Au sommaire de cet article...
- Comment saisir la juridiction administrative ?
- a) Quelle juridiction saisir ?
- b) De l’introduction de la requête par voie électronique.
- c) Présentation de la requête et des pièces jointes.
- d) De l’introduction de la requête sous format papier.
- e) De la prise en charge des frais exposés.
- f) De l’exécution de la décision rendue.
- Dans quels cas puis-je saisir la juridiction administrative sans avocat ?
- a) Au fond.
- b) En référé.
Comment saisir la juridiction administrative ?
a) Quelle juridiction saisir ?
Le tribunal administratif est la juridiction administrative "générale", statuant en première instance, par opposition aux juridictions administratives dites "spécialisées" [1], ou "JAS", ayant compétence exclusive dans certains domaines légalement définis, telles la Cour des comptes, la Cour nationale du droit d’asile, la Commission du contentieux du stationnement payant, ou certaines entités lorsqu’elles statuent en matière disciplinaire, telles le Conseil supérieur de la magistrature, ou encore le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche... et qui ne seront pas abordées dans le présent article.
Les règles de compétence territoriale des tribunaux administratifs sont régies par les articles R.312-1 et suivants du Code de justice administrative : en principe, le tribunal compétent est celui du siège de l’administration ayant rendu l’acte litigieux [2].
Si toutefois le justiciable devait saisir le mauvais tribunal - voire, s’il devait saisir un tribunal en lieu et place d’une autre juridiction administrative, telle le Conseil d’État [3] - la juridiction saisie à tort se chargerait elle-même de transmettre la procédure à son homologue compétent [4].
Aussi, dans cette hypothèse, les délais de prescription ou de forclusion sont interrompus dès réception par le greffe de la juridiction administrative incompétemment saisie [5].
Lorsque seule une partie des conclusions s’avère mal dirigée, la juridiction saisie statuera sur celles relevant de sa compétence, et transmettra le dossier à celle compétente pour connaître des autres chefs de conclusions [6].
Il n’y a donc qu’en cas de saisine d’une juridiction administrative (générale) en lieu et place d’une juridiction judiciaire, répressive ou étrangère, ou encore en lieu et place d’une JAS, que le requérant sera débouté pour irrecevabilité et invité à mieux se pourvoir.
Attention : dans le sens inverse, si, en l’absence de notification des délais et voies de recours, le requérant a saisi, à tort, une juridiction de l’ordre judiciaire, il dispose d’un délai de deux mois pour saisir le juge administratif, à compter de la date à laquelle la décision d’incompétence du juge judiciaire est devenue définitive, et sous réserve que la mauvaise juridiction ait été saisie dans un "délai raisonnable" d’un an à compter de la publication ou de la notification l’acte attaqué [7].
b) De l’introduction de la requête par voie électronique.
La juridiction administrative est, sans conteste, la plus facile à saisir en termes de diligences.
Contrairement à la juridiction de l’ordre judiciaire, dont la saisine s’effectue « par assignation ou par requête » [8], l’article R.411-1 du Code de justice administrative dispose :
« La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l’exposé des faits et moyens, ainsi que l’énoncé des conclusions soumises au juge.
L’auteur d’une requête ne contenant l’exposé d’aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d’un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu’à l’expiration du délai de recours. »
Mieux encore, l’article R.414-2 du même code dispose :
« Les personnes physiques et morales de droit privé non représentées par un avocat, autres que celles chargées de la gestion permanente d’un service public, peuvent adresser leur requête à la juridiction par voie électronique au moyen d’un téléservice accessible par le réseau internet.
Ces personnes ne peuvent régulièrement saisir la juridiction par voie électronique que par l’usage de ce téléservice.
Les mémoires et pièces ultérieurement produits doivent être adressés à la juridiction au moyen de ce même téléservice, sous peine d’être écartés des débats à défaut de régularisation dans un délai imparti par la juridiction.
Lorsqu’une requête est introduite par un mandataire n’ayant pas la qualité d’avocat ou d’avocat au Conseil d’État et à la cour de Cassation, le mandant doit être préalablement inscrit dans le téléservice selon les modalités d’inscription fixées par l’arrêté prévu à l’article R. 414-3. »
En clair, non seulement le justiciable n’a jamais de frais d’huissier à supporter en l’absence de saisine par assignation, mais l’introduction de l’instance par requête peut encore se faire, très simplement, « par voie électronique au moyen d’un téléservice » ; ce dernier se nomme « Télérecours » et est accessible sur ce lien.
Le justiciable, autre qu’une administration, et non représenté par un avocat, doit s’inscrire sur ce site dans la partie « Télérecours citoyens » (https://citoyens.telerecours.fr/#/a...).
