Déroulement de l’audition libre : les deux évolutions possibles de la procédure sous le nouveau régime du « suspect libre » ou de la garde à vue.

Par Hugues de Poulpiquet, Elève-Avocat.

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Explorer : # audition libre # suspect libre # garde à vue # enquête préliminaire

La loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales a instauré le droit à l’assistance d’un avocat pour les personnes auditionnées dans le cadre de la procédure du « suspect libre ». Avec l’entrée en vigueur de la disposition relative à la présence de l’avocat, le 1er janvier 2015, quelles sont les points communs et les différences entre les deux procédures de l’audition du témoin et de l’audition libre du suspect libre ? Quelles sont les évolutions possibles de ces deux auditions ?
Article vérifié par son auteur en mars 2024.

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L’audition du suspect libre peut intervenir dans le cadre d’une enquête préliminaire ou d’une enquête de flagrance, c’est-à-dire dans la phase d’enquête dirigée par le procureur de la république, mais également sur commission rogatoire du juge d’instruction.

L’audition du témoin

L’individu convoqué pour une déposition dans le cadre de l’audition libre sera interrogé dans le cadre de la procédure de l’article 62 du Code de procédure pénale (ci-après CPP). A ce titre, il sera entendu par les enquêteurs sous le régime des personnes pour lesquelles « il n’existe aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction ».

Cette audition s’effectuera sans mesures de contrainte et la personne auditionnée pourra éventuellement être informée par oral, et dès le début de son audition, qu’elle peut partir à tout moment. En revanche, si les nécessités de l’enquête le justifient, elle pourra tout de même être retenue sous contrainte le temps strictement nécessaire à son audition, soit quatre heures maximum.

Cette audition se déroule sans l’assistance d’un avocat.

L’audition libre du « suspect libre »

Ensuite, si au cours de l’audition du témoin de l’article 62 CPP il apparaît, à propos de la personne interrogée, « qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis ou tenté de commettre une infraction », celle-ci sera alors entendue en application de l’article 61-1 du CPP : c’est-à-dire dans le cadre de la nouvelle procédure dite de l’audition libre du « suspect libre », créée par la loi du 27 mai 2014, et entrée en vigueur le 2 juin 2014.

Lui seront alors notifiées, notamment, et sans délai : la qualification, la date et le lieu présumés de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre ; son droit de quitter à tout moment les locaux où elle est entendue ; son droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

Depuis le 1er janvier 2015, si l’infraction pour laquelle la personne est entendue est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, elle peut bénéficier du droit d’être assistée au cours de son audition par un avocat.

En revanche, rien n’est précisé quant à la durée maximum de cette audition. La personne peut en effet quitter le bureau de l’enquêteur « à tout moment ». On suppose qu’il reviendra à l’avocat d’avertir son client qu’il est peut être grand temps de se retirer…

Et il faut noter que l’audition sous le régime du « suspect libre » n’est pas applicable si la personne a été conduite, sous contrainte, par la force publique devant l’officier de police judiciaire.

La garde-à-vue

Enfin, s’il apparaît, au cours de l’audition du témoin (62 CPP) ou au cours de l’audition libre en tant que « suspect libre » (61-1 CPP), qu’il existe des raisons plausibles de soupçonner que la personne auditionnée a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, elle ne pourra être maintenue sous contrainte à la disposition des enquêteurs que sous le régime de la garde à vue (62-2 CPP) et sera alors immédiatement assistée d’un avocat.

Conclusion

Ainsi, le nouveau régime du « suspect libre » organise l’audition libre par les enquêteurs d’une personne suspectée d’une infraction dont la nature n’est pas précisée, alors que l’audition d’une personne via l’article 62 du CPP encadre l’audition d’un « témoin » ou plus précisément d’une personne « non suspecte » (mais qui pourrait en ressortir suspecte !).

Ainsi, depuis le 1er janvier 2015, une personne soupçonnée d’avoir commis ou tenté un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement peut être entendue sous deux régimes : soit via l’article 61-1 du CPP comme suspect libre, soit via l’article 62-2 du CPP comme gardé à vue. 
La garde à vue n’est donc plus l’unique moyen d’entendre une personne suspectée d’un crime ou d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement. C’est-à-dire que les enquêteurs pourront choisir entre entendre le suspect sous contrainte et dans un temps limité (garde à vue) ou sans contraintes mais dans un temps théoriquement illimité (audition libre du suspect libre).
Ce nouveau statut pourra probablement, et notamment, servir à entendre, d’une manière plus « douce » (en tout cas médiatiquement) les personnes et les dirigeants d’entreprises ou les représentants de sociétés dans le cadre d’infractions non intentionnelles ou non « manifestement » constituées.

