I- Un instrument au service de la politique de santé publique.
L’Etat est responsable de la politique de santé publique. Il est le garant de la santé de sa population et doit, à cet effet, prendre des mesures de santé publique nécessaires pour garantir la sécurité sanitaire de sa population. C’est un principe d’ordre public de droit interne, et une norme impérative de jus cogens de droit international public.
Depuis 2001, la France s’est dotée d’un PNNS qui a pour objectif l’amélioration de la santé de l’ensemble de la population par l’amélioration de la nutrition. Ce programme est inscrit dans le Code de la santé publique [1] comme un programme quinquennal gouvernemental, articulé avec le programme national pour l’alimentation (PNA) [2].
Le premier PNNS trouve son origine à l’article 1er de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, suite à la ratification de la convention-cadre de l’Organisation mondiale de la Santé pour la lutte antitabac, à Genève le 21 mai 2003.
Pour éviter les inégalités sociales, le PNNS doit continuellement s’adapter aux comportements sociaux par le biais notamment des mesures incitatives, et non coercitives, à une consommation saine et responsable.
Pour comprendre l’articulation du PNNS, il convient d’appréhender les objectifs assignés à ce programme ainsi que ses limites matérielles, eu égard à la politique de santé publique définies par les autorités publiques.
Ainsi, en matière de consommation des boissons sucrées, l’articulation du PNNS concerne la lutte contre les affectations de longue durée liées à la consommation des boissons sucrées et la prise en charge des assurés atteints d’affection de longue durée liée à la consommation des boissons sucrées.
II- Un instrument de lutte contre les affections de longue durée (ALD).
L’article L322-3 du Code de la Sécurité sociale considère que les affections de longue durée visent des maladies dont la gravité et/ou le caractère chronique nécessite des soins prolongés et des traitements particulièrement coûteux ouvrant droit à une prise en charge à 100% par l’assurance maladie des soins liés à cette pathologie.
Trois catégories d’affections sont concernées :
- L’une des trente affections inscrites sur la liste prévue à l’article D322-1 du Code de la Sécurité sociale, dont les accidents vasculaires cérébraux invalidants, certaines insuffisances cardiaques, le diabète, le VIH, les affections psychiatriques de longue durée, l’hypertension sévère, la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, la mucoviscidose, la polyarthrite rhumatoïde, ou encore les tumeurs malignes ;
- Les affections non inscrites sur la liste citée précédemment mais constituant une forme évolutive ou invalidante d’une affection grave, nécessitant des soins prolongés ;
- Les polypathologies ou affections multiples.
Le programme national nutrition santé (PNNS) constitue la base de la politique nutritionnelle en France. Il relève des moyens d’action de la politique de santé dans l’élaboration de la taxe soda. Cette politique est définie par des objectifs précis tenant à la conception des plans, des actions et des programmes de santé.
En matière de lutte contre les affections de longue durée liées à la consommation des boissons sucrées, l’articulation du PNNS est particulière, en ce que ses objectifs ont évolué au fil des années.
Dans sa formulation traditionnelle, le PNNS, bien que précisant la ligne directrice de la France en matière nutritionnelle, restait malgré tout un simple outil de pédagogie.
Son caractère trop théorique et non-contraignant lui ôtait toute efficacité. Il manquait en outre des éléments pour assurer son applicabilité en matière de consommation des boissons sucrées.
Pour renforcer ces objectifs, le Parlement a institué en 2010, un programme gouvernemental quinquennal relatif à la nutrition et à la santé affirmé à l’article L3231-1 du Code de la santé publique, ainsi qu’un programme gouvernemental pour l’alimentation fixé à l’article L230-1 du Code rural.
Aux termes de l’article L3231-1 modifié par la loi n°2018-938 du 30 octobre 2018 - art. 65, un programme national relatif à la nutrition et à la santé est élaboré tous les cinq ans par le Gouvernement. Ce programme définit les objectifs de la politique nutritionnelle du Gouvernement et prévoit les actions à mettre en œuvre afin de favoriser :
- l’éducation, l’information et l’orientation de la population, notamment par le biais de recommandations en matière nutritionnelle, y compris portant sur l’activité physique ;
- la création d’un environnement favorable au respect des recommandations nutritionnelles ;
- la prévention, le dépistage et la prise en charge des troubles nutritionnels dans le système de santé ;
- la mise en place d’un système de surveillance de l’état nutritionnel de la population et de ses déterminants ;
- le développement de la formation et de la recherche en nutrition humaine ;
- la lutte contre la précarité alimentaire.
En 2016 le législateur va approfondir ces objectifs. L’article 2 de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004, codifié à l’article L1411-1 du Code de la santé publique et modifié par la loi n°2016-41 du 26 janvier 2016 portant modernisation du système de santé, va préciser de façon détaillée les axes sur lesquelles reposent la politique de santé publique des autorités publiques françaises en mettant un accent particulier sur la prévention et la promotion.
L’analyse de l’article L1411 montre cependant que la version de 2004 était plus ambitieuse que celle de 2016, car elle prévoyait une rubrique consacrée à « l’identification et la réduction des risques éventuels pour la santé » liés à divers facteurs (environnement, alimentation ou consommation de produits ou services susceptibles de l’altérer, conditions de travail et de transport). Alors qu’en 2016, le législateur fait disparaitre les termes « réduction des risques éventuels » en les remplaçant substantiellement par les termes « surveillances et observations ».
Toutefois, le PNNS du 20 septembre 2019 va rajouter de nouveaux principes de santé sur 4 axes, en prenant en compte explicitement les affections de longue durée :
- Améliorer pour tous l’environnement alimentaire et physique pour le rendre plus favorable à la santé ;
- Encourager les comportements favorables à la santé ;
Mieux prendre en charge les personnes en surpoids, dénutries ou atteintes de maladies chroniques ; - Développer la recherche, l’expertise et la surveillance en appui de la politique nutritionnelle.
Il en résulte de ce nouveau dispositif, une recommandation sur la qualité nutritionnelle des aliments, consacrée par le terme nutri-score. Le nutri-score est un logo affiché sur un produit par une lettre alphabétique (A, B, C, D, E) de nature à indiquer son apport nutritionnel chez l’homme. Toutefois, l’absence de tout caractère contraignant du nutri-score sur les produits alimentaires, et donc sur les boissons sucrées, limite, une fois de plus, l’action des pouvoirs publics en faveur de la lutte contre la consommation des boissons sucrées et la promotion d’une alimentation saine.
Dans la mesure où la consommation des boissons sucrées n’est pas étranger aux affections de longue durée (ALD), prises en charge dans leur globalité par la Sécurité sociale, la mise en place de PNNS relève d’une mesure de santé publique nécessaire, dont l’efficacité pourrait reposer sur d’autres mesures d’application pratique, à l’instar de la taxe sur les boissons contenant du sucre ajouté communément appelée, taxe soda.
Nonobstant cette insuffisance, le PNNS constitue une mesure de santé publique efficace qui répond aux orientations nutritionnelles des autorités publiques françaises.