Partant, la requête, accompagnée des pièces à l’appui, pourra être déposée depuis n’importe quel endroit disposant d’un accès à internet, n’importe quel jour et à n’importe quelle heure, sans avoir à se déplacer où que ce soit, ni à se soucier des horaires d’ouverture du greffe et encore moins des aléas des services postaux.
De même, le requérant n’a pas à se préoccuper de transmettre quoi que ce soit au défendeur : bien au contraire, la procédure administrative est dite « inquisitoire », ce qui signifie que les échanges entre les parties ne se font que par l’intermédiaire du juge, et à la diligence de ce dernier, qui peut d’ailleurs refuser de communiquer les productions dénuées d’éléments nouveaux [9].
Autrement dit, en droit administratif, les parties n’ont jamais à communiquer directement entre elles, mais seulement par le truchement de la juridiction.
c) Présentation de la requête et des pièces jointes.
Le requérant veillera à transmettre chaque pièce dans un fichier distinct, intitulé par un « libellé suffisamment explicite » [10], commençant par le numéro d’ordre affecté à la pièce qu’il contient par l’inventaire détaillé ; cet inventaire est généré automatiquement par l’application [11].
Parmi ces pièces doit nécessairement figurer l’acte attaqué (à insérer dans l’emplacement dédié sur le formulaire) ; si toutefois, ce dernier n’est pas matérialisé par un écrit (par exemple s’il s’agit d’un rejet implicite d’une demande préalable, ainsi qu’il est dit à l’article R.421-2 du Code de justice administrative ; ou encore s’il s’agit d’une "décision révélée"), le requérant pourra simplement insérer un fichier contenant la description de cet acte [12], étant précisé que, dans cette hypothèse, la demande préalable à l’administration doit impérativement être produite, ainsi que la pièce justifiant de la date de son dépôt (d’où l’intérêt d’adresser cette demande soit par courrier recommandé avec accusé de réception, soit en mains propres contre récépissé) [13].
Sur la page de présentation de la requête (i.e. la première page), indiquer les noms et adresses des requérant(s) et défendeur(s) ainsi que l’acte attaqué ; s’il s’agit d’un référé, la mention "référé" doit impérativement apparaître en intitulé [14].
La requête est rédigée, de manière très classique, en trois parties : faits et procédure [15], discussion [16], dispositif [17].
Idéalement, chaque affirmation d’ordre factuel, dans l’exposé des faits, de la procédure et de la discussion, doit être reliée à une pièce produite afin d’en justifier le bien-fondé (indiquer « Pièce n° ... » après chaque affirmation ; l’on peut aussi indiquer l’intitulé complet de la pièce afin de faciliter la lecture et la compréhension de l’énoncé).
Lorsque ce n’est pas le cas, s’assurer de ce que le juge peut légitimement présumer le bien-fondé de l’affirmation ; ou, dans certains cas, inviter l’adversaire à produire la pièce que lui seul possède, charge au juge de tirer toutes conséquences d’un éventuel refus, avec cette précision que « si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n’a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant » (article R.612-6 du Code de justice administrative) [18].
S’agissant des affirmations d’ordre juridique, il est souhaitable d’indiquer leur fondement (texte de loi, jurisprudence ...) lorsqu’elles paraissent risquer de susciter contestation.
Quant aux mémoires additionnels [19], il n’est pas nécessaire d’y rappeler le dispositif (si ce n’est pour le modifier) ni de reprendre les précédents développements ; le mémoire pourra simplement se conclure par : « Par ces motifs, l’exposant persiste en ses précédentes conclusions. »
Par ailleurs, l’usage du service Télérecours valant signature de l’acte par son auteur [20], il n’est nul besoin d’y apposer une signature manuscrite numérisée ; cela vaut aussi bien pour les parties non assistées d’un avocat [21] que les avocats eux-mêmes [22].
Lorsqu’une même requête est présentée par plusieurs personnes (physiques ou morales), un mandataire ou un représentant unique est désigné ainsi qu’il est dit aux articles R.411-5 et R.411-6 du Code de justice administrative.
Notons également que « si les caractéristiques de certains mémoires ou pièces font obstacle à leur communication par voie électronique, ils sont transmis à la juridiction sur support matériel, accompagnés de copies en nombre égal à celui des autres parties augmenté de deux. Leur production doit être annoncée par le requérant dans la rubrique correspondante de l’application ou du téléservice » [23].
d) De l’introduction de la requête sous format papier.
Si le justiciable se trouve très peu familier avec l’outil informatique, il a aussi la faculté d’introduire son recours, physiquement, au format papier [24].
Dans ce cas, la requête, les pièces jointes et chaque mémoire doivent être livrés en deux exemplaires, et non sans un inventaire détaillé et numéroté de chaque pièce, dans un ordre continu et croissant, lui aussi en deux exemplaires. La requête et l’inventaire, ainsi que chaque mémoire additionnel, comportent la signature manuscrite du (des) requérant(s) [25].
