Un sujet proposé par la Rédaction du Village de la Justice

Location immobilière : quelles sont les règles pour le locataire en matière de travaux ?

Par Bastien Favard, Avocat.

175 lectures 1re Parution:

Explorer : # aménagements # litiges locatifs

Ce que vous allez lire ici :

L'article traite de la distinction entre aménagements et transformations dans le cadre locatif, selon la loi du 6 juillet 1989. Il souligne que les aménagements sont légers et réversibles, tandis que les transformations nécessitent un accord écrit du bailleur. La clarté contractuelle est essentielle pour prévenir les litiges.
Description rédigée par l'IA du Village

La question des travaux entrepris par le locataire dans les lieux loués est une problématique récurrente, cristallisant la tension entre la prérogative du preneur de jouir paisiblement du bien et d’y apporter des aménagements conformes à ses besoins et le droit du bailleur de préserver la substance et la structure de son bien immobilier.

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1. La nécessaire distinction entre aménagements et transformations.

L’article 7 f) de la loi du 6 juillet 1989 pose une distinction clé : si le locataire ne peut "transformer les locaux loués et leurs équipements", il peut en revanche procéder à de simples "aménagements". La jurisprudence interprète l’aménagement comme une modification légère, n’affectant pas le gros œuvre, la structure, la configuration essentielle des lieux où les équipements indispensables, et souvent réversible sans dégradation majeure. Ainsi, la jurisprudence considère généralement comme de simples aménagements la pose d’étagères, le changement de papier peint ou des travaux de peinture dans des teintes classiques.

De même, l’installation de quinze spots lumineux dans le plafond répondant à un besoin de confort a été jugé comme un simple aménagement [1] ainsi que la modification des plinthes ou la pose sur le revêtement initial d’un parquet pouvant être facilement enlevé [2].

En revanche, a été qualifiée de transformation par les tribunaux la modification substantielle des installations sanitaires [3], la suppression d’une cheminée ou encore le percement ou la démolition d’un mur porteur [4].

De même, la modification irréversible d’un revêtement de sol noble (ex : parquet) par un matériau différent tel que le carrelage est typiquement considérée comme une transformation. Il est à noter que même des travaux de peinture, s’ils sont réalisés dans des couleurs très excentriques ou sombres rendant la relocation objectivement difficile, peuvent parfois être considérés par les juges comme justifiant une remise en état aux frais du locataire, non pas forcément au titre d’une transformation, mais d’un manquement à l’obligation d’user paisiblement de la chose louée ou d’une dégradation [5].

Il en est de même lorsque le locataire modifie la configuration des lieux loués et la disposition des parties communes par rapport aux parties privatives en aménageant des chambres de bonne en un espace de vie unique [6].

Est considéré également comme une transformation, le fait d’abattre une cloison pour réunir deux appartements mitoyens, même si cette transformation est réversible [7] ou pour créer une cuisine [8].

Constitue une transformation la pose de panneaux photovoltaïques [9] ou encore le fait de couper la majeure partie des arbres entourant la maison louée [10].

2. L’exigence d’un accord écrit et préalable du bailleur en cas de transformation.

Pour tout projet qualifiable de transformation au sens de l’article 7 f), l’obtention de l’accord exprès et écrit du bailleur est un prérequis indispensable. La jurisprudence est constante sur ce point et particulièrement rigoureuse quant à la preuve de cet accord, écartant régulièrement les tentatives de preuve d’un consentement verbal faute de commencement de preuve par écrit conforme aux exigences légales [11].

3. La responsabilité du bailleur en matière d’autorisations d’urbanisme.

Il convient de distinguer l’autorisation contractuelle du bailleur de l’autorisation administrative potentiellement requise par le Code de l’urbanisme. La demande d’autorisation d’urbanisme relève de la prérogative du propriétaire. Le locataire, même autorisé contractuellement par le bailleur à faire les travaux, ne peut déposer lui-même la demande. Il appartient au bailleur, s’il consent aux travaux soumis à autorisation administrative, d’effectuer les démarches nécessaires. Agir autrement exposerait le locataire et potentiellement le bailleur à des sanctions administratives et contractuelles.

