Le Code de déontologie des commissaires de justice est publié. Par Patrick Lingibé, Avocat.

Extrait de : Jurisguyane

Le Code de déontologie des commissaires de justice est publié.

Par Patrick Lingibé, Avocat.

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Explorer : # déontologie # commissaires de justice # obligations professionnelles # transparence

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Le décret du 28 décembre 2023 a publié le code de déontologie des commissaires de justice. Ce texte comprend 36 articles répartis en quatre titres. Le décret prévoit également la création d'un collège de déontologie des commissaires de justice.
Description rédigée par l'IA du Village

Cet article présente le code de déontologie des commissaires de justice résultant d’un décret du 28 décembre 2023.

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Il convient préalablement de rappeler que l’article 2 de l’ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 [1] dispose que :

« Un code de déontologie propre à chaque profession est préparé par son instance nationale et édicté par décret en Conseil d’Etat. Ce code énonce les principes et devoirs professionnels permettant le bon exercice des fonctions et s’applique en toutes circonstances à ces professionnels dans leurs relations avec le public, les clients, les services publics, leurs confrères et les membres des autres professions.
Les instances nationales mentionnées au premier alinéa sont l’Ordre des avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, la Chambre nationale des commissaires de justice, le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce et le Conseil supérieur du notariat.

Les instances nationales précisent par voie de règlement les règles professionnelles propres à assurer le respect du code de déontologie.

Pour les officiers publics et ministériels, ce règlement est approuvé par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice ».

C’est pour assurer la mise en œuvre de l’article législatif précité qu’a été publié au Journal Officiel du vendredi 29 décembre 2023 le décret n° 2023-1296 du 28 décembre 2023 relatif au code de déontologie des commissaires de justice.

Ce texte comporte 36 articles répartis à travers quatre titres :

  • Le Titre 1er présente les devoirs généraux liés à la fonction de commissaire de justice en quatre chapitres : principes fondamentaux, exercice professionnel, règles relatives à la communication, les collaborateurs des offices avec les articles 2 à 18.
  • Le titre II porte sur les rapports des commissaires de justice entre eux avec les articles 19 à 25.
  • Le titre III a trait aux rapports des commissaires de justice avec les parties et les tiers avec les articles 26 à 33.
  • Le titre IV aborde les dispositions finales avec les articles 34 à 36.

Notre commentaire se limitera aux dispositions relatives aux Titre 1er et III.

Il convient préalablement d’indiquer que le décret du 29 décembre 2023 comporte un article 1er qui est déconnecté des titres précités et qui a trait à la nature des commissaires de justice et à leurs missions. Les commissaires de justice sont les officiers publics et ministériels qui ont qualité pour signifier les actes, exécuter les décisions de justice, procéder à des constatations, effectuer les inventaires, prisées et ventes aux enchères judiciaires. Ils peuvent également exercer les activités accessoires qui leur sont autorisées par la loi.

Le II de cet article 1er prévoit tout un cérémonial pour la remise du code de déontologie publié au commissaire de justice. En effet, dès la publication au Journal officiel de la République française de sa nomination, autrement dit le vendredi 29 décembre 2023, le commissaire de justice doit prendre l’attache du président de la chambre régionale ou interrégionale dont il relève qui le reçoit sans délai et lui remet à cette occasion le présent code de déontologie.

Le texte précise que lors de sa présentation par le président à la première assemblée générale de la chambre régionale ou interrégionale suivant sa prestation de serment, le commissaire de justice affirme qu’il a pris connaissance du code de déontologie de la profession et s’engage solennellement à le respecter, conformément au serment qu’il a prêté devant la cour d’appel.

Les commissaires de justice stagiaires, salariés ou honoraires sont également soumis au présent code.

Enfin, l’article 1er alinéa in fine dispose que la violation d’un seul des principes, règles et devoirs énoncés dans le présent code constitue, en application de l’article 7 de l’ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022, une faute pouvant entraîner une des sanctions disciplinaires définies par son article 16.

I – Les dispositions portant sur les devoirs généraux liés à la fonction de commissaire de justice.

Ces dispositions se rapportent aux articles 2 à 18 du décret du 29 décembre 2023 sous le Titre I.

L’article 2 touche au devoir d’indépendance du commissaire de justice. Officier public et ministériel, il doit conserver en toutes circonstances la plus stricte indépendance dans l’exercice de ses missions d’auxiliaire de justice, afin de garantir l’impartialité subjective et objective qui est le fondement de la confiance qu’on lui porte.

