Le droit français accorde une protection particulière aux salariées durant leur congé maternité. Toutefois, la question de l’évolution salariale pendant cette période suscite des débats. En l’absence d’un accord collectif plus favorable, le dispositif légal de garantie d’évolution salariale ne s’applique qu’à l’issue du congé maternité.
La suspension du contrat de travail pendant le congé maternité.
Selon l’article L1225-4 du Code du travail, le contrat de travail est suspendu pendant le congé maternité. Cette suspension implique que la salariée n’est pas tenue de fournir sa prestation de travail, et l’employeur n’est pas tenu de verser le salaire correspondant. Cependant, la salariée bénéficie d’indemnités journalières de la Sécurité sociale, assurant un revenu de remplacement.
Le dispositif légal de garantie d’évolution salariale.
L’article L1225-26 du Code du travail prévoit que, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, la rémunération de la salariée est majorée, à l’issue de son congé maternité, des augmentations générales ainsi que de la moyenne des augmentations individuelles perçues pendant son absence par les salariés de la même catégorie professionnelle. Ce mécanisme vise à éviter que la salariée ne subisse un préjudice financier du fait de son congé.
Application différée du rattrapage salarial.
Il est essentiel de noter que ce rattrapage salarial ne prend effet qu’au retour de la salariée. Durant le congé maternité, le contrat étant suspendu, elle ne bénéficie pas immédiatement des augmentations intervenues. Cette position a été confirmée par la Cour de cassation dans un arrêt récent [1], où les juges ont estimé que le dispositif légal s’applique uniquement à l’issue du congé.
Illustration jurisprudentielle.
Dans l’affaire précitée, une salariée contestait le fait de ne pas avoir reçu une augmentation salariale accordée à ses collègues pendant son congé maternité. La Cour de cassation a rejeté sa demande, soulignant que l’article L1225-26 du Code du travail prévoit l’application du rattrapage salarial uniquement après le retour de la salariée. Ainsi, l’employeur n’était pas tenu de lui accorder l’augmentation pendant la suspension de son contrat.
Le rôle des accords collectifs plus favorables.
Les dispositions légales constituent un socle minimal. Les accords collectifs de branche ou d’entreprise peuvent prévoir des garanties d’évolution salariale plus favorables pendant le congé maternité. Par exemple, certaines conventions collectives stipulent que les salariées continuent à bénéficier des augmentations salariales pendant leur absence. Il est donc crucial pour les salariées de consulter les accords applicables dans leur entreprise.
La responsabilité de l’employeur en cas de travail pendant le congé.
L’exécution d’une prestation de travail pendant la suspension du contrat engage la responsabilité de l’employeur. En vertu de l’article 1231-1 du Code civil, cette situation se résout par l’allocation de dommages-intérêts en indemnisation du préjudice subi. Comme l’a rappelé la Cour de cassation [2], l’employeur ne peut solliciter une salariée pendant son congé maternité sans contrevenir aux dispositions légales.
Le principe de non-discrimination.
L’article L1132-1 du Code du travail prohibe toute discrimination fondée sur la grossesse ou la maternité. Priver une salariée des augmentations salariales dont bénéficient ses collègues pendant son congé peut être perçu comme une discrimination. Toutefois, si l’employeur respecte le dispositif légal et applique le rattrapage salarial à l’issue du congé, il ne contrevient pas à ce principe.
Les obligations de l’employeur à l’issue du congé.
Au retour de la salariée, l’employeur doit réintégrer celle-ci dans son poste ou un poste équivalent, avec une rémunération au moins équivalente [3]. Il doit également appliquer le rattrapage salarial prévu par l’article L1225-26, incluant les augmentations générales et la moyenne des augmentations individuelles intervenues pendant le congé.
Les primes et autres avantages.
La question se pose concernant les primes liées à la performance ou à l’assiduité. La jurisprudence considère que certaines primes peuvent ne pas être dues pendant le congé maternité si elles sont directement liées à la présence effective de la salariée.
En revanche, les primes à caractère collectif ou les avantages acquis doivent être maintenus ou rattrapés à l’issue du congé.
Les recours en cas de non-respect des obligations.
Si l’employeur ne respecte pas ses obligations, la salariée peut saisir le conseil de prud’hommes pour faire valoir ses droits. Elle peut demander le versement des sommes dues et des dommages-intérêts pour le préjudice subi. Comme l’a souligné la Cour de cassation [4], l’absence de rattrapage salarial constitue un manquement de l’employeur.
La protection contre le licenciement.
Durant le congé maternité, la salariée bénéficie d’une protection renforcée contre le licenciement [5]. Cette protection s’étend jusqu’à dix semaines après le retour. L’employeur ne peut rompre le contrat que pour faute grave non liée à la maternité ou en cas d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse.
Conclusion.
Le dispositif légal de rattrapage salarial après un congé maternité est une mesure essentielle pour garantir l’égalité professionnelle. Toutefois, son application différée peut engendrer des incompréhensions. Il est donc primordial pour les employeurs de respecter scrupuleusement leurs obligations et pour les salariées de connaître leurs droits afin d’assurer une reprise sereine de leur activité professionnelle.