Sauf disposition contraire, ces éléments peuvent être déposés en mains propres ou adressés par voie postale [26].
Attention : lorsqu’une requête en référé est adressée par voie postale, elle doit l’être par courrier recommandé [27].
e) De la prise en charge des frais exposés.
Si le justiciable a fait appel aux services payants d’un juriste ou autre professionnel du droit pour rédiger son recours ou obtenir des conseils, il peut solliciter remboursement par son adversaire des frais exposés sur le fondement de l’article L.761-1 du Code de justice administrative qui dispose :
« Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent et le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »
Comme on peut le voir, la somme éventuellement allouée au titre de cet article :
- comprend les "frais exposés", sans se limiter aux honoraires d’un avocat (l’on peut donc aussi y inclure, le cas échéant, des frais postaux, de déplacement, ou encore de conseils juridiques) ;
- est mise à la charge de la partie « tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante » ; autrement dit, le requérant peut lui-même être condamné à supporter les frais exposés par l’administration défenderesse s’il est débouté ;
- est laissée à la libre appréciation de la juridiction, qui n’est pas liée par les justificatifs produits et qui statue "en équité" [28] ;
- pour autant, les parties sont invitées à produire les justificatifs de leurs prétentions.
S’agissant des dépens, ils comprennent « les frais d’expertise, d’enquête et de toute autre mesure d’instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l’État » (article R.761-1 du Code de justice administrative ; voir également les articles suivants).
Ces frais sont avancés par l’État lorsque celui qui doit en principe les supporter bénéficie de l’aide juridictionnelle, ainsi qu’il est dit à l’article 116 du décret du 28 décembre 2020 n° 2020-1717.
Encore, lorsque le justiciable a mandaté un avocat au titre de cette aide [29], l’avocat peut lui-même solliciter la condamnation de la partie adverse à lui verser une somme au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, en lieu et place de la somme payée par l’État (la rémunération de l’avocat par l’État au titre de l’aide juridictionnelle étant réputée très frugale).
Et, lorsque le justiciable a, tout à la fois, mandaté un avocat au titre de l’aide juridictionnelle, et exposé lui-même des frais non compris dans les dépens, il peut formuler deux demandes distinctes.
Dans ce cas, la juridiction « doit statuer distinctement sur les demandes présentées respectivement sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au vu de leurs motivations et des justificatifs fournis. » [30].
De même, le justiciable prendra soin de demander la condamnation de son adversaire aux dépens de l’instance par une autre demande encore distincte.
f) De l’exécution de la décision rendue.
Le tribunal ayant rendu son jugement - ayant fait droit, on l’espère, aux demandes du requérant ! - il ne reste plus qu’à voir exécuter cette décision.
L’administration est censée y procéder spontanément, sans que l’appel n’ait en principe d’effet suspensif [31], ni plus que le pourvoi en cassation en l’absence de sursis à exécution [32].
Si tel n’est pas le cas, le créancier peut saisir le tribunal d’une demande tendant à ce qu’il prescrive les mesures nécessaires pour y parvenir, à l’issue d’un délai de trois mois à compter de la notification du jugement [33].
Si le jugement est frappé d’appel en tout ou partie, cette demande est à adresser à la cour administrative d’appel [34] ; dans tous les cas, le ministère d’un avocat n’est pas nécessaire [35], et la demande peut être adressée par Télérecours [36].
Une astreinte peut aussi être demandée [37], si elle n’a pas déjà été demandée durant la procédure contentieuse [38] : elle consiste en une somme d’argent dont est redevable le condamné pour chaque jour de retard dans son exécution, indépendamment des intérêts moratoires.
Pour plus de détails, se rapporter aux articles L.911-1 et suivants et R.911-1 et suivants du Code de justice administrative.
Dans quels cas puis-je saisir la juridiction administrative sans avocat ?
Le tribunal administratif peut être saisi sans avocat dès lors qu’aucun texte ne prévoit l’obligation de ce ministère, aussi bien au fond qu’en référé.
Aux termes de l’article R.431-2 du Code de justice administrative :
« Les requêtes et les mémoires doivent, à peine d’irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d’une somme d’argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d’un litige né de l’exécution d’un contrat.
La signature des requêtes et mémoires par l’un de ces mandataires vaut constitution et élection de domicile chez lui. »
Grossièrement reformulé, le tribunal administratif peut être saisi sans avocat à chaque fois qu’il est question d’autre chose que d’argent ou de contrat avec l’administration, encore qu’il existe un certain nombre d’exceptions énumérées à l’article R.431-3 du Code de justice administrative [39].