Il doit s’interdire tout conflit d’intérêts et doit prendre toutes mesures nécessaires pour le prévenir ou le faire cesser.

En cas de doute, il doit s’abstenir ou en référer au président de la chambre régionale ou interrégionale dont il relève.

L’article 3 du décret a trait à la probité, le commissaire de justice devant exercé ses fonctions avec probité et rigueur, dans le strict respect de la règle de droit.

Il doit s’interdire de faire ou de laisser accomplir par autrui des opérations qui lui sont interdites par son statut ou par ses obligations déontologiques.

Il doit apporter son concours au service public de la justice en veillant notamment au respect du principe du contradictoire ainsi qu’à la préservation de la preuve lorsqu’il procède à des constats.

A noter que l’alinéa in fine de cet article 3 renvoie le commissaire de justice à l’obligation veiller avec humanité à la stricte proportionnalité de ses actes.

L’article 4 du décret traite du devoir de confraternité qui s’impose, en toutes circonstances, aux commissaires de justice, lesquels doivent se comporter avec loyauté et courtoisie envers leurs confrères.
Ils se doivent mutuellement conseil, service, soutien et assistance.

Tout en respectant leur devoir de conseil envers les justiciables, ils ne doivent pas porter en aucun cas devant eux une quelconque appréciation sur leurs confrères.

Ils doivent s’interdire de démarcher les clients, donneurs d’ordre ou collaborateurs de leurs confrères.

Ils doivent sur ce point laisser s’exercer le libre choix par le client du commissaire de justice auquel il fait appel.

Ils doivent s’abstenir de démarches tendant à détourner ce choix ou bien encore de tirer profit de manœuvres extérieures qui auraient pour résultat de détourner ce choix.

Sans préjudice de son obligation d’instrumenter, le commissaire de justice qui remplace ponctuellement un confrère doit veiller, avant toute diligence, à le prévenir par écrit.

Il doit s’enquérir en outre des sommes pouvant lui rester dues et le cas échéant, demande à son client de se mettre en règle avec ce confrère.

Il en est de même quand le commissaire de justice recueille la clientèle d’un confrère.

L’article 5 aborde la question du secret professionnel dont est tenu le commissaire de justice, hors les exceptions prévues par la loi.
Cet article rappelle que ce secret couvre tout ce qui a été porté à sa connaissance dans l’exercice de ses fonctions.

Il doit s’assurer que tous ses collaborateurs respectent cette même obligation.

Dans le respect du Règlement général sur la protection des données et de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, le commissaire de justice veille à ce que les moyens de communication qu’il emploie garantissent la confidentialité des échanges et soient sécurisés.

Sauf lorsqu’il recourt à un système fermé sécurisé, il doit utiliser la boîte de messagerie mise à sa disposition ou hébergée par la chambre nationale lorsqu’il échange par voie électronique avec ses confrères ou avec les instances ordinales et lorsqu’il utilise les services et applicatifs numériques de la chambre nationale.

Les personnes qu’il reçoit bénéficient d’un accueil approprié garantissant la confidentialité et le secret professionnel.

Il est indiqué que l’obligation de rendre compte au mandant ou au mandataire principal ne délie pas le commissaire de justice du secret professionnel.

Dans le cadre du recouvrement, amiable ou judiciaire, seules les informations concernant la solvabilité du débiteur, les acomptes versés ou les engagements proposés par celui-ci, ainsi que les démarches ou actes accomplis dans l’intérêt du créancier, peuvent être communiqués à ce dernier ou à son représentant.

Conformément au Règlement général sur la protection des données, l’accès informatique par le client aux éléments d’un dossier ne doit permettre la consultation d’aucune autre information.

L’article 6 concerne le comportement et l’éthique du commissaire de justice qui doit respecter en toutes circonstances, y compris dans sa vie extraprofessionnelle, notamment à travers son comportement, ses propos et l’image qu’il renvoie, la dignité et la discrétion professionnelle qu’imposent ses fonctions.

L’article 7 concerne les conditions dans lesquelles dans lesquelles le commissaire de justice doit accomplir ses mission, c’est-à-dire avec soin et célérité.

Il doit s’assurer que les réclamations adressées à son office sont traitées avec la plus grande attention et sans délai.

Il doit à ce titre concourir avec sincérité et diligence au règlement de ces réclamations ainsi que des plaintes qui le mettent en cause.

L’article 8 impose au commissaire de justice d’avoir un niveau élevé de compétence. Pour ce faire, il doit veiller à la mise à jour régulière de ses connaissances, notamment dans le cadre de la formation professionnelle continue.

