L’annexe 6 de la convention collective spécifique aux cadres prévoit en effet que le salarié malade perçoit pendant les six premiers mois le salaire net qu’il aurait perçu sans interruption d’activité et pendant les six mois suivants le demi-salaire net qu’il aurait dû percevoir sans interruption d’activité.
La question qui se posait était celle du salaire à prendre en compte.
L’employeur soutenait que le salaire garanti ne pouvait comprendre « les indemnités d’astreinte versées chaque mois sous la forme d’une avance » fixée en fonction du nombre moyen d’astreintes censées être effectuées chaque mois, une régularisation intervenant en décembre de chaque année.
La Cour de cassation retient l’astreinte comme un élément de salaire à prendre en compte pour le calcul de la rémunération à maintenir : « Les indemnités d’astreinte entraient dans le calcul du salaire auquel la salariée aurait eu droit si son contrat n’avait pas été suspendu… »
Cette décision est très intéressante en ce qu’elle se prononce sur le régime de l’indemnité d’astreinte. Alors même que l’astreinte ne constitue pas en soit du temps de travail effectif, elle doit donner lieu à une compensation.
La Cour de Cassation intègre l’indemnité d’astreinte au salaire, confirmant sa jurisprudence déjà rendue sur le fondement de la convention collective du 15 mars 1966 puisque le 6 octobre 2017 où elle reconnaissait déjà que : « Les rémunérations versées au salarié à l’occasion des astreintes constituent une partie du salaire normalement perçu par celui-ci. »
La portée de ces décisions dépasse toutefois la seule convention collective du 15 mars 1966 ainsi que la seule question des astreintes.
La haute juridiction a déjà eu l’occasion de rappeler, le 11 mai 2017, s’agissant de la convention collective Syntec, que la rémunération variable issue de l’accomplissement d’astreintes à domicile doit être prise en compte pour déterminer le salaire brut du salarié à maintenir pendant l’arrêt maladie.
Il en irait de même pour les commissions constituant une rémunération variable.
En outre, l’astreinte n’est pas neutre en matière de congés payés. Ainsi, la prime d’astreinte doit également être prise en compte pour le calcul de l’indemnité de congés payés. En effet, et selon la Cour de cassation, l’indemnité d’astreinte est destinée à compenser une « servitude permanente de l’emploi », et doit donc constituer un élément de salaire sorte que le salarié avait droit à l’indemnité compensatrice de congés payés y afférente (Cass, Soc, 2 mars 2016 ; 14-14.919).
En conclusion, même si un salarié ne travaille pas pendant ses périodes d’astreinte, celles-ci génèrent des droits pour lui au-delà de la compensation financière qu’il perçoit à ce titre.
Cependant, les garanties liées aux astreintes ne sont pas illimitées puisqu’en matière de sécurité sociale les tribunaux ont eu à s’interroger sur le statut du salarié victime d’un accident pendant sa période d’astreinte à domicile. Selon la haute cour, lorsque l’accident survient au cours d’une période d’astreinte, la présomption d’imputabilité d’accident du travail n’est pas applicable (Cass, Soc, 2 avril 2003 ; n° 01-20. 765).
Il est à craindre que l’astreinte suscitera encore de nombreuses questions ; l’ordonnance Macron du 22 septembre 2017 illustre la situation puisqu’elle a institué une présomption d’accident du travail en cas d’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle (article L.1222-9 du code du travail). Sans doute sera-t-il difficile à l’avenir de distinguer entre les périodes de travail effectif à domicile (télétravail) et celles qui ne le sont pas (astreinte).
L’employeur devra être très vigilant dans le suivi de l’organisation du temps de travail de ses salariés, surtout lorsqu’ils sont au forfait sans horaire précis !