaire dans le délai fixé par l’article R624-13 du Code de commerce. Plus généralement, dès lors que l’acquiescement de l’administrateur est parvenu à la connaissance du revendiquant dans le délai qui lui était imparti pour saisir le juge-commissaire la forclusion attachée à l’absence de cette saisine de ce dernier ne peut lui être opposée ».
L’administrateur avait essayé par tous les moyens de défendre que son acquiescement n’était pas valable. D’une part, en expliquant que l’acquiescement donné après le délai d’un mois est considéré comme un défaut de réponse et d’autre part, en disant que l’acquiescement était pour une somme distincte à celle revendiquée. Ce deuxième argument n’était pas pertinent parce que la différence était minime (à peine 0,5% des sommes revendiquées) et en outre le créancier a accepté la somme proposée par l’administrateur le jour même par écrit.
Par ailleurs, la cour d’appel a également ajouté que pour le calcul du délai d’un mois, il fallait faire application des articles 641 et 642 du Code de procédure civile. Ainsi, le délai ne pouvait pas expirer un samedi mais plutôt le lundi suivant, le jour où la réponse a été envoyée par écrit.
Mon conseil est d’avoir toujours la plus grande méfiance vis-à-vis des administrateurs ou liquidateurs judiciaires. Pour éviter toute contestation, il convient toujours de saisir le juge commissaire. Même si ça peut paraître ridicule dans un cas où l’administrateur accepte la demande de revendication et où il existe un accord entre les parties. Cela permet d’éviter des procédures qui durent facilement trois ans et frustrent encore plus les créanciers.