I. Des moyens insuffisants.
Le premier président Christophe Soulard a rappelé que « la somme que la France consacre à sa justice, rapportée au nombre d’habitants, est nettement inférieure à la médiane des pays européens ». Il a également ajouté que : « L’effort "salutaire" de mise à niveau accompli par le précédent ministre, Eric Dupond-Moretti, doit être maintenu ». La question des moyens ainsi évoquée renvoie à la question : des effectifs de magistrats et de personnels judiciaires, du système informatique parfois déficient, d’un parc immobilier sous-dimensionné, d’établissements pénitentiaires surpeuplés.
Rémy Hertz, le Procureur général près de ladite cour, a déclaré que :
« La justice de notre pays ne dispose pas du budget nécessaire pour accomplir les missions pourtant essentielles qui lui sont confiées. Elle compte ainsi 2 fois moins de juges et 4 fois moins de procureurs que dans les pays comparables qui l’entourent et représente une part minime du budget de l’État : 10 milliards d’euros, soit 2% des dépenses ».
Face à ce constat, le premier président de la Cour de cassation a fait part des moyens mis en œuvre par l’ensemble des juridictions y compris la Cour de cassation, pour aider les magistrats du fond à accomplir dans un délai raisonnable leur mission.
II. Une rationalisation des moyens engagés par les juridictions.
Les juridictions du fond ont mis en place un système d’accès au droit, un regroupement de dossiers posant des questions similaires afin de permettre le traitement rapide des affaires. En outre, des conventions ont été signées avec les barreaux.
En ce qui concerne la haute juridiction, celle-ci a mis en place les actions suivantes pour permettre aux juges du fond de juger dans un délai raisonnable :
- Mise en place de podcasts,
- Meilleur accès de la jurisprudence,
- Publication des travaux préparatoires,
- Instauration d’un observatoire des litiges dont le but est de permettre un échange entre les juridictions du fond et la Cour de cassation sur les contentieux présentant un intérêt majeur.
Cette rationalisation ne suffit pas étant donné que l’institution judiciaire fait face à de nouveaux défis.
III. Une institution en proie à de nouveaux défis nécessitant une augmentation des moyens.
Au-delà que la France est très mal classée par rapport aux autres pays quant aux moyens alloués à sa justice, l’institution judiciaire fait face à de nouveaux défis. Le procureur général près de la Cour de cassation, Rémy Ha ainsi rappelé ces défis qui sont : « les violences faites aux femmes, le terrorisme, la criminalité organisée, les contentieux de masse… ». Il a ajouté que : « 4 000 affaires criminelles étaient en attente fin 2023. Une embolie inadmissible pour nos concitoyens, qui paralyse l’efficacité de notre système et fait peser un risque grave et insidieux : celui de remises en liberté d’accusés dangereux et, partant, de récidives. Je l’ai dit publiquement : nous sommes face à un mur ». Selon lui, cette embolie n’a pas été résolue avec la création des cours criminelles départementales. En effet, les délais de jugement ont été allongés. Les cours criminelles départementales, ont vu le nombre de dossiers criminelles en matière sexuelle augmenter. Benjamin Fiorini déclare à ce sujet que les départementales n’ont pas fait obstacle à la correctionnalisation des viols. Le rapport de l’Inspection générale de la justice (IGJ) remis au même garde des Sceaux en mars 2024 fait état d’une requalification en agression sexuelle, des viols, devant les tribunaux correctionnels.
En conclusion, la justice reste en souffrance, malgré l’augmentation des moyens ces dernières années, et les annonces récentes du ministre de la Justice Gérald Darmanin. Ce dernier a indiqué que : « le budget du ministère de la Justice ne sera pas touché d’un euro ». Les moyens de la justice "continueront à augmenter" a-t-il ajouté. 10,5 milliards d’euros sont prévus par le budget 2025 pour le Ministère de la Justice.