Il existe, au fond, quatre types de recours contentieux par devant le tribunal administratif [40], parmi lesquels le recours de plein contentieux, ou "RPC", également appelé "recours de pleine juridiction", et le recours en excès de pouvoir, ou "REP", qui sont les deux plus courants [41]. Alors que le REP tend uniquement à voir annuler un acte de l’administration, le RPC tend, quant à lui, à voir substituer la décision du juge à celle de l’administration, ce qui peut prendre la forme d’injonctions ou de condamnations pécuniaires.
La différence n’intéresse toutefois pas tant le justiciable que la doctrine, dès lors que le juge n’est en rien lié par l’intitulé de la requête, la seule distinction ayant de l’importance étant celle entre fond et référé [42].
Il existe, en référé, pas moins de treize types recours possibles [43], conditionnés ou non par l’urgence, nécessitant ou non un recours au fond en parallèle, mais ayant pour dénominateur commun l’article L.511-1 du Code de justice administrative qui dispose :
« Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. »
En outre, lorsque le juge statue en urgence, et contrairement aux recours au fond, l’instruction en référé se clôture en principe « à l’issue de l’audience » [44], ce qui signifie que la procédure en référé est orale (bien que cela ne dispense pas d’une requête écrite qui « doit contenir l’exposé au moins sommaire des faits et moyens et justifier de l’urgence de l’affaire », selon l’article R.522-1 du Code de justice administrative) [45], et sous réserve de ce que le recours ne soit pas manifestement infondé, auquel cas il pourra faire l’objet d’une ordonnance de rejet d’office, sans instruction et sans audience, également appelée "ordonnance de tri" [46].
Mais, comme on le verra, le caractère "provisoire" des mesures prises par le juge des référés peut parfois revêtir, de facto, un caractère définitif, dispensant le justiciable d’agir au fond.
Les référés sur lesquels nous nous attarderons sont le référé-liberté, le référé-suspension et le référé-provision.
a) Au fond.
Des recours administratifs préalables à l’action contentieuse au fond.
Comme énoncé supra, le ministère d’un avocat est obligatoire lorsque le tribunal est saisi aux fins de voir condamner l’administration au versement d’une somme d’argent.
C’est tout particulièrement vrai lorsqu’il s’agit d’engager la responsabilité de l’administration pour faute, ou parfois sans faute [47] : le justiciable est victime d’un fait dommageable imputable à l’administration, et il entend voir condamner celle-ci à l’indemniser des préjudices qui en découlent.
Dans ce cas, il lui appartient d’adresser à l’administration une demande préalable tendant l’indemnisation des préjudices allégués, de manière amiable, en amont de toute saisine du tribunal.
En effet, selon l’article R.421-1 du Code de justice administrative :
« La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée.
Lorsque la requête tend au paiement d’une somme d’argent, elle n’est recevable qu’après l’intervention de la décision prise par l’administration sur une demande préalablement formée devant elle.
Le délai prévu au premier alinéa n’est pas applicable à la contestation des mesures prises pour l’exécution d’un contrat. »
Autrement dit, le procès intenté par devant le tribunal administratif ne saurait être dirigé à l’encontre de l’administration elle-même, ni même d’un simple fait qui lui serait imputable ; du moins, pas en l’absence d’une décision prise par elle [48].
Aussi, les injonctions pouvant être données à l’administration, ainsi que les condamnations pécuniaires pouvant lui être infligées dans le cadre d’un RPC, ne sauraient se dissocier de l’illégalité d’une décision prise par elle et déférée par devant la juridiction.
Or, lorsqu’une demande est adressée à l’administration, sa réponse, ou son absence de réponse, constitue bien une "décision" susceptible d’être déférée par devant le juge administratif.
En effet, l’administration dispose d’un délai de deux mois pour donner suite au requérant : passé ce délai, son silence vaut décision "implicite" de rejet [49], et cette décision "implicite" peut effectivement être attaquée devant le tribunal administratif dans un nouveau délai de deux mois, délai de recours contentieux [50].
Aussi, afin de justifier du respect des délais, le requérant doit impérativement adresser sa demande préalable par courrier recommandé avec accusé de réception, remise en mains propres contre récépissé, ou autre moyen conférant date certaine de réception, et en produire justificatifs à l’appui de son recours devant le tribunal [51].
Le délai de recours contentieux peut être prorogé par un recours gracieux et/ou hiérarchique [52] et par une demande d’aide juridictionnelle [53].
Attention : l’introduction d’un référé, en revanche, ne proroge pas ce délai (CE 27 septembre 1989 n° 81628 et 84130 « Guerreiro »).
En résumé, lorsque survient un fait dommageable imputable à l’administration, il est nécessaire d’adresser d’abord une demande amiable et ensuite de saisir le tribunal administratif à l’encontre de la décision, implicite ou explicite, qui s’ensuit.
La demande préalable vise à "provoquer" la décision de l’administration, dans la perspective d’une saisine du tribunal compétent : on parle de « liaison du contentieux ».
