- Jean-François Funck
Jean-François Funck est Juge au tribunal de l’application des peines de Bruxelles. Ancien président de l’Association syndicale des magistrats, il a initié ce projet qui remonte à l’année 2000, et qui s’inscrit dans le prolongement de l’affaire Dutroux et des bouleversements qu’elle a engendrés dans le monde judiciaire belge, et notamment la nécessité de rendre la Justice plus compréhensible.
Il nous explique : « Le groupe de travail était composé d’avocats, d’huissiers, de magistrats et d’un linguiste.
L’idée : rendre plus compréhensible le langage judiciaire. Et rendre compréhensible, cela peut se faire de deux manières :
expliquer le vocabulaire, et donc il faudra un effort de citoyen ;
ou l’inverse : que les magistrats fassent l’effort pour être plus compréhensibles. Tel a été notre choix.
Ce dont nous nous sommes rendus compte en travaillant sur ce projet c’est que nous avions l’habitude d’utiliser des formules compliquées, absolument pas dans le langage courant. Nous "faisions du Proust" finalement !
Donc le premier effort, possible, c’est simplement d’utiliser des mots de la langue courante, sans appauvrir pour autant le langage juridique.
Notre méthodologie a consisté à lire les décisions judiciaires, phrase après phrase, et à les réécrire de façon simplifiée... »
Le résultat, le voici traduit dans l’ouvrage intitulé :
"Dire le droit et être compris. Comment rendre le langage judiciaire plus accessible. Guide pour la rédaction des actes judiciaires. "
Et c’est un réel beau travail que l’association syndicale des magistrats présente à travers cet ouvrage.
Si la seconde partie s’attèle à décortiquer les actes judiciaires en eux-mêmes (en matière civile et pénale) [1], la première partie, plus généraliste, donne quant à elle une ligne de conduite et de nombreux exemples de formulations, de termes et de tournures de phrases à éviter, ainsi que des solutions pour les remplacer.
Il est important de préciser qu’il est tout à fait possible que vous soyez amusés à plusieurs reprises par les exemples de phrases soulevés, tant il vous sautera aux yeux, ainsi mis en exergue, que ces phrases sont à la fois peu compréhensibles et parfois risibles... mais que vous les avez sans doute déjà utilisées !
A souligner