Lors d’une opération de fusion-acquisition, les deux parties prenantes s’efforcent de défendre leurs intérêts respectifs. L’acquéreur peut initier un audit d’acquisition, une étape cruciale dans le processus de reprise d’une société. Cet audit, appelé « due diligence », permet de valider les informations fournies par le cédant et d’évaluer la justesse du prix de cession. Au-delà de cet examen juridique et financier de l’entreprise cible, l’acquéreur peut également se prémunir en négociant une clause de « earn-out ».
Il s’agit d’un terme anglo-saxon proche du concept de « complément de prix ».
En premier lieu, les clauses d’earn-out peuvent faire l’objet d’une négociation approfondie entre les parties.
Les clauses d’earn-out sont apparues pour la première fois en Grande-Bretagne dans les années 80. Leur utilisation est devenue fréquente [1] dans les contrats d’acquisition de sociétés, notamment en raison des succès de montages d’acquisition utilisant l’effet de levier de l’endettement [2]. Cette clause connaît même un regain d’intérêt, en raison du contexte de crise mondiale [3] qui rend plus incertaine la progression des résultats de l’entreprise.
La clause d’earn-out concilie les intérêts du repreneur, qui doute de la valeur réelle de l’entreprise, et du cédant, désireux de maximiser le prix de vente. Elle conditionne une partie du prix de cession aux performances futures de l’entreprise. Ce mécanisme est particulièrement pertinent lorsque le dirigeant reste en poste après l’acquisition, favorisant ainsi une transition réussie. L’earn-out se compose d’une partie fixe (prix plancher) et d’une partie variable, calculée en fonction des résultats obtenus après la transaction.
Le principal défi de cette clause est de déterminer les critères de performance pour la partie variable, qui repose sur des éléments tels que le résultat net ou l’EBE (excédent brut d’exploitation), sur une durée de un à trois ans. L’earn out comporte des risques, principalement pour le vendeur, qui subit un aléa sur le prix final, tandis que l’acheteur compense généralement ce risque par des améliorations de la performance de l’entreprise.
Pour limiter ces risques, il est crucial de bien encadrer la clause dans le protocole d’accord, notamment en précisant les critères de calcul (exclusion de certains produits ou charges, gestion des investissements), et en prenant en compte les risques externes (sinistres) pouvant affecter la performance de l’entreprise cible. En somme, une rédaction claire et détaillée est essentielle pour éviter les conflits et garantir une transaction réussie.
De son côté, le cédant peut aussi solliciter des garanties, notamment pour assurer le maintien en poste des cadres dirigeants sous contrat de travail. Il s’agit de la clause de garantie d’emploi.
En effet, suite à la cession de l’entreprise, les contrats de travail sont transférés de plein droit de l’ancien employeur au nouvel employeur. L’article L1224-1 dispose que
« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise ».
La clause de garantie d’emploi a pour objet d’assurer au salarié la stabilité de son emploi. Cette clause est limitée dans le temps. Durant cette période, l’employeur s’interdit de licencier le salarié sauf force majeure ou pour faute grave ou lourde. Cette clause est souvent assortie d’une sanction financière pour l’employeur contrevenant à son obligation, lequel devra verser au salarié une indemnité de licenciement majorée. Cette indemnité s’ajoutera aux dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse [4].
Ces garanties de part et d’autre constituent des promesses réciproques que nous pouvons rapprocher du concept de symétrie des attentions [5].
Si la clause de earn-out protège le repreneur, à l’instar de la clause de garantie de passif, le cédant peut aussi négocier des protections pour lui-même et ses cadres dirigeants.
Les deux parties sont ainsi, de façon symétrique, protégées.