Le numérique pour une justice plus lisible, plus accessible et plus efficace.

Le numérique pour une justice plus lisible, plus accessible et plus efficace.

Revue iimpact éco éditée par le Syndicat National des Ingénieurs de l’Industrie et des Mines (SNIIM).

La réforme globale de la justice intègre de manière transverse sa transformation numérique. Cette transformation revêt des enjeux tant organisationnels, qu’économiques mais aussi éthiques. Alors que le programme Datajust fait parler régulièrement de lui ces derniers temps, et au moment où le numérique se trouve au centre de tous les usages de la Justice du fait de la crise sanitaire, quels sont les enjeux et les objectifs que souhaite atteindre le ministère de la Justice grâce à la numérisation des institutions ?
Véronique Malbec, nommée en 2018, Secrétaire générale du Ministère de la Justice, nous les expose.
Article paru dans la revue iimpact éco de décembre 2019.

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Pouvez-vous nous présenter le programme de transformation numérique du ministère de la Justice ? Quel est son périmètre, ses enjeux ?

"La transformation numérique du ministère de la Justice s’inscrit dans la réforme globale de la justice. Cette réforme a pour objectif une justice plus lisible, plus accessible et plus efficace. Ainsi, en mars 2019, la loi de programmation avait pour principaux enseignements la simplification de la justice au service des justiciables, le renforcement de l’efficacité de l’organisation et l’adaptation du fonctionnement des juridictions, l’efficacité et le sens de la peine, la diversification du mode de prise en charge des mineurs délinquants, et enfin de manière transverse, la transformation numérique.

"L’enjeu majeur de la transformation du numérique est organisationnel."

Le numérique joue un rôle essentiel sur l’ensemble du ministère. Le périmètre de la transformation numérique de la justice est donc extrêmement large. Les enjeux sont à la fois législatifs et réglementaires. L’enjeu majeur est organisationnel. En effet, la transformation numérique a des impacts sur l’organisation des juridictions et implique une adaptation des infrastructures du ministère pour laquelle ont été alloués 530 millions d’euros et 260 emplois supplémentaires.

L’amélioration des infrastructures comprend à la fois une amélioration des débits réseaux, une amélioration du matériel informatique des agents, une amélioration en qualité et en quantité du parc des visio-conférences notamment entre les juridictions et les établissements pénitentiaires pour éviter quand cela est possible l’extraction du détenu. Mais cela nécessite aussi que les juridictions et l’administration pénitentiaire s’organisent pour la bonne tenue de ces visio-conférences.

Les enjeux économiques et budgétaires sont forts étant donné l’investissement important alloué à la transformation numérique de ce ministère qui part de loin par rapport à d’autres. Mais des économies sont espérées sur le long terme. Par exemple, il est aujourd’hui possible d’obtenir son bulletin numéro 3 du casier judiciaire en ligne très rapidement. Non seulement c’est une amélioration notable pour le citoyen mais en plus, le renvoi électronique du B3 néant a permis une économie de 1 M€ rien qu’en frais postaux en 2019."

Comment cette transformation se met-elle concrètement en œuvre ?

"En premier lieu, les effets organisationnels de la transformation numérique doivent être anticipés par la formation et l’information. Le secrétariat général du ministère de la Justice est pour cela en contact avec les 4 écoles dont le ministère assure la tutelle pour que la formation numérique soit anticipée dans le cadre de la formation initiale et du travail continue.

Les organisations du travail actuelles évoluent avec l’arrivée de nouveaux systèmes d’information. Le numérique influe sur l’organisation du travail. Par exemple, avec une procédure nativement numérique, le travail d’enregistrement n’est plus à faire mais il sera nécessaire d’effectuer un travail plus technique d’analyse de la procédure par les greffiers.

