Les congés payés et la maladie : l'histoire de la poule et de l'œuf. Par Cathy Clairet Roig, Avocat.

Les congés payés et la maladie : l’histoire de la poule et de l’œuf.

Par Cathy Clairet Roig, Avocat.

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Explorer : # congés payés # maladie # droit du travail # obligations de l'employeur

En cette période estivale, un petit rappel sur les droits à congés payés des salariés et sur les obligations de l’employeur.

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- Droit à congés payés : la condition de travail effectif pendant 10 jours n’est plus nécessaire

Depuis le 1er juin 2012, il est prévu que le salarié a le droit à deux jours et demi de congés payés par mois de travail effectif, la durée totale du congé exigible ne pouvant excéder trente jours ouvrables (article L. 3141-3 du Code du Travail).

Cette modification du droit français, introduite par la loi n°2012-387 du 22 mars 2012, fait suite à un arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne en date du 21 janvier 2012 (aff. C-282/10, Maribel Dominguez c. Centre informatique du Centre Ouest Atlantique et Préfet de la région Centre).

En effet, la Cour de justice de l’Union européenne s’était prononcée lors de sa saisie relative à une question préjudicielle posée à la Cour de justice de l’Union européenne sur la compatibilité des dispositions de l’article 7 de la Directive européenne n°2003/88 en date du 4 novembre 2003 qui prévoit que « les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines, conformément aux conditions d’obtention et d’octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales » (article 7).

On se souvient de la rédaction de l’article L. 3141-3 du Code du travail avant l’entrée en vigueur de cette loi :« Le salarié qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail »(art. 22 de la loi n°2008-789 du 20 août 2008).

Ainsi, l’obligation faite au salarié d’avoir dix jours de travail consécutifs chez un employeur pour bénéficier de ses congés payés n’est pas valable.

- Congés payés et maladie : le salarié malade pendant ses congés payés n’est plus en congé

De même, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) est intervenue récemment pour préciser qu’un salarié tombant malade alors qu’il est en congés payés peut reporter les jours de congés dont il n’a pas pu bénéficier du fait de sa maladie (CJUE, 21 juin 2012, aff. C-78/11, Anged).

Le juge communautaire reconnait le droit au report des congés payés aux salariés malades indépendamment du moment où la maladie survient.

Or, en droit français, la priorité est donnée à la première cause de suspension du contrat de travail :

-  Si le salarié tombe malade avant ses vacances, il ne les perd pas et peut les reporter en dehors de la prise de ses congés. En cela, la cour de cassation a rejoint la CJUE (Cass Soc 24 février 2009, n°07-44.488 ; Cass Soc 28 sept 2011, n°09-70.612). La maladie prime sur les congés payés.

-  En revanche, si le salarié tombe malade pendant ses congés payés, il ne peut exiger de prendre ultérieurement le congé dont il n’a pu bénéficier du fait de son arrêt de travail, sauf accord de l’employeur. La première cause de suspension du contrat de travail prime.

Cette position devrait sans aucun doute évoluer compte tenu de l’arrêt ci-avant mentionné pour permettre la mise en conformité du droit français avec la jurisprudence communautaire.

- Rappel des obligations de l’employeur en matière de congés payés vis-à-vis de ses salariés

En attendant, il serait que trop conseillé à l’employeur de s’assurer de la prise effective des congés par le salarié.

Un arrêt récent de la Cour de cassation en date du 13 juin 2012 –constituant un revirement de jurisprudence – a pu retenir qu’ « il appartient à l’employeur de prendre toutes les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé et, en cas de contestation, de justifier qu’il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement » (Cass. Soc. 13 juin 2012, n°11-10.929, Barthélémy c/Sté Médiapost).

En effet, antérieurement, la charge de la preuve revenait au salarié et ce dernier se devait de prouver la faute de son employeur afin d’obtenir des dommages et intérêts correspondant aux congés non pris (Cass. Soc. 6 mai 2002, n°00-41.401, CRAM du Centre c/ Remondeau).

Pour mémoire, toute infraction aux dispositions légales et réglementaires sur les congés payés est passible d’une amende maximale de 1.500 € pouvant être portée à 3.000 € en cas de récidive dans le délai d’un an (article R.3143-1 du Code du Travail).

- A titre de conclusion : attention aux congés dit « spéciaux »  !

Enfin, l’attention des employeurs sera également attirée sur les congés dit « spéciaux », qui ne sont pas en reste du côté de la jurisprudence :

-  L’employeur ne peut pas refuser un congé parental même en cas de non-respect du délai de prévenance. (Cass. Soc. 25 janvier 2012 n° 10-16.369, Sté Riou Vetillard Tombeck SCP c/ Marois)

Dès lors que la salariée réunit les conditions pour bénéficier d’un congé parental d’éducation l’employeur ne saurait la licencier sous prétexte qu’elle l’a informé tardivement de son absence.

Ce congé étant de droit, l’employeur ne peut donc pas s’y opposer dès lors que l’intéressé remplit les conditions requises. Même si le Code du travail prévoit un délai de prévenance, son non-respect n’est pas sanctionné par une irrecevabilité de la demande.

L’employeur ayant été informé in fine de la raison de l’absence, celle-ci était considérée comme régulière donc étrangère à toute cause de licenciement….

-  La date choisie par le salarié pour son congé de paternité s’impose à l’employeur (Cass. Soc. 31 mai 2012 n° 11-10.282, Sté Côté Fjord c/ Milet)

Dès lors qu’il a été régulièrement informé par le salarié de la date de son congé de paternité (un mois de prévenance pendant les 4 mois à compter de la naissance), l’employeur ne peut s’opposer à son départ, ni exiger un report de cette absence.

Cathy Clairet Roig,
Avocat
E-mail : cathy.clairet chez cuatrecasas.com
Web : www.cuatrecasas.com

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