Même si, déjà, de nombreux outils répressifs ou mesures procédurales donnent aux magistrats la possibilité légale de déposséder les auteurs d’infractions d’éléments de leur patrimoine, le législateur a tenu récemment à faciliter les saisies et confiscations en matière pénale par la loi n° 2010-768 du 9 juillet 2010.
Cette loi de procédure porte trois grands objectifs : démultiplier dès le stade de l’enquête judiciaire, c’est-à-dire, avant tout jugement, les possibilités de saisie de tout ou partie du patrimoine d’une personne mise en cause, créer une véritable procédure de saisie pénale, parallèlement à ce qui existe en matière civile et enfin gérer, de manière centralisée et efficace, les biens et avoirs gelés, saisis ou confisqués.
En premier lieu, le droit pénal généralise la peine complémentaire de confiscation à tout bien, qu’il soit corporel ou incorporel, par exemple des parts de sociétés ou des titres mobiliers inscrits en compte. Cette peine, initialement réservée aux personnes physiques, s’étend même aux personnes morales, ce qui pourrait permettre d’appréhender auprès de sociétés « écran » des biens ou des valeurs que des personnes mises en cause auraient cherché à dissimuler.
En outre, la loi du 9 juillet 2010 tend à permettre à l’autorité judiciaire, tant au profit du procureur de la République chargé de la direction de l’enquête pénale qu’au bénéfice du juge d’instruction conduisant l’information judiciaire, de plus grandes facilités en matière de saisie de tout bien, ceci avant même le prononcé du jugement de condamnation éventuelle. La mesure de saisie change alors de nature, ne servant plus à la seule manifestation de la vérité, mais s’imposant comme une véritable pré-sanction pénale visant à porter atteinte au droit de propriété garanti à tout individu.
En effet, pendant l’enquête de flagrant délit, il sera désormais possible aux enquêteurs de saisir le produit direct ou indirect d’un crime. En outre, sous contrôle du parquet, il donne pouvoir aux officiers de police judiciaire de pouvoir saisir en tout ou partie le patrimoine d’un mis en cause, en vue de sa confiscation ultérieure par la juridiction qui jugera l’auteur de l’infraction. En cas d’enquête préliminaire, ce sera le juge des libertés et de la détention qui autorisera les enquêteurs à saisir le patrimoine de la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction, sous réserve que la peine de confiscation soit applicable aux faits poursuivis.
Autre nouveauté procédurale, en cas de délit contre les biens, punissable d’une peine d’emprisonnement de trois ans ou plus, comme par exemple le vol, l’escroquerie ou les abus de confiance, il sera désormais possible de prendre des mesures conservatoires durant l’enquête, celles-ci étant destinées à garantir le paiement des amendes ultérieures et l’indemnisation des victimes. Il sera donc de plus en plus difficile aux auteurs d’infractions, en cela bien organisé et conseillé sur le plan patrimonial, de faire échapper tout ou partie de leur patrimoine à la sanction du juge pénal.
Le législateur a complété utilement son dispositif répressif par la création d’une agence nationale spécialisée, qui sera chargée de la gestion de tous les biens saisis et confisqués, notamment en vue de leur cession, afin d’assurer une administration optimale et moderne de ces nouvelles ressources au profit de l’Etat et de faciliter le travail des magistrats du parquet et de l’instruction.
Il est donc prévisible que prochainement les magistrats qui dirigent les enquêtes pénales vont multiplier les réquisitions, actes de saisie ou mesures conservatoires pour appréhender à l’encontre des différentes composantes du patrimoine des personnes mises en cause pénalement, qu’ils soient détenus dans les établissements bancaires, auprès des compagnies d’assurances ou chez les dépositaires de valeurs.