Enfin, il doit être précisé que la demande préalable :
- peut être adressée à l’administration par le requérant lui-même (le ministère d’un avocat étant facultatif à ce stade), qui peut alors la rédiger lui-même ou la faire rédiger par un juriste ou un tiers de son choix ;
- doit être adressée par courrier recommandé avec accusé de réception (ou autre moyen conférant date certaine à réception) ;
- n’a pas besoin d’être nécessairement chiffrée [54], le chiffrage n’étant obligatoire qu’à l’occasion de la procédure contentieuse [55] [56] ;
- doit intervenir dans un délai de « quatre ans à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis » [57].
Si le requérant a adressé sa demande préalable à la mauvaise administration, celle-ci doit transmettre le dossier à son homologue compétent ; le délai de recours contentieux court à compter de la réception par l’administration saisie à tort [58].
Du reste, la demande préalable n’est soumise à aucun formalisme particulier : elle pourra simplement prendre la forme d’une lettre au sein de laquelle le requérant explicitera l’objet et les raisons de sa demande, pièces justificatives à l’appui, de manière analogue à une requête introductive d’instance.
Afin de maximiser les chances d’une décision favorable, et ainsi obtenir satisfaction sans avoir à passer par un tribunal, l’importance d’une demande préalable correctement rédigée ne doit pas être négligée ; le cas échéant, ne pas hésiter à se faire aider par un professionnel du droit.
Des moyens à l’appui de la requête au fond.
Lorsque le requérant souhaite voir annuler une décision de l’administration [59] , il doit en démontrer l’illégalité [60].
Cette illégalité peut porter sur la forme de l’acte, ou sur son fond : on parle alors, respectivement, de vice de légalité « externe » ou « interne ».
Les vices de légalité externe sont :
- l’incompétence de l’auteur de l’acte : l’administration ayant pris la décision litigieuse n’était pas habilitée pour le faire, que ce soit sur le plan matériel (compétence « ratione materiae »), temporel (« ratione temporis »), ou territorial (« ratione loci ») ;
- le vice de procédure : certains actes ne peuvent être édictés par l’administration qu’au terme d’une procédure définie par la loi, le règlement ou les principes généraux du droit, et si cette procédure n’est pas respectée, l’acte qui en découle s’expose à la censure [61] ;
- le détournement de procédure : l’administration édicte un acte, apparemment légal, et conforme aux objectifs de ses prérogatives, mais au terme d’une procédure autre que celle qui aurait dû être utilisée pour y parvenir (CE Assemblée 24 juin 1960 « Société Frampar » n° 42289) ;
- le vice de forme : l’administration est parfois tenue de respecter un certain formalisme, et son irrespect expose l’acte à la censure. Défaut de mentions obligatoires, défaut de signature ... mais surtout, le vice de forme le plus souvent sujet à discussion est l’absence ou l’insuffisance de motivation, dans les cas où l’acte doit être motivé [62]. Et, comme pour le vice de procédure, le vice de forme ayant trait à la motivation peut, à certaines conditions, être neutralisé par "substitution de motifs" (CE 6 février 2004 n° 240560 « Hallal »).
Les vices de légalité interne sont :
- l’erreur de fait : l’administration a édicté son acte sur une base factuelle erronée [63], étant précisé que seuls les juges du fond (i.e. tribunal administratif et cour administrative d’appel) sont habilités à établir les faits, tandis que l’office de cassation par le Conseil d’État se borne à un contrôle de "dénaturation" par les juges du fond ;
- le détournement de pouvoir : lorsque l’administration édicte un acte qui revêt des apparences de légalité, sans vice ni détournement de procédure, mais sur la base d’un pouvoir destiné à un but autre que ce pourquoi elle l’a utilisé (CE 26 novembre 1875 « Parizet ») ; il s’agit, en définitive, d’un contrôle du "mobile" sous-jacent de l’acte en litige, et dont la légalité apparente n’est in fine qu’un prétexte pour assouvir un objectif étranger à l’objet de ses prérogatives (par exemple un intérêt privé) ;
- l’erreur de qualification juridique : dans certaines situations, l’administration se trouve dépourvue de pouvoir d’appréciation et est légalement tenue de prendre une certaine décision ; on parle ici de « compétence liée ». Dans cette hypothèse, l’office du juge de l’excès de pouvoir consiste à vérifier si les faits ont été correctement "qualifiés" juridiquement par l’administration ; autrement dit, si l’administration a bien appliqué la bonne règle de droit au bon cas d’espèce (CE 4 avril 1914 n° 55125 « Gomel ») ;
