LE FORUM DES MEMBRES DU VILLAGE

Bonjour,

Je travaille avec une nouvelle collègue juriste depuis quelques semaines et j'ai remarqué que, pour ne pas prendre de risque, elle ne concluait jamais.

C'est très déroutant. Elle fait un long bla bla, l'article gnagna dit que..., avant il disait que.... et voilà, fin.

Elle n'applique pas aux faits. Elle ne se mouille pas. Au contraire, elle embrouille le lecteur avec des références (trop) et indique même l'historique (avant la loi machin, il y avait la loi truc, et en ce temps là on faisait comme ça).

Diantre...

Je ne la considère pas comme une bonne juriste. Mais, je ne le crie pas haut et fort compte tenu qu'elle a plus d'expérience que moi.

Moi, lorsque j'ai affaire à un opérationnel (donc non juriste), j'explique ce qu'il en est en indiquant mes références, parfois uniquement entre parenthèses parce que le lecteur s'en fiche, puis je conclue "En l'espèce, il conviendra donc de ....".

Il m'arrive de douter, c'est clair mais dans ce cas là, je mets du conditionnel, j'explique bien qu'il s'agit de ma position. Bref, à un moment, il faut se mouiller.

Donc, je m'interroge : qu'est-ce qu'un bon juriste dans la pratique ?

Allez, bonne journée à tous.

A mon sens, un juriste est dans la même situation qu'un avocat : il doit prendre effectivement position pour conseiller sa société au mieux.

Comme l'avocat (le bon, hein, pas l'autre ) qui doit conseiller son client sur l'opportunité de faire un procès ou pas à une autre personne quelle soit physique ou morale.

Ce n'est que mon avis et je suis pleinement avec accord avec moi même

Merci pour votre avis qui, ça me rassure, est le même que le mien.

A mon sens, un bon juriste est celui qui se positionne, si ce n'est tout le temps, au moins la grande majorité des cas, quitte à faire des erreurs. Encore faut-il pour cela être dans une société qui comprend que, malheureusement, le droit n'est pas une science exacte (surtout du fait des juges de première instance).

Personnellement, dans un cadre interne à l'entreprise, je ne suis même sûr pas qu'il faille sourcer ses positions. Bien sur, il faut garder une trace de son raisonnement, mais l'opérationnel, le raisonnement, il n'en a que faire. En tant que juriste en entreprise, nous n'avons pas, comme les avocats, à couvrir notre RCP et je pense que cela dit constituer une force de notre profession.

Je suis d'accord avec vous: il faut prendre position sur la question qui est posée...

Mais dire que l'opérationnel qui l'a posée se fiche du raisonnement, c'est un peu réducteur: certes il ne faut pas répondre en 10 pages, mais un minimum d'explications et de fondement est généralement bienvenu... Du mois à ce que j'ai pu constater.

Bonjour,
Je suis d'accord avec les réponses précédentes mais souhaiterais préciser un point: pour moi le bon juriste est d'abord et avant tout celui (celle) qui pose un diagnostic précis sur la (les) question(s) qui lui sont posées et qui, après une analyse serrée du problème posé apporte la solution juridique la plus appropriée audit problème. Quant à citer des listes sans fin d'arrêts et de jurisprudence....il ne faut pas confondre donner des arguments pour soutenir sa décision et montrer sa culture juridique sans efficacité aucune...

Salutations collectives !
J'ai beau essayer, je n'arrive pas à être en désaccord avec les réponses précédentes et ça me contrarie pas mal.
Plus sérieusement, le juriste d'entreprise est recruté pour répondre avec des connaissances que lui seul détient (pour un juriste unique, ou pour un juriste d'une spécialité rare) ou que peu détiennent dans l'entreprise. Les autres salariés vont se référer à lui, qui est une sorte d'autorité de la chose juridique, en lui présentant des cas de figure précis qui leur amènent des questions. Or, si le juriste ne tranche jamais les questions, il ne fait qu'une partie de son travail : l'analyse est indispensable, mais elle doit servir de préalable à une décision qu'elle vient appuyer et justifier.
Le bon juriste, à mon humble avis (j'aime beaucoup cette expression, le "humble" va souvent avec une prétention délirante en réalité mais passons) doit être capable de proposer une solution juridiquement fondée à un problème qui se pose à l'entreprise/administration/association/etc. S'il ne tranche pas, il doit au moins avoir présenté avec une précision suffisante les avantages et inconvénients des différentes solutions proposées, charge ensuite à d'autres de décider à la lumière de l'analyse du juriste.
Ce n'est que mon point de vue mais j'ai l'impression de ne pas ajouter grand-chose aux posts précédents. Veuillez donc m'en excuser et reprendre votre discussion là où elle était restée.
Bien à vous,
MEEM

Oui effectivement ce n'est pas forcément au juriste de trancher mais plutôt au décisionnaire ... à condition de l'avoir éclairé! Le juriste doit se prononcer, si c'est pour donner 50% d'arguments pour et 50% d'arguments contre et laisser l'opérationnel prendre sa décision il ne sera pas plus avancé. Quant à l'embrouiller encore plus, je ne vois pas l'intérêt, d'autant plus que cela contribue malheureusement à entretenir le discours selon lequel les juristes sont des gens incompréhensibles qui ne font que mettre en avant des risques sans jamais trouver de solutions ... Après, je crois qu'il faut éviter aussi la dérive qui consiste à systématiquement trancher voire décider à la place des autres en se rapprochant d'un mode de fonctionnement "opérationnel".

Pour ta deuxième question, non, je ne crois pas. L'étudiant se forme aussi de son côté, et il ne doit pas tout à la fac : travail personnel, lectures, stages...

Maintenant, pour moi ( et ça n'engage que moi ) on commence à devenir un juriste en maîtrise, voire à la fin de celle-ci. Parce qu'on a un certain niveau à ce moment, un recul, une vision qui se forme, des mécanismes de pensée, des techniques. Le bon juriste, après... ça doit être celui qui fait bien son métier. Celui qui est au courant des réformes, qui sait saisir les opportunités, découvrir les moindres risques pour ses clients, qui les sert comme il aimerait être servi lui-même par idéal. Mais c'est aussi celui qui arrive à ses fins et au but qu'il s'est fixé, même si ceux qu'il conseille sont pas blancs comme neige, celui qui se sert de toutes les mécaniques à sa disposition. Peut-être que le bon juriste c'est un bon technicien.

En tout cas, il y a une chose que je vois dans le bon juriste : l'humilité, à défaut la modestie. C'est valable pour tous les hommes, tous les métiers : le manque d'humilité se paie toujours, déjà, parce que trop de confiance masque la prudence, et ensuite parce que je n'aime pas ceux qui se la pètent

Merci pour vos avis.
Désolée d'avoir tardé à répondre mais il y a eu beaucoup de mouvement au travail, notamment en raison du non professionnalisme de cette collègue (enfin ce que JE considère comme du non professionnalisme).

En tout cas, je constate avec plaisir que nous sommes du même avis.