La lutte contre le faux monnayage dans l’Union.

Par Thibaut Philippon.

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Explorer : # faux monnayage # union européenne # politique monétaire # criminalité transfrontalière

L’espace de Liberté, de sécurité et de Justice a connu de profondes transformations avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne le premier décembre 2009. En effet, avec le Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne , les politiques qui étaient initialement regroupées dans le traité de Maastricht de 1992 sous le titre "Justice et affaires intérieures" au sein de l’ancien troisième pilier selon un système majoritairement intergouvernemental, sont désormais intégrées dans l’ESLJ.
La suppression de la structure par piliers de l’Union européenne a eu pour conséquence une communautarisation de l’ESLJ. En effet, l’adoption des textes législatifs nécessaire à l’élaboration de l’ESLJ se fait désormais, en principe, selon la procédure législative ordinaire décrite à l’article 293 TFUE.

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Par ailleurs, au terme de l’article 4-2-j) du TFUE, l’Union dispose d’une compétence partagée avec les Etats membres dans le domaine de l’espace de liberté, de sécurité et de justice. Dès lors, l’Union et les Etats membres sont tous deux compétents pour légiférer dans ce domaine. Cependant, en application du principe de subsidiarité, les Etats membres n’exercent leur compétence que dans la mesure où l’Union n’aurait pas exercé la sienne.

Les politiques couvertes par l’ESLJ sont larges dans la mesure où l’article 3§2 TUE dispose que « l’Union offre à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, au sein duquel est assurée la libre circulation des personnes, en liaison avec des mesures appropriées en matière de contrôle des frontières extérieures, d’asile, d ’immigration ainsi que de prévention de la criminalité et de lutte contre ce phénomène » tandis que l’article 67 TFUE dispose que l’ESLJ « assure l’absence de contrôles des personnes aux frontières intérieures et développe une politique commune en matière d’asile, d’immigration et de contrôle des frontières extérieures » et « œuvre pour assurer un niveau élevé de sécurité par des mesures de prévention de la criminalité, du racisme et de la xénophobie, ainsi que de lutte contre ceux-ci, par des mesures de coordination et de coopération entre autorités policières et judiciaires en matière pénale et, si nécessaire, par le rapprochement des législations pénales ». Ainsi, par l’intermédiaire de cet article, même si a priori, les Etats conservent une compétence exclusive en matière pénale, l’Union européenne peut prendre un certain nombre d’actes juridiques ayant des effets importants sur la politique pénale des Etats membres. Cet état de fait est particulièrement évident à la lecture de l’article 83 du TFUE puisqu’il autorise le Parlement européen et le Conseil à établir par voie de directives conformément à la procédure législative ordinaire « des règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans des domaines de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontalière résultant du caractère ou des incidences de ces infractions ou d’un besoin particulier de les combattre sur des bases communes.

Ces domaines de criminalité sont les suivants : « le terrorisme, la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic illicite de drogues, le trafic illicite d’armes, le blanchiment d’argent, la corruption, la contrefaçon de moyens de paiement, la criminalité informatique et la criminalité organisée  ».

De plus l’« Union européenne dispose d’une compétence exclusive dans le domaine de la politique monétaire pour les États membres dont la monnaie est l’euro . » En effet dans son article 133 le TFUE prévoit que «  le Parlement européen et le Conseil établissent les mesures nécessaires à l’usage de l’euro en tant que monnaie unique ». Parmi ces mesures figure aussi la protection de l’euro contre le faux monnayage. Sur la base de cet article, la protection de l’euro en tant que monnaie unique est une compétence exclusive de l’UE.

Parallèlement, les autorités nationales émettent des billets et des pièces en euros, conformément à l’article 128 du TFUE. Les États membres ont adopté une législation nationale et mis en place des règles internes visant à protéger l’euro. Dans la mise en œuvre de cette politique monétaire, l’Union européenne influe également, bien que beaucoup plus indirectement, sur le droit pénal des Etats membres.

C’est donc sur la base des articles 83 et 133 du TFUE que la lutte contre le faux monnayage s’organise.

Cette lutte constitue un enjeu important au sein de l’Union européenne, et cela particulièrement depuis l’adhésion de 17 de ses membres à une monnaie unique : l’euro. En effet, avec la décision de créer une monnaie unique entérinée par le Traité de Maastricht, et le passage progressif à l’euro entre le 1er janvier 1999 et le 1er juillet 2002, la lutte contre le faux monnayage prend une toute nouvelle ampleur, et intéresse directement l’Union européenne dans son ensemble. Dès lors, l’article 83 du TFUE précité prend tout son sens puisqu’il permet aux législateurs de l’Union de définir des « règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions » dans le domaine de la contrefaçon. A défaut de réelle harmonisation, l’Union européenne a donc toutefois compétence pour coordonner les législations des autorités nationales afin d’éviter les risques de contrefaçon de la monnaie unique. En parallèle à l’action de l’Union, les autorités nationales des Etats membres tel que l’Office Central de la Répression du Faux Monnayage français jouent bien entendu également un rôle fondamental.

Pourtant malgré toutes ces mesures, malgré l’attribution de la lutte contre le faux monnayage à des entités hautement spécialisées disposant de ressources conséquentes, malgré le durcissement et la multiplication de la législation à l’échelon communautaire (I), la contrefaçon des moyens de paiement reste encore aujourd’hui une réalité qui pourrait peser de manière significative sur les intérêts financiers de l’Union et de ses Etats membres, d’où la continuelle nécessité d’envisager de nouvelles mesures. (II)

(...)

Document complet au format PDF.

Thibaut PHILIPPON, Avocat.
https://www.philipponavocat.com

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