Bail commercial et répétition de charges.

Par Ghislain Darriet, Avocat.

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Explorer : # bail commercial # charges locatives # répétition de l'indu # loi pinel

Ce que vous allez lire ici :

Un bail commercial stipule que le locataire paie des charges, mais ce paiement régulier ne prouve pas un accord sur leur répartition. La Cour de cassation insiste sur la nécessité de clauses claires pour éviter des litiges. Les bailleurs doivent donc rédiger des contrats précis pour minimiser les risques.
Description rédigée par l'IA du Village

Répétition de charges indûment versées avant la loi Pinel : seule le contrat de bail fait la loi des parties.
Retour sur l’arrêt Cour de cassation, 3e civ., 13 février 2025, n° 23-17.978 (n° 88 F-D).

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I. Sur les faits et la procédure.

Dans cette affaire, un local commercial avait été donné à bail, par acte sous seing privé du 26 janvier 2006. Le bail stipulait un loyer mensuel de 488 € net de charges, sans autre précision explicite sur la répartition des charges locatives. Le contrat comprenait également une promesse unilatérale de vente consentie au bénéfice du preneur pour la durée de la location.

Après le décès du bailleur initial, ses héritiers ont perçu loyers et charges. Le preneur a fini par assigner les bailleurs aux fins de réitération de la vente, répétition des charges qu’il estimait indûment payées,et compensation de ces sommes avec le prix de vente.

La Cour d’appel de Basse-Terre a rejeté la demande de remboursement des charges, considérant que le preneur s’était acquitté de ces sommes pendant neuf ans, et qu’il ne pouvait désormais les contester en invoquant une imprécision du bail.

La Cour de cassation casse partiellement l’arrêt, au visa de l’article 1134, alinéa 1ᵉʳ, du Code civil dans sa version antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, selon lequel :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ».

Elle rappelle qu’avant la loi Pinel (n° 2014-626 du 18 juin 2014), les parties à un bail commercial étaient libres de répartir comme elles l’entendaient les charges, impôts et taxes. Toutefois, seules les stipulations expresses du bail peuvent mettre des charges à la charge du preneur.

En l’espèce, la cour d’appel aurait dû rechercher à quoi correspondaient exactement les sommes versées et si elles résultaient d’une stipulation contractuelle claire. Faute de cette analyse, elle a privé sa décision de base légale.

II. Ce qu’il faut retenir de cet arrêt.

Cet arrêt du 13 février 2025 constitue un rappel ferme de la Cour de cassation, qui en matière de bail commercial, seule la convention peut fonder l’obligation du preneur de régler des charges.

Ainsi, le paiement régulier de charges par le locataire, même pendant plusieurs années, n’emporte pas présomption d’accord sur leur imputation.

Le bailleur ne peut se prévaloir d’une exécution tacite ou de la tolérance du preneur, si aucune stipulation expresse et précise ne met ces charges à la charge du locataire.

La cour d’appel ne peut rejeter une demande de restitution sans avoir préalablement vérifié la base contractuelle des paiements litigieux.

Cet arrêt s’inscrit dans la droite ligne des décisions antérieures, mais en soulignant que le contentieux peut naître très tardivement, même après plusieurs années de paiements, ce qui expose les bailleurs à des répétitions de sommes importantes, particulièrement en cas de désaccord à la suite d’un renouvellement de bail, d’une cession de fonds de commerce, ou d’un contentieux parallèle sur les loyers.

Enfin, et surtout, depuis la loi Pinel du 18 juin 2014, l’article L145-40-2 impose que tout contrat de location comporte un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés à ce bail, comportant l’indication de leur répartition entre le bailleur et le locataire.

III. Les bonnes pratiques à recommander aux bailleurs.

Le bail commercial doit stipuler de manière précise et exhaustive la répartition des charges, et conformément à l’article L145-40-2 du Code de commerce, il doit inclure une clause claire et détaillée dans le bail commercial listant exhaustivement les charges, impôts, taxes et redevances refacturées au preneur (ex. taxe foncière, charges de copropriété, ordures ménagères, entretien, etc.).

Le bail commercial doit éviter les formules générales du type « toutes charges afférentes à l’immeuble », qui sont sources de litiges.

Le bail commercial doit prévoir une annexe avec un tableau de répartition des charges ou un modèle de décompte des charges.

Chaque année le bailleur adresse au preneur un récapitulatif des charges refacturées.

Il convient d’être vigilant sur les répartitions des charges des baux avant la loi Pinel du 18 juin 2014, notamment si le bail est tacitement reconduit ou en renégociation.

Quoi qu’il en soit, en cas de contestation, il convient de fournir les pièces justifiant la base contractuelle des charges refacturées.

Le risque contentieux important à anticiper n’est pas anodin, et la répétition de l’indu sur plusieurs années dans la limite de la prescription peut représenter des dizaines de milliers d’euros pour le bailleur, notamment sur les baux anciens, où la répartition des charges était souvent floue.

Cet arrêt doit inciter les bailleurs, et plus généralement les gestionnaires d’actifs commerciaux, à sécuriser juridiquement la rédaction des baux, et anticiper les risques contentieux sur les baux en tacite reconduction.

Ghislain Darriet
Avocat au barreau de Bayonne
Droit civil - Droit commercial
www.darriet-avocat.fr

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