- l’erreur (manifeste) d’appréciation : à l’inverse, il existe d’autres situations où l’administration jouit d’une certaine liberté pour décider de l’opportunité de prendre - ou ne pas prendre - une certaine décision, dans quel sens et dans quel quantum ; on parle alors de « pouvoir discrétionnaire ». Dans cette hypothèse, l’office du juge de l’excès de pouvoir consiste à vérifier l’absence de disproportion entre les faits et la décision qui en découle. Dans certaines situations, le juge se bornera à contrôler l’absence d’erreur « manifeste » d’appréciation, c’est-à-dire d’erreur extrêmement grossière : on parle de contrôle « restreint ». Dans d’autres, l’office du juge étant plus poussé, il exercera un contrôle dit « normal » et sanctionnera toute erreur d’appréciation, même non grossière ou "manifeste" [64] ;
- l’erreur de droit pour "incompétence négative" : à chaque fois que l’administration dispose effectivement d’un pouvoir discrétionnaire, il lui appartient de faire usage de ce pouvoir en appréciant elle-même et in concreto la situation de fait qui lui est soumise ; au contraire, elle ne saurait se dire liée par l’avis d’un autre organe si ce dernier n’a de valeur que consultative, sauf à exposer sa décision à la censure (CE Section 20 juin 2003 n° 248242) ;
- l’erreur de droit pour défaut de base légale : lorsque les motifs de la décision font clairement apparaître une violation d’une norme juridique (qui n’est pas nécessairement une "loi" stricto sensu : cela peut être un règlement, une convention internationale, un principe général du droit ...) [65]. Une telle erreur peut aussi résulter d’un détournement de procédure, ainsi qu’on l’a vu dans les vices de légalité externe.
Lorsque le requérant souhaite voir engager la responsabilité de l’administration en vue de l’indemnisation d’un préjudice, il doit, à l’instar droit civil, démontrer l’existence, cumulativement :
- d’une faute imputable à l’administration, ou, s’agissant d’une responsabilité sans faute, d’un fait dommageable auquel elle est tenue de répondre ;
- d’un préjudice ;
- et d’un lien de causalité direct et certain entre ces deux éléments.
Il est à noter que la "faute" de l’administration peut parfaitement résulter de l’illégalité d’un acte édicté par elle : toute illégalité est fautive, y compris une simple erreur d’appréciation (CE 26 janvier 1973 n° 84768 « Driancourt » ; CE 30 janvier 2013 n° 339918).
Dans ce cas, le requérant devra commencer par démontrer l’illégalité de l’acte (sauf à ce que ce dernier n’ait déjà été annulé par un recours antérieur, auquel cas son illégalité est acquise une fois la décision passée en force de chose jugée).
Attention toutefois : lorsque la faute de l’administration consiste en un vice de procédure, l’indemnisation de la victime n’est pas admise, en raison d’une absence de lien de causalité direct et certain, dès lors qu’il est établi que l’administration eût été en droit de prendre la même décision au terme d’une procédure régulière (CE 18 novembre 2015 n° 380461).
Nous avions d’ailleurs déjà abordé la problématique dans un précédent article intitulé "Quand le Conseil d’État invente le recours abusif... sans abus.".
Enfin, la recevabilité des moyens énumérés ci-avant est subordonnée au respect des délais de recours contentieux : ils doivent, en principe, avoir été soumis au tribunal, au sein de la requête introductive d’instance ou d’un mémoire additionnel, dans le délai réglementaire de deux mois à compter de la publication ou notification de l’acte, ou à compter de la décision implicite de rejet [66].
Toutefois, « les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision » [67].
En l’absence de notification des délais et voies de recours, le requérant dispose d’un "délai raisonnable" d’un an pour exercer son recours et présenter ses moyens d’annulation de la décision en litige [68].
Encore, il convient de souligner la nécessité de soulever, à l’appui de la requête et avant l’expiration des délais de recours, au moins un moyen de légalité externe, et au moins un moyen de légalité interne.
En effet, il a été jugé que ces deux types de légalité constituent des « causes juridiques » distinctes, et que tout moyen relevant de l’une ou l’autre de ces deux causes, soulevé pendant l’instruction mais postérieurement à l’expiration des délais de recours contentieux, n’est recevable qu’à la condition qu’un moyen relevant de la même cause ait déjà été soulevé dans les délais impartis (CE Section 20 février 1953 n° 9772 « Société Intercopie »).
Autrement dit, le requérant qui prend soin de soulever, durant le délai de recours contentieux, au moins un moyen de légalité externe, et au moins un moyen de légalité interne, pourra ensuite soulever des moyens nouveaux, à sa guise, durant l’instruction, et même en appel [69].
Au contraire, le requérant qui ne soulève que des moyens de légalité externe, durant les délais de recours contentieux, ne sera plus recevable ensuite à soulever des moyens de légalité interne pendant l’instruction, ni en appel (et vice versa).
Néanmoins, les moyens d’ordre public, ou "MOP", demeurent recevables en tout état de cause, le juge ayant d’ailleurs l’obligation de les soulever d’office [70].
b) En référé.
