De nombreux salariés ont une connaissance superficielle du CSE de leur entreprise ou parfois l’assimilent à un simple guichet proposant diverses activités sociales. Pourtant, c’est un outil indispensable et stratégique offrant aux salariés un meilleur équilibre entre le pouvoir de l’employeur et les droits des salariés en plus des divers avantages que sont les activités sociales et culturelles.
Le Comité Social et Économique (CSE) regroupe les fonctions des anciens CE en intégrant les fonctions de délégués du personnel et celle des Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Il est composé de l’employeur et une délégation du personnel, élue lors des dernières élections professionnelles dans l’entreprise. L’élection a lieu tous les 4 ans.
Le CSE a pour mission de présenter les requêtes individuelles ou collectives à l’employeur et se réunit tous les mois pour traiter de différents points. Le CSE promeut la santé, la sécurité et les conditions de travail dans l’entreprise, réalise des enquêtes en matière d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel et enfin est aussi informé et consulté sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise ( Cf Article L2312-11 et suivant du code du travail ).
Les attributions du CSE portent également sur la gestion des Activités Sociales et Culturelles (ASC) : « Le comité social et économique assure, contrôle ou participe à la gestion de toutes les activités sociales et culturelles établies dans l’entreprise prioritairement au bénéfice des salariés, de leur famille et des stagiaires, quel qu’en soit le mode de financement… » (Cf Article L2312-78 du Code du travail).
Dans les faits, les salariés ont tendance à identifier ou à rattacher uniquement le CSE aux seules activités ASC en raison parfois de la diversité des activités proposées aux salariés. On peut citer : les voyages organisés par le CSE , la billetterie, les chèques vacances, les chèques CESU, le chèque déjeuner et autres.
Toutes ces activités permettent aux salariés de bénéficier de réductions intéressantes, d’avantages sociaux ou de participations financières du CSE.
Il est donc intéressant de rappeler quels sont les moyens financiers dont dispose le CSE pour réaliser ses différentes missions et qui peuvent être regroupées en deux grands pôles : la mission de fonctionnement du CSE et les missions d’activités sociales.
Le CSE bénéficie de différents moyens pour exercer ses missions. Ces moyens sont principalement mis à disposition par l’employeur et déterminés en fonction de l’effectif de l’entreprise.
C’est dans cet esprit que le CSE est doté d’un budget de fonctionnement et d’un budget ASC.
Conformément à l’article L2315-61 du code du travail : « L’employeur verse au comité social et économique une subvention de fonctionnement d’un montant annuel équivalent à :
– 0,20 % de la masse salariale brute dans les entreprises de cinquante à moins de deux mille salariés ;
– 0,22 % de la masse salariale brute dans les entreprises d’au moins deux mille salariés ».
Qu’en est-il du budget des ASC qui nous intéresse dans mon propos et qui parfois sert aux salariés à classer les CSE entre eux ?
En ce qui concerne ce budget, le Code du travail renvoie les entreprises et les organisations syndicales représentatives à la négociation d’un accord d’entreprise : « La contribution versée chaque année par l’employeur pour financer des institutions sociales du comité social et économique est fixée par accord d’entreprise... ».
C’est grâce à cela que dans certaines entreprises, le CSE propose des activités diversifiées et très attractives. En effet, les syndicats ont négocié la mise en place d’un accord d’entreprise doté de moyens importants permettant au CSE de mener des activités sociales et culturelles intéressantes pour les salariés.
Au prix d’un bon et solide dialogue social, Certaines entreprises y voient une manière de garder les salariés, de renforcer le sentiment d’appartenance à l’entreprise et aussi de remercier la fidélité des salariés.
La question importante est de savoir si les salariés doivent bénéficier de ces activités sociales et culturelles du CSE sans aucun critère dont celui de l’ancienneté ?
Pendant très longtemps, ce point relevait de l’appréciation de chaque CSE qui déterminait à la majorité des délibérations les critères d’attribution permettant aux salariés de bénéficier des ASC. La seule limite était de fixer les critères de façon objective et légitime sans aucune forme de discrimination liée au statut, à l’ethnie, à la religion et au sexe.
Les critères liés à l’ancienneté minimale étaient souvent pratiqués, généralement de 6 mois, c’est le cas par exemple de certains comités d’entreprise de la société Lidl France. Ce critère est d’ailleurs celui validé par l’administration.
Pendant très longtemps, les juridictions ont admis que l’ancienneté n’était pas un critère discriminant par le seul fait qu’il s’appliquait à tous les salariés. Depuis la décision du 3 Avril 2024 de la Cour de cassation (Cass. soc., 3 avril 2024, N* 22-16.812), la haute juridiction tranche pour la première fois et énonce clairement que le CSE ne peut fixer, même dans le cadre d’un règlement intérieur, de notion d’ancienneté minimale pour qu’un salarié puisse bénéficier des activités sociales et culturelles.
Cette décision a un sens et une portée très particulière. Elle pourra dans certains cas amener certains CSE et employeurs à repenser leur modèle de fonctionnement pour trouver un véritable équilibre social. En effet, elle impliquera chaque salarié dans la vie de l’entreprise dès son premier jour (car il ne sera exclu d’aucun avantage ASC) mais pourra également être un levier pour réduire efficacement le « turn-over » dans certaines entreprises.
Dans les entreprises avec un taux élevé de « turn-over », la question de financement des activités sociales et culturelles peut susciter un débat dans les prochains jours. Allons-nous vers à la remise en question de certains accords d’entreprise ?
En cette période de forte inflation, dans certaines grosses entreprises, les nouveaux embauchés pourront largement bénéficier de cette décision de justice qui pourrait donc s’analyser comme une évolution naturelle en lien avec le contexte actuel du pouvoir d’achat.
Pour ce qui est des Petites et Moyennes Entreprises, il est un fait qu’il s’agit d’une vague de fond permettant l’apparition d’une nouvelle façon de formaliser les relations patron/employés qui peut également être un ticket « gagnant/gagnant ».
Au-delà du droit, pouvons-nous affirmer que nos magistrats ont été influencés par la conjoncture actuelle ?
Discussion en cours :
Cher Monsieur,
Merci pour la qualité de votre article. Il est très complet et accessible !
Bien à vous