L’essentiel des commentaires administratifs est consacré aux conditions d’obtention des abattements sur le montant de la plus-value imposable…étant précisé que lesdites réductions d’assiette ne concernent que l’impôt sur le revenu, et non les prélèvements sociaux qui s’élèvent dans tous les cas à 15.5% de la plus-value totale.
Dans le cadre du régime dit de droit commun, la plus-value réalisée est réduite de 50% après deux ans de détention et de 65% à l’issue d’une période de huit ans. Cette mesure a une portée très générale : elle s’applique à toutes les catégories d’actions ou parts, sans distinguer selon la nature juridique de l’entité cédée, ni selon la forme nominative ou au porteur des titres. La cession de droits démembrés bénéficie de la même réduction d’assiette. Les gains de cession de bons de souscription d’action (BSA) ou de droits de souscription ou d’attribution détachés des actions en sont en revanche exclus.
Les contribuables ayant acquis des titres par l’intermédiaire de fonds communs de placement ou de SICAV sont logés à la même enseigne que les investisseurs directs à la condition que l’actif de ces organismes soit composé d’actions ou parts de sociétés pour 75% de son montant. Cette dernière exigence n’est toutefois pas opposée en cas de cession de parts de FCPR, FIP ou FCPI.
La transparence ainsi reconnue à ces organismes intermédiaires permet à leurs membres de bénéficier du même abattement pour l’imposition des distributions en provenance de plus-values de cessions des titres éligibles. La condition tenant à la composition de leur actif s’applique alors dans les mêmes conditions.
Bien que le texte légal limite l’application de l’abattement aux « gains nets » réalisés, l’administration entend l’opposer également aux moins-values subies. L’économie d’impôt représentée par la faculté d’effacer des plus-values imposables par l’utilisation de moins-values sera paradoxalement d’autant plus faible que le contribuable a persévéré dans la détention longue des titres porteurs de moins-values.
Un mécanisme d’abattement dit renforcé est prévu dans un certain nombre de situations. Il se substitue à plusieurs mesures d’abattement ou d’exonération qui prévalaient dans le passé. Les réductions d’assiette applicables sont les suivantes :
50%pour une détention de plus d’un an et moins de quatre ans ;
65% pour une détention d’au moins quatre ans et de moins de huit ans ;
85% pour une détention d’une durée au moins égale à 8 ans.
Ce dispositif s’applique en cas de cession de titres d’une PME (au sens de la définition communément retenue dans les textes communautaires) acquis ou souscrits dans les dix ans suivant sa création. Les principales conditions posées à l’égard de la société cédée sont les suivantes :
Elle ne doit pas être issue d’une opération de concentration, restructuration, extension ou reprise d’activité préexistante ;
Elle doit être implantée dans un état membre de l’espace économique européen ;
Elle doit être passible de l’impôt sur les bénéfices ou d’un impôt équivalent (l’administration précise que cette équivalence n’est pas reconnue aux impôts sur le capital ni aux impôts fonciers) ;
Elle doit avoir exercé de façon continue depuis sa création jusqu’à la cession des titres une activité à caractère professionnel (industrielle, commerciale, libérale…) – à l’exclusion donc d’une activité patrimoniale – ou avoir le statut de holding animatrice de son groupe. Dans ce dernier cas, l’instruction exige que le holding et toutes ses filiales satisfassent aux conditions visées ci-dessus, concernant notamment leur date de création. Une telle contrainte limite la portée pratique de l’abattement en cas de cession de titres de cette nature et introduit une regrettable inégalité dans la portée du présent dispositif en fonction de l’organigramme mis en place au sein des groupes de PME.
