Jusqu’à présent, les dispositions du Code rural sanctionnaient le fait « de mettre sur le marché un produit d’origine animale ou une denrée en contenant préjudiciable à la santé au sens de l’article 14 du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 ou de s’abstenir de mettre en œuvre des procédures de retrait ou de rappel d’un tel produit qu’il a importé, produit, transformé ou distribué, en méconnaissance de l’article 19 du même règlement communautaire. »
Aucun texte toutefois ne permettait de déterminer à quel instant cette procédure de retrait devait être mise en œuvre.
Dans le cas soumis aux hauts magistrats, des contrôles micro-biologiques réalisés les 2 et 5 juillet 2010 avaient permis d’établir la présence, dans les lots de découpes concernés, d’une forme pathogène de la bactérie Escherichia Coli.
Informée le 7 juillet 2010 des résultats de ces deux contrôles, et le 8 juillet du résultat également positif des analyses complémentaires effectués, la société coopérative d’intérêt collectif agricole s’est abstenue d’engager la procédure de retrait du marché des denrées contaminées : elle a préféré attendre la remise d’un rapport par le Laboratoire Nationale de Référence (LNR) et la confirmation par la Direction départementale de protection des populations (DDPP) des mesures à envisager en telle situation. La société avait pourtant établi la traçabilité de ses produits avec les carcasses contaminées par la bactérie.
De ce fait, la Cour de cassation a considéré qu’elle avait « des raisons plus que sérieuses de penser que le minerai ne répondait pas aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées publiques ». En sa qualité d’exploitant, la société devait « engager immédiatement la procédure de retrait du marché des produits contaminés, conformément aux préconisations du Guide d’aide à la gestion des alertes d’origines animales publiées depuis 2005 par le Ministère en charge de l’Economie, de la santé et de l’agriculture ».
Cette décision vient combler une vraie lacune du Code rural qui assurait du caractère répréhensible de l’infraction, sans toutefois préciser à quel instant cette infraction était considérée comme commise.
Ainsi, cette décision met en exergue une situation factuelle dessinant les contours de l’élément constitutif de l’infraction. Cette situation factuelle est celle qui permet d’ « avoir des raisons de penser » qu’une denrée alimentaire traitée ne répond pas aux dispositions relatives à la sécurité alimentaire. La Cour de cassation prend également garde à ne pas livrer ces « raisons de penser » à la rumeur ou à l’information non vérifiée, ni d’en faire une arme à la disposition de concurrents déloyaux.
Dans le cas d’espèce, elle rattache ces « raisons de penser » à deux contrôles micro-biologiques, réalisés selon un processus fiable et donnant lieu à des résultats alors quasi-indiscutables.
En cela, nous pouvons nous satisfaire du fait que la Cour de cassation a pris en considération la lourdeur d’une telle procédure, du fait des moyens déployés initialement par l’entreprise pour la distribution de ses produits, puis de ceux à mettre en œuvre pour gérer leur retrait, ainsi que le manque à gagner qui résulte de cette situation, outre le risque d’image et de réputation