II – Les rapports des commissaires de justice avec les parties, traités par les articles 26 a 33 du Titre III.

L’article 26 du décret du 28 décembre 2023 impose aux commissaires de justice une obligation de conseil et de modération envers ses mandants.

Il doit déployer l’activité nécessaire pour remplir la mission qui lui est confiée dans le respect des principes fondamentaux précédemment énoncés.

L’article 27 est un appel à un devoir de vigilance du commissaire de justice. Il doit refuser son ministère si la volonté du mandant ne lui paraît pas libre ou si la mission qu’on entend lui confier est contraire à l’ordre public.

En cas de difficulté, il doit en référer au président de la chambre régionale ou interrégionale dont il relève.

Le dernier alinéa de l’article 27 a trait au risque de conflits d’intérêts. Ainsi, le commissaire de justice ne peut agir pour le compte de clients dont les intérêts sont opposés, ni dans un contexte tel que son indépendance professionnelle pourrait être mise en cause.

L’article 29 impose au commissaire de justice d’agir avec tact, discernement et humanité vis-à-vis des débiteurs, sans mettre en œuvre des mesures disproportionnées.

Il doit leur fournit toutes les explications propres à les éclairer sur leur situation.

L’article 29 impose une obligation d’information. Sauf les cas où il y est autorisé par la loi ou par décision judiciaire, le commissaire de justice ne peut agir sans décliner son nom ou sa dénomination et sa qualité.

L’article 30 aborde la question du rapport contractuel avec le client. Le commissaire de justice peut ainsi conclure une convention de partenariat avec un client, dès lors que celle-ci ne met pas en péril son indépendance, sa rigueur, son intégrité, ni ne déroge aux règles tarifaires, procédurales et déontologiques.

Lorsque cette convention de partenariat s’inscrit dans le champ d’une convention cadre conclue par la chambre nationale ou sur laquelle celle-ci a émis un avis favorable, elle ne peut déroger à la convention cadre.

Le chapitre II du Titre III aborde les rapports des commissaires de justice avec les tiers.

L’article 31 précise que le commissaire de justice doit agir, en toutes circonstances, avec respect et délicatesse, notamment dans ses rapports avec les justiciables et les autorités judiciaires.

Il doit veiller à la probité et à la discrétion des personnes dont il est conduit à réclamer l’assistance ou le concours.

Il doit leur rappeler, si besoin est, les limites de leur intervention ainsi que les contraintes liées à la mission à laquelle ils collaborent.

L’article 32 a trait aux relations avec les sociétés de recouvrement. Dans le cadre des relations que le commissaire de justice peut entretenir avec une société commerciale lui fournissant des biens ou des services nécessaires au fonctionnement matériel de son office, il ne peut déléguer à cette société aucune des prérogatives liées à ses fonctions d’officier public et ministériel.

L’intervention d’une société de services dans les relations entre le commissaire de justice et son client ne doit pas conduire à un abandon de l’indépendance ou à un détournement de la fonction qu’il exerce.

L’article 33 prohibe le partage d’émoluments avec tout autre professionnel qu’un commissaire de justice et toute rétrocession d’honoraires est interdite.

Ce décret énonce donc les grands principes applicables aux commissaires de justice dans leurs relations avec notamment les justiciables.

Il s’inscrit dans l’exigence de transparence des professions règlementées posée par le législateur dans l’article 41 de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire [2]

En effet, cette loi a imposé à chaque instance nationale de chaque profession règlementée d’édicter un code de déontologie permettant d’assurer une meilleure transparence dans les relations des professionnels concernés principalement avec leurs clients.

Il est à relever que l’article 25 du décret créé un collège de déontologie des commissaires de justice, placé auprès de la chambre nationale. Il émet un avis sur les questions déontologiques de principe dont il est saisi. Son fonctionnement est régi par son règlement intérieur publié sur le site intranet de la chambre nationale.

Conformément à l’article 35 du décret du 28 décembre 2023, le Code de déontologie des commissaires de justice entre en vigueur à compter du vendredi 1er mars 2024.

Patrick Lingibé
Membre du Conseil National des barreaux
Ancien vice-président de la Conférence des bâtonniers de France
Avocat associé Cabinet Jurisguyane
Spécialiste en droit public
Diplômé en droit routier
Médiateur Professionnel
Membre de l’Association des Juristes en Droit des Outre-Mer (AJDOM)
www.jurisguyane.com

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Notes de l'article:

[1Ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 relative à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels, Journal Officiel du 14 avril 2022.

[2Loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire, Journal Officiel du 23 décembre 2021.

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