Du référé-liberté.
Le référé-liberté est, tout à la fois, le plus souple des référés en la forme, mais le plus rigide et exigeant au fond.
Et pour cause, il est celui des référés qui permet d’obtenir une décision provisoire en quarante-huit heures [71], c’est-à-dire en "extrême urgence".
L’"extrême urgence" de la situation nécessite un formalisme réduit au strict minimum : le ministère d’un avocat n’est jamais obligatoire [72] et aucun recours au fond n’a besoin d’exister en parallèle.
Le référé-liberté reste recevable, même en l’état de l’expiration des délais de recours contentieux [73].
Mieux encore : en fait, ce référé ne nécessite même pas de décision de l’administration, et peut au contraire tendre à enjoindre à l’administration de prendre « toutes mesures » visant à combler une carence ou une abstention de celle-ci [74]. Dans une telle situation, le référé, qui se présente en principe comme une mesure provisoire, peut revêtir en réalité un caractère définitif : une fois les mesures adéquates prises, il n’y a plus lieu de poursuivre de contentieux au fond en parallèle.
Et outre que des moyens nouveaux peuvent être plaidés oralement à l’audience, s’agissant d’une procédure orale, comme vu précédemment.
Mais, à l’évidence, une procédure aussi avantageuse en termes de délai (ou plutôt d’absence de délai) et de formalisme ne peut être réservée qu’à des situations exceptionnelles, d’où les conditions de fond - cumulatives - particulièrement lourdes et strictes.
Ainsi, le requérant est tenu de justifier, cumulativement, selon l’article L.521-2 du Code de justice administrative :
- d’une "extrême urgence" à voir statuer sur sa situation dans un délai de quarante-huit heures [75]. Cette condition s’apprécie à la date de la requête (CE 17 mars 2010 n° 332585), et de manière stricte, sans être analogue à celle du référé-suspension (CE Juge des référés 28 mars 2008 n° 314368) ;
- d’une atteinte à l’une des "libertés fondamentales" listées ici ;
- atteinte qui doit par ailleurs être "manifestement illégale" : un simple doute sur la légalité de l’atteinte n’est pas suffisant. En pratique, démontrer l’illégalité de la décision de l’administration ou de la situation créée par son fait ou sa carence, de manière analogue à un recours au fond ;
- et "grave" : une simple gêne n’est pas suffisante (CE Juge des référés 3 mars 2011 n° 347061) ;
- le tout dans l’exercice des pouvoirs de l’administration [76].
Une fois l’ensemble de ces conditions dûment réunies et établies, le requérant est fondé à solliciter « toutes mesures nécessaires à la sauvegarde » de sa liberté à laquelle il est porté atteinte.
Du référé-suspension.
Prévu par l’article L.521-1 du Code de justice administrative, ce référé vient en complément d’un recours au fond, « en annulation ou en réformation » [77] d’une « décision administrative, même de rejet ».
Aussi, le référé-suspension n’est recevable que si le requérant justifie d’avoir introduit au préalable un recours au fond, dont il doit produire copie par devant le juge des référés (article R.522-1 du Code de justice administrative).
Il permet, comme son nom l’indique, d’obtenir la "suspension" d’une décision (ou « de certains de ses effets »), dans un délai généralement d’un mois, ce dans la perspective de son annulation pure et simple, ou de sa réformation.
Et lorsque la décision attaquée est une décision de rejet, sa "suspension" vise en réalité à ce qu’il soit fait droit à la demande préalable du requérant à l’administration, même provisoirement : une telle injonction est possible au visa des articles L.911-1 et suivants du Code de justice administrative.
Pour ce, le ministère d’un avocat est obligatoire, ou ne l’est pas, corrélativement à l’obligation ou absence d’obligation d’un tel ministère pour le recours au fond (article R.522-5 du Code de justice administrative) [78].
Il peut être présenté, ou renouvelé, à toute époque de la procédure, y compris devant la cour administrative d’appel (CAA Toulouse 5 mai 2022 n° 22TL20896) [79].
Les conditions de fond, plus souples que celles du référé-liberté, sont cumulativement les suivantes :
- l’existence d’une urgence relative à voir suspendre la décision en litige. Cette condition d’urgence est certes moins exigeante que celle du référé-liberté (s’agissant d’une "urgence" de l’ordre d’un mois et non de quarante-huit heures), mais n’en demeure pas moins strictement nécessaire [80] ;
- l’existence d’un « moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ». Contrairement au référé-liberté, un simple doute quant à la légalité de l’acte suffit donc pour obtenir sa suspension, mais ce doute doit néanmoins être "sérieux". Et surtout, le vice de légalité n’a pas besoin d’affecter nécessairement une "liberté fondamentale". En pratique, la démonstration du « doute sérieux quant à la légalité de la décision » pourra se faire, très simplement, par un "copier/coller" des développements de la requête au fond ; la seule valeur ajoutée du référé-suspension consistant in fine à développer la condition d’urgence relative.