4. La sanction par le bailleur des transformations non autorisées.

En présence de transformations réalisées sans l’accord écrit du bailleur, celui-ci dispose, à la fin du bail, de deux possibilités :

  • Soit exiger du locataire la remise en état immédiate des lieux à ses frais.
  • Soit conserver le bénéfice des transformations sans devoir la moindre indemnité au locataire sortant, appliquant ainsi le principe selon lequel le bailleur n’a pas à subir une modification de son bien qu’il n’a pas autorisé, quand bien même elle en augmenterait la valeur [12].

Le bailleur peut en outre solliciter des dommages-intérêts si ces travaux non autorisés lui ont causé un préjudice distinct et prouvé.

Toutefois, le bailleur qui, au départ du locataire, ne réclame pas la remise en état, ne formule aucune réserve, reloue les lieux en l’état et garde le silence pendant 5 ans, est présumé avoir accepté les transformations [13].

5. La Prévention des litiges par l’insertion dans le bail de clauses dédiées.

Une rédaction précise du contrat de bail permet d’anticiper et de prévenir nombre de litiges en matière de transformation.

Les parties peuvent ainsi convenir d’y insérer :

  • Un rappel de l’article 7 f) et de la distinction aménagement/transformation, éventuellement illustrée d’exemples pertinents au bien loué.
  • La procédure formalisée que le locataire doit suivre pour solliciter une autorisation de travaux.
  • Une clause essentielle réglant par avance le sort des améliorations en fin de bail, spécifiquement pour les travaux de transformation autorisés par le bailleur. Cette clause doit prévoir si les aménagements seront conservés par le bailleur (gratuitement ou moyennant une indemnité à définir) ou si le locataire devra procéder à leur suppression et à la remise en état initiale. L’absence d’une telle clause en cas de travaux autorisés peut générer des contentieux sur l’application des règles de l’accession ou de l’enrichissement sans cause, qu’il est préférable d’éviter.

Conclusion.

L’équilibre entre le droit du locataire d’adapter le logement à son usage et le droit du propriétaire de préserver son patrimoine impose une application rigoureuse des règles posées par la loi de 1989, éclairée par une jurisprudence riche. La distinction entre simple aménagement et transformation demeure centrale, tout comme l’exigence d’un accord écrit et préalable du bailleur pour la seconde catégorie, dont la preuve est appréciée strictement. La clarté des clauses contractuelles, notamment sur le sort des améliorations autorisées, constitue la meilleure garantie d’une relation locative apaisée et juridiquement sécurisée.

Bastien Favard
Avocat au Barreau d’Aix-en-Provence

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Notes de l'article:

[1Voir en ce sens CA Paris, 6e ch. C, 20 mars 2001.

[2Voir par ex. CA Colmar, 4 déc. 2017, n°16/04010.

[3Ex : remplacement d’une baignoire par une douche impliquant des travaux de plomberie et carrelage importants, cf. par exemple CA Paris, Pôle 4 Ch. 3, 15 mars 2018, n° 16/07018.

[4CA Chambéry, 29 sept. 2020, n°18/01615.

[5Cass. Civ. 3ème, 10 nov. 2009, n° 08-17.128.

[6CA Paris, 6e ch. C, 22 janv. 2008, n°07/07027.

[7Voir par ex. CA Paris, 4e ch., 31 mai 2011, n°10/09024.

[8CA Limoges, 12 mai 2021, n°19/01127.

[9CA Nîmes, 1re ch. civ., sect. B, 23 mai 2013, n°12/03451.

[10CA Grenoble, 8 avr. 2008, n°06/01003.

[11Cass. 3e civ., 1er avr. 2008, n° 05-17.857 et Art. 1359 et suivants Code Civil sur la preuve des actes juridiques.

[12CA Versailles, 1re ch., 18 févr. 2000, n° 98/02478.

[13Cf. Cass. 3e civ., 22 janv. 1997, n° 95-12.754.

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