Un autre cas d’application de l’abattement renforcé concerne les cessions au sein du groupe familial de tout ou partie d’une participation au sein d’une société implantée dans un état de l’espace économique européen qui est soumise à l’impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent, sous réserve que ces personnes aient détenues ensemble au moins 25% du capital de la société considérée à un moment quelconque au cours des cinq dernières années. S’il préserve un avantage en faveur des entreprises familiales, ce dispositif marque néanmoins un net recul par rapport à la législation antérieure qui prévoyait une exonération complète desdites plus-values, sans condition de délai de détention. L’administration transpose à la présente mesure l’ensemble des règles doctrinales qu’elle avait publiées pour l’application du précédent cadre législatif y compris, malheureusement, celle suivant laquelle toute cession ultérieure, même partielle, des titres reçus à l’extérieur du cercle familial entraîne la remise en cause de l’abattement pour la totalité de la plus-value réalisée lorsqu’elle intervient dans le délai de cinq ans suivant la première transaction.
Le dernier cas d’application de l’abattement majoré concerne les dirigeants de PME (au sens de la réglementation communautaire) qui cèdent leur participation à l’occasion de leur départ en retraite. Cet abattement majoré s’applique après imputation sur la plus-value réalisée d’un abattement fixe de 500 000€, indépendant de la durée de détention des titres. De nombreuses conditions sont posées par la loi pour bénéficier de cette mesure concernant notamment :
Les fonctions de direction exercées par le cédant, sa rémunération, qui doit excéder la moitié de ses revenus professionnels ;
Le niveau de détention du capital de la société cédée par le groupe familial, au moins égal à 25% durant les cinq dernières années ;
L’activité de la société cédée : elle peut déployer une activité professionnelle, une activité de holding, mais en aucun cas une activité patrimoniale ;
L’absence de lien entre le cédant et l’acquéreur
Le calendrier de la cession de titres et du départ en retraite, les deux opérations devant être proches.
Dans ses commentaires, l’administration reprend l’essentiel des règles énoncées à propos de l’ancien régime qui prévoyait dans les mêmes situations un abattement du tiers sur la plus-value réalisée pour chaque année de détention au-delà de la cinquième, aboutissant à une exonération complète à l’issue d’une détention de huit ans.
Elle revient toutefois sur la mesure qui ouvrait le bénéfice de l’abattement aux co-fondateurs et aux membres du groupe familial qui cèdent leurs titres en même temps que le dirigeant prenant sa retraite. Ce changement doctrinal contribue à l’alourdissement de la fiscalité des transmissions d’entreprises familiales et introduit de fâcheux écarts de prélèvements entre les différents cédants qui ont pris le risque économique d’un investissement dans une PME.
Discussions en cours :
Bravo pour cet article qui résume de façon très précise les données actuelles sur la fiscalité des plus-values mobilières.
Peut-être faut-il souligner un peu plus le caractère illégal de l’instauration d’abattements sur les moins-values, par l’administration fiscale, qui ne sont pas prévues explicitement par la loi officielle. A part le fait que la déclaration de revenus peut tourner à l’usine à gaz, un contribuable peut se retrouver avec une imposition sur un profit virtuel qu’il n’a pas réalisé, alors qu’en fait il a une moins-value réelle globale (situation aberrante largement commentée dans la presse financière en 2014, en particulier par l’ avocat F Ruault du cabinet F Lefebvre). En plus, on peut soupçonner une volonté délibérée de nuire à l’investisseur, car beaucoup de porte-feuilles comportent des moins-values sur des titres acquis anciennement ("crise" de 2008) qui ne pourront jamais être apurées.
Bonjour,
Merci pour cette synthèse qui permet de voir plus clairement les modifications apportées par la loi de finances pour 2014.
Une question reste néanmoins en suspens : une personne possède une entreprise au Panama soumise à l’IS. Elle souhaite la vendre et sait qu’elle va réaliser une très forte plus-value. Est-il concevable qu’elle utilise le dispositif d’apport-cession en apportant les titres de cette société panaméenne à une holding française (constituée dès lors d’une SA française pré-existante et de la société panaméenne), qu’elle cède ensuite les parts de la société panaméenne et que, pour éviter l’impôt sur la plus-value, elle remploie la somme issue de la vente de la société panaméenne dans une entreprise ?
Cordialement
Merci pour cette synthèse très opérationnelle.