Attention : aux termes de l’article R.612-5-2 du Code de justice administrative, « en cas de rejet d’une demande de suspension présentée sur le fondement de l’article L. 521-1 au motif qu’il n’est pas fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision, il appartient au requérant [...] de confirmer le maintien de sa requête à fin d’annulation ou de réformation dans un délai d’un mois à compter de la notification de ce rejet. À défaut, le requérant est réputé s’être désisté ».
Il appartient donc au requérant, lorsqu’il est débouté de son référé-suspension, de confirmer le maintien de sa demande au fond, et de le faire spontanément, sauf à vouloir se désister. Cette confirmation peut se faire, très simplement, au moyen d’un courrier adressé au tribunal, par Télérecours ou par courrier papier, sans autre formalisme.
Également, le simple dépôt d’un nouveau mémoire au sein de l’instance au fond équivaut à une telle confirmation (CE 24 juin 2022 n° 460898).
Enfin, et en toute logique, la clôture de l’instance au fond entraîne caducité de l’ordonnance de référé-suspension, quel qu’en soit le sens : la décision de l’administration cesse d’être suspendue si la requête au fond a été rejetée ou si son requérant s’en est désisté ; au contraire, la décision de l’administration est annulée si tel est le sens de la décision de la juridiction statuant au fond, peu important l’échec du référé-suspension.
Du référé-provision.
Contrairement aux deux précédents référés, le référé-provision, aux termes des articles R.541-1 et suivants du Code de justice administrative, ne requiert aucune condition d’urgence.
Il ne requiert pas non plus de procédure au fond en parallèle.
Toutefois, contrairement aux référés d’urgence, la décision n’interviendra pas avant plusieurs mois : en l’absence d’urgence, le délai d’instruction et de jugement de la requête n’est tributaire que du niveau d’engorgement de la juridiction saisie, laquelle peut d’ailleurs statuer sans audience (CE 25 octobre 2002 n° 244729).
Mais si aucun recours au fond n’est obligatoire, il n’en demeure pas moins nécessaire de justifier d’une demande préalable à l’administration, conformément à l’article R.421-1 du Code de justice administrative.
Le requérant n’est toutefois pas obligé d’attendre la décision de rejet de l’administration, qu’elle soit implicite ou explicite : il peut saisir le juge des référés d’une demande de provision tout de suite après avoir adressé sa demande préalable.
En effet, sauf à se désister en cas de réponse favorable de l’administration, le requérant pourra simplement faire connaître au juge des référés la décision de rejet explicite de l’administration en cours de procédure, ou de son absence de réponse valant rejet implicite au bout de deux mois.
Autrement dit, il pourra "lier le contentieux" en cours de procédure (CE 23 septembre 2019 n° 427923).
Quant au ministère d’un avocat, l’on a déjà vu que ce dernier était, en principe, indispensable en cas de demande tendant au paiement d’une somme d’argent : cela vaut tant au fond qu’en référé.
Mais il existe un certain nombre d’exceptions énumérées à l’article R.431-3 du Code de justice administrative, pour lesquelles le justiciable peut agir sans avocat.
Enfin, concernant les conditions de fond, il n’y en a en réalité qu’une seule :
- l’existence d’une obligation "non sérieusement contestable".
Cette absence de "contestation sérieuse" s’apprécie tant au regard du principe de l’existence de l’obligation, que de son quantum , et ce de manière cumulative.
Dès lors, le juge des référés pourra accorder une provision à un requérant qui démontre l’existence non sérieusement contestable d’une créance à son profit à l’encontre de l’administration, mais uniquement à hauteur d’un quantum minimal, lui aussi non sérieusement contestable (CE 6 décembre 2013 n° 363290).
C’est typiquement dans une telle situation qu’il est utile de cumuler un référé-provision avec un recours au fond : le référé permettra au créancier d’obtenir un premier paiement dans un délai raisonnable, tandis que le recours de plein contentieux permettra de voir fixer définitivement le montant global de la dette, et donc du reliquat, certes plus tardivement.
Au contraire, il est inutile d’introduire un recours au fond dès lors que la créance peut être établie, de manière certaine, tant dans le principe de son existence que dans son quantum : le montant de la provision couvrira déjà l’entièreté de la somme due.
Enfin, lorsque le requérant a obtenu gain de cause ensuite d’un référé-provision et n’a pas introduit de recours au fond en parallèle, l’administration a la possibilité d’introduire une « requête tendant à la fixation définitive du montant de sa dette, dans un délai de deux mois à partir de la notification de la décision de provision rendue en première instance ou en appel » (article R.541-4 du Code de justice administrative).