I. Le droit au renouvellement du bail commercial.
Le renouvellement d’un bail commercial génère un nouveau contrat dont les termes sont, en principe, identiques à ceux du bail expiré, sauf pour la durée et le prix.
En effet, l’article 1214 du Code civil précise que
« le renouvellement donne naissance à un nouveau contrat dont le contenu est identique au précédent, mais dont la durée est indéterminée ».
En matière de bail commercial, la durée est généralement de neuf ans, sauf accord contraire entre les parties, comme le stipule l’article L145-12 du Code de commerce.
Ainsi, le renouvellement d’un bail commercial doit intervenir aux mêmes conditions que celles du bail expiré, à moins qu’un avenant n’ait été signé pour modifier certaines conditions.
En l’absence d’accord sur ces modifications, les clauses et conditions du bail initial demeurent applicables [1].
II. Une offre modifiée équivalente à un refus de renouvellement.
La décision rendue par la Cour de cassation du 11 janvier 2024, le bailleur avait délivré un congé avec une offre de renouvellement mais incluant des modifications substantielles, telles que :
- Une modification de la contenance des lieux loués.
- L’imposition de nouvelles obligations d’entretien pour le locataire.
Les locataires ont contesté cette offre, arguant que de telles modifications dénaturent le renouvellement et qu’il s’agissait en réalité d’un refus de renouvellement, ouvrant droit à une indemnité d’éviction.
La Cour de cassation a suivi leur raisonnement, concluant que tout congé avec offre de renouvellement comprenant des modifications substantielles doit être requalifié en refus de renouvellement, ce qui oblige le bailleur à indemniser le locataire conformément à l’article L145-14 du Code de commerce.
III. La force obligatoire du contrat associé au droit au renouvellement.
La décision de la Cour de cassation du 11 janvier 2024 repose sur une cohésion indissociable entre les principes du droit des obligations et du droit des baux commerciaux, renforçant ainsi la force obligatoire des contrats et la protection des parties.
L’article 1103 du Code civil impose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi pour les parties. Ce principe f s’applique de manière générale à tous les contrats, y compris les baux commerciaux.
Ainsi, les parties doivent respecter les termes du bail, à moins qu’une modification convenue d’un commun accord ne vienne en altérer les conditions. Ce fondement civil s’applique directement à l’exécution des contrats de bail commercial, où chaque partie est tenue d’honorer les engagements définis, sauf exception légale.
L’article L145-8 du Code de commerce, quant à lui, spécifie que le locataire dispose d’un droit au renouvellement de son bail, sauf motif légitime de refus. Cette disposition est en continuité avec le principe civil de la force obligatoire des contrats, étendant cette obligation à l’exécution du contrat de bail et à la protection du locataire face à un refus de renouvellement injustifié.
L’article L145-9 du Code de commerce renforce ce droit en imposant que le congé délivré par le bailleur soit accompagné d’une offre de renouvellement, faite aux mêmes conditions que le bail expiré. Cette exigence d’un renouvellement sous les conditions initiales illustre l’importance de la stabilité contractuelle dans le domaine des baux commerciaux et permet d’assurer la sécurité juridique des parties, notamment du locataire.
Enfin, l’article L145-14 du Code de commerce prévoit qu’en cas de refus de renouvellement, le bailleur doit verser une indemnité d’éviction au locataire. Cette indemnité vise à compenser le préjudice causé par la fin du contrat de bail, soulignant une nouvelle fois la volonté législative de protéger le locataire contre une résiliation qui pourrait être abusive, tout en garantissant l’application des principes de bonne foi et de protection contractuelle dans le cadre des relations commerciales.
Cette décision illustre à elle-même cette cohésion entre les principes du droit des obligations, qui imposent le respect des contrats, et les dispositions spécifiques aux baux commerciaux, qui garantissent aux locataires une protection renforcée en cas de modification substantielle des termes du bail.
IV. Une décision sévère pour le bailleur mais protectrice pour le preneur.
Cette décision renforce la protection des locataires en empêchant les bailleurs de contourner l’obligation d’indemnisation par des modifications substantielles dans un congé avec offre de renouvellement de renouvellement.
Elle impose une vigilance accrue quant à l’appréciation des modifications proposées par le bailleur. Si celles-ci portent atteinte à la substance du bail, l’offre doit être requalifiée en refus de renouvellement.
Conclusion.
L’arrêt du 11 janvier 2024 marque une évolution importante dans la gestion des congés avec offre de renouvellement. En requalifiant une offre modifiée en refus de renouvellement, la Cour de cassation protège davantage les locataires commerciaux et clarifie les droits des parties en la matière.
Cette décision incite les bailleurs à respecter scrupuleusement les conditions du bail expiré pour éviter des contentieux et l’obligation de payer une indemnité d’éviction.
La délivrance d’un congé n’est pas anodin et doit faire l’objet d’un conseil judicieux en amont.