Le passage au nativement numérique doit initier un travail avec les avocats et les autres acteurs de la procédure pénale et civile. Là aussi, les organisations évoluent et en parallèle il faut pouvoir aussi permettre de suivre les besoins de transmission de données. Les besoins sont croissants, là où par exemple nous transmettions des pièces de 4 Mo, il nous est demandé de passer à 10 Mo. C’est un changement d’échelle à endosser par nos infra- structures techniques sur l’ensemble du territoire, car avec ses 85.000 personnels, le ministère est présent sur 1600 sites. Il communique quotidiennement avec 67.000 avocats pour ne citer que cette profession du droit."

"L’accompagnement au changement est un enjeu humain essentiel et touchera l’entièreté du ministère sur l’ensemble du territoire. "

Quel sera l’accompagnement des agents ?

"L’accompagnement au changement est un enjeu humain essentiel et touchera l’entièreté du ministère sur l’ensemble du territoire. La formation continue est organisée via un réseau d’acteurs en région pour que les agents, où qu’ils soient, n’en soient pas exclus. Par ailleurs, un passeport numérique va être mis en place. Il permettra d’évaluer le niveau de départ de chaque agent et de trouver la formation la plus adaptée, afin que chacun puisse être accompagné.

À noter que pour la première fois, en juin 2019, un vaste sondage a été réalisé sur tout le panel du numérique auprès des agents du ministère. Il sera reconduit tous les 6 mois pour objectiver les éléments positifs et négatifs et ainsi nous permettre des améliorations en fonctions des retours."

Et comment cette transformation va-t-elle impacter les citoyens ?

"C’est un enjeu éthique car une part de la population reste sans accès au numérique. C’est pourquoi, la ministre a toujours indiqué que le numérique ne serait pas obligatoire et que le recours à la justice serait toujours possible sous format papier. Par ailleurs, grâce au réseau très vaste des maisons de justice et du droit mais aussi de nos points d’accès au droit qui existent déjà et de la coordination qui va se faire pour pouvoir inscrire le ministère de la justice dans la dynamique « France Service », un soutien dans l’accès au droit sera proposé au justiciable."

Quelles sont les clés de réussite de la transformation ?

"La qualité de la gouvernance en est une. Quatre fois par an, un conseil stratégique à la transformation numérique, présidé par la ministre, se réunit pour dresser un état d’avancement des projets majeurs et lui permettre, si nécessaire, de rendre ses arbitrages.

"L’attractivité du ministère de la justice sur un marché très contraint est une des clés de la réussite."

L’attractivité du ministère de la justice sur un marché très contraint est une autre clé de réussite. Cette attractivité doit être renforcée et la VendômeTech, dont la 3ème édition a eu lieu en janvier 2020, a pour objectif de faire connaître le ministère auprès des acteurs du numérique."

Pour terminer, pouvez-vous nous donner quelques exemples phares de projets numériques en cours au ministère de la Justice ?

"Un projet numérique structurant concerne l’efficacité des peines. C’est « la plateforme du travail d’intérêt général (TIG) » qui sera mise à disposition de l’ensemble des acteurs de la justice, à la fois les magistrats, du siège et du parquet, mais aussi des avocats et les personnes suivant un TIG. Par cette plateforme, le magistrat sera aidé dans la décision qu’il doit prendre notamment avec une meilleure visibilité de l’offre de TIG possible.
Autre exemple, le projet DATAJUST, développé avec la direction des affaires civiles et du Sceau, mobilise l’intelligence artificielle pour aider le magistrat civil dans l’évaluation de l’indemnisation du préjudice corporel.

Enfin, le projet « Numérique en détention » est un portail permettant de faciliter le travail des surveillants (ex : libérer du temps pour favoriser le relationnel plutôt qu’à l’application de tâches administratives), des détenus (ex : demande pour cantiner) et de leurs familles (ex : réservation de parloir). "

Revue iimpact éco éditée par le Syndicat National des Ingénieurs de l’Industrie et des Mines (SNIIM).

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