En l’espèce, une salariée avait été licenciée pour faute grave au motif qu’elle avait tenu des propos injurieux et humiliants à l’encontre de son employeur. Elle avait adhéré à un groupe fermé sur Facebook, limité à quatorze personnes, dénommé « Extermination des directrices chieuses ».
Les juges du fond avaient jugé son licenciement sans cause réelle et sérieuse, considérant que les conditions dans lesquelles les propos litigieux avaient été tenus s’apparentaient à une conversation privée.
L’employeur s’était pourvu en cassation, soutenant que caractérise une faute grave la seule diffusion, publique ou privée, par le salarié sur Facebook de propos injurieux et humiliants à l’encontre de son employeur.
Cette position a été rejetée par la Cour de cassation, qui a retenu que « attendu qu’après avoir constaté que les propos litigieux avaient été diffusés sur le compte ouvert par la salariée sur le site Facebook et qu’ils n’avaient été accessibles qu’à des personnes agréées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de quatorze personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation de nature privée, la cour d’appel a pu retenir que ces propos ne caractérisaient pas une faute grave ».
Cette solution n’est pas nouvelle puisqu’il a été jugé que l’employeur n’était pas autorisé à utiliser des propos recueillis sur un profil réservé aux amis pour établir une faute du salarié (Cass. Civ. 1re, 10 avr. 2013, n° 11-19530), ni à accéder déloyalement au profil Facebook fermé d’un salarié en utilisant le portable professionnel d’un autre salarié (Cass. Soc. 20 déc. 2017, n° 16-19609).
Cependant, la Haute juridiction pose plusieurs conditions pour que de tels propos, en lien avec la vie de l’entreprise, échappent au pouvoir disciplinaire de l’employeur : au-delà de devoir être tenus dans un groupe fermé non accessible librement, encore faut-il que le nombre de personnes ayant pris connaissance de ces propos soit limité. Ainsi, si le groupe fermé concernait la grande majorité des salariés d’une entreprise et qu’un salarié tenait des propos injurieux à l’encontre de l’employeur, il n’est pas certain qu’il pourrait se protéger derrière le bouclier de sa vie privée.
En ce sens, plusieurs Conseils de prud’hommes et Cours d’appel ont eu l’occasion de juger que des propos offensants à l’égard de l’employeur tenus sur les réseaux sociaux « ouverts » pouvaient constituer une faute disciplinaire (v. CPH Boulogne-Billancourt, 19 nov. 2010, n° 10/00853 ; CA Lyon, 24 mars 2014, n° 13/03463).