Liens commerciaux et contrefaçon de marques, par Aurélie Le Blaye, Juriste

Liens commerciaux et contrefaçon de marques, par Aurélie Le Blaye, Juriste

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Explorer : # contrefaçon de marques # référencement commercial # mots-clefs négatifs # responsabilité des annonceurs

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Le Tribunal de grande instance de Paris vient à nouveau de se prononcer sur l’usage de marques protégées à titre de mots-clefs pour le référencement commercial d’un site dont l’exploitant n’est pas le titulaire des marques, mais un concurrent de ce dernier (TGI Paris, ord. référé, 17 septembre 2008).

En l’espèce, les mots-clefs litigieux avaient été générés par le système de requête élargie du moteur de recherche Google®, qui permet à un annonceur de bénéficier de liens commerciaux non seulement avec le mot-clef exact qu’il sélectionne (par exemple, maroquinerie) mais également avec des variantes qui lui sont associées automatiquement par le moteur (par exemple, sac à main).

Saisi en référé, le tribunal a considéré qu’aucune faute ne pouvait être imputée à l’annonceur qui avait, dès le lendemain de la signification de l’assignation, mis les marques du demandeur en "mots-clefs négatifs". Cette option permet d’exclure expressément, auprès du moteur de recherche, certains termes en tant que mots-clefs.

Le tribunal relève qu’il ne peut être demandé aux annonceurs de placer spontanément les marques de leurs concurrents en "mots-clefs négatifs" car ils ne peuvent toutes les connaître.

En revanche, il appartient aux titulaires de marques d’activer eux-mêmes cette option sur les moteurs de recherche, afin d’éviter que leurs marques puissent générer des liens commerciaux vers les sites Internet de leurs concurrents. Le tribunal relève à cet égard, avec une formule qui peut paraître quelque peu sévère, en l’absence de toute base légale, que "le titulaire d’une marque [a] une obligation de défense de cette dernière".

Celle-ci s’explique certainement en l’espèce par l’absence de rôle actif du défendeur dans le choix des mots-clefs litigieux, et par le fait que le demandeur avait choisi de faire valoir ses droits directement en justice, sans tenter de démarche amiable préalable auprès de l’annonceur.

En l’espèce, la société Google n’avait pas été assignée par le titulaire des marques, alors que la responsabilité de l’exploitant du moteur de recherche a été, à de nombreuses reprises, engagée dans des affaires similaires.

Le fonctionnement de son système de requête élargie apparaît très contestable puisqu’il aboutit à associer automatiquement des marques protégées à des annonceurs tiers, sans aucun contrôle préalable autre que celui des "mots-clefs négatifs", qui doit être activé de manière spontanée par les titulaires de marque, leur imposant une lourde contrainte. Par ailleurs, cette protection se montre inadaptée aux spécificités du droit des marques, régi par le double principe de spécialité et de territorialité.

Rappelons également que la Cour de cassation a récemment saisi la Cour de Justice des Communautés Européennes pour déterminer si l’usage de marques, par un prestataire de service de référencement payant, qui met à la disposition des annonceurs des marques protégées, à titre de mots-clefs, constitue une contrefaçon (Cass. Com. 20 mai 2008).

La réponse à cette dernière question étant en suspens, le demandeur a certainement choisi, en l’espèce, d’assigner le seul annonceur, à l’exclusion de l’exploitant du moteur de recherche.

Aurélie LE BLAYE

Juriste Propriété Intellectuelle

Cabinet WAGRET, Conseils en Propriété Industrielle

www.wagret.com

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