Hugues de Poulpiquet
Élève-avocat.

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Discussions en cours :

  • 1) N’y a-t-il pas un piège grossier_ glissement prévisible durant l’audience ....qui va dégénérer pour basculer en Garde à Vue (62 CPP) ? La mauvaise foi et le copinage de 3 femmes : la maréchal des logis chef, la prétendue victime AS qui débarque dans la rue ?! à 19h !? (1er piège) !, et la gardienne (qui m’a fait attendre 25’) de mon petit fils que je voulais embrasser pour mes 73 ans ! l’attente a permis l’irruption de la soi-disant AS en mission §§§ ?? rires ..je vous ai tout dit. Elles veulent jouer le "crime avéré" pour passer en régime GARDE A VUE ? qui les retient COLLUSION ?
    2) que veut dire au juste ce mystérieux "sans incapacité" ? je ne l’ai pas touchée j’ai levé l’index !! de quel peine d’emprisonnement peut-il bien s’agir ou autre ? c’est une farce grossière ! non ?

    in fine compte tenu du "complot" qu’elles fomentent (ensemble ) visible " comme une grosse ficelle de Marin à voile", de bout en bout. Vu l’enjeu =qui est la privation de l’enfant et de son grand-père = au profit de 2.000 euros/ mois qu’empoche ladite gardienne depuis 12 ans ? COMMENT EVITER DE TOMBER...... je serais sans doute SEUL et elles 3 vont m’exaspérer. Mon droit à me taire !? c’est théorique...je serais dans des locaux enfermé de fait. Or je n’ai rien fait : c’est ma parole contre la leur TOUTES LES 3 Comment faire ? tel 06 83 70 81 13

    • par Jacques Moussalli (gd-père de 73 ans +son petit-fils 12 ans) , Le 26 décembre 2015 à 19:35

      1 ligne de conduite à suivre 61-1 dit :"la personne à l’égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis une infraction ne peut être entendue librement sur ces faits qu’après avoir été informée :1°) De la qualification, date et lieu présumés de l’infraction. QUESTION 1 :a)qualification date, lieu n’apparait pas ds PV . N’y a-t-il pas "vice de forme" ? ne va-t-on pas vite en besogne ? c’est moi qui suit agressé. Ne me serait pas présenté à porte (ns fréquent. dep>10 ans) pr embrasser m/petit-fils ? où est le délit ? qu’il faille appeler à "rescousse à 19h" ds la rue : "perso chargée d’1 mission de Sce public". b) C’é agression morale pr déstabiliser +irruption d’1 tiers ? la gardienne_ a accepté la visite, ressort de s/maison avec le petit. Où est sa bonne foi ? ne m’averti pas prouve contraire : "préméditation +esclandre" ? c)"perso chargée d’1 mission de Sce public"_ il est 19h "débarque" >10’ d’entretien av m/petit-fils ; Où est le "danger " ? gd-père qui embrasse s/petit-fils au vu de 2 parents après attente. Où é l’infraction ? "délit" ?QUESTION 2 : a), b), et c) ne prouvent-ils pas qu’il s’agit d’1 "coup monté" ? seul l’affect du gd-père,traduit par "patience+longue attente" avant de voir/s’entretenir av son petit-fils ? Dés s/arrivée ds la rue, l’air courroucé : elle enjoint m/petit-fils de se "séparer de moi/d’aller se réfugier" ds voiture père. N’Est-ce pas "VIOLENCE" ? je proteste : elle enchaine me demandant de quitter les lieux, elle appelle les gendarmes ? Privé de sérénité ma démarche (fêter anniversaire//mon petit-fils que je n’avais pas vu dep 7 mois !!) je "surenchéri à m/tour : "ALLEZ-Y appelez les gendarmes ca m’intéresse qu’ils réalisent v/absence d’humanité.Vu l’escalade "exécutant sa menace" demande le n° de gendarmerie. inutile que j’attende +longtemps.j’embrasse m/petit-fils interloqué à travers la vitre, m’en vais. Mon souci:préserver l’enfant _ contraire à 3 adultes de l’esclandre=manque de psychologie à s/égard_ cé prémédité, convenu pr me démonter qq’part à mon insu, m/affect m’a préservé 1 temps s/place _de l’idée qu’il puisse y avoir matière à de sombres manœuvres//aucune raison d’être ds cas présent QUESTION 3 :Comment remettre choses à l’endroit ?ds le cadre d’1 audition Art 61-1 CPP ? dt les conditions s/forme +s/fond ne st pas conformes à la Loi ? préjuger délit alors que le contraire est : je suis la Victime/pas l’agresseur (moral c’est +grave encore s/yeux d’1 petit 11 ans !?) Et+ PRECISEMENT : qui de l’avocat /moi peut/doit invoquer cela ? ne faut-il invoquer "vices de procédure" pr marquer le coup +demander renvoi de "l’audition libre" ? Evitant "1 piège" qui vise à envenimer COUPER LIEN av Famille LEGITIME, après 10 ans acquis ? loi jeune pr n’être "exploitée ds sens sinistre" Brimer famille légitime+enfant en pleine adolescence

  • J’ai été entendu librement début novembre 2015.
    Dans quel délai serai-je informé des suites que le parquet entend donné à l’accusation portée contre moi ?

    • par Hugues de P , Le 14 décembre 2015 à 17:55

      Bonjour Madame,

      Il n’y a pas de délais...

      Dans 3 jours, 1 an ou peut être jamais !

      Bien à vous,

      Hugues de Poulpiquet

  • 61-1 cpp sauf erreur de ma part, le suspect libre a le droit à un avocat (avant dernier alinéa)
    s’il vous plait une réponse
    nous passons le crfpa mercredi
    merci

    • par Hugues de Poulpiquet , Le 15 septembre 2014 à 13:57

      Bonjour,

      Comme indiqué ce dessus, le suspect libre "ne pourra pas bénéficier de l’assistance d’un avocat avant le 31 décembre 2014".
      Il pourra en revanche en bénéficier à partir du 1er janvier 2015, mais uniquement si l’infraction pour laquelle il est entendue est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement.

    • par RIF , Le 29 avril 2015 à 12:42

      art 61-1
      en lisant ce que dispose art 61-1 loi du LOI n°2014-535 du 27 mai 2014 - art. 1 je lis ceci

      5° Si l’infraction pour laquelle elle est entendue est un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement, du droit d’être assistée au cours de son audition ou de sa confrontation, selon les modalités prévues aux articles 63-4-3 et 63-4-4, par un avocat choisi par elle ou, à sa demande, désigné d’office par le bâtonnier de l’ordre des avocats ; elle est informée que les frais seront à sa charge sauf si elle remplit les conditions d’accès à l’aide juridictionnelle, qui lui sont rappelées par tout moyen ; elle peut accepter expressément de poursuivre l’audition hors la présence de son avocat ;
      Le bureau d’aide juridictionnelle de Pontoise ainsi qu’une personne a l’ordre des avocats ma dit que l’information été fausse et qu’il n’’es pas possible de déposer un dossier pour avoir une aide juridictionnelle ou avocat d’office comme semble disposer l’art 61-1

      1°) l’audition libre art 61-1 permet il l’aide juridictionnelle ?
      2°) comme faire si le bureau d’aide juridictionnelle refuse de prendre le dossier

  • Dernière réponse : 7 avril 2015 à 17:18
    par Lombardo Sarah , Le 13 septembre 2014 à 13:51

    Merci beaucoup pour cet éclairage très instructif sur cette problématique actuelle que j’avais bien du mal à cerner.
    Je passe l’examen d’entrée au CRFPA dans deux jours et votre article est d’une aide précieuse.

    • par zine , Le 7 avril 2015 à 17:18

      Je suis surveillant pénitentiaire et j ai également était entendu librement,dans le cadre d une évasion,en effet 5 jours avant celle ci j ai était en poste ou l’évadé se situait ,a la fin de mon service lors de la distribution du repas l évadé a remis ça l auxiliaire un sac dont je suis certain contenait des denrée, le jours ou j ai appris que celui ci s est évadé ,j ai failli avoir une crise cardiaque... Ce même jour je me suis senti suivi et jusqu’à présent j en suis devenu parano,en octobre lors de mon audition le commandant m a même posé une question sur la date de cet événement que je connaissait bien et j ai préféré dire que j avais oublié. De peur d une erreur judiciaire et de tout perdre.. Je sais il m a pas cru,j ai absolument rienn a me reprocher mais pour vous dire que même si vous êtes clean une audition peut vous mettre faire peur du fait de doutes vous concernant. Moi j attends impatiemment d être de entendu et d être enfin lavé.. Et que ma direction mec redonne sa confiance J ai même dit aux enquêteurs que j avais réussi les douanes...mais bon je crois en la justice et me dit que la PJ est la pour faire ça son travail...mais me dit avec une erreur vous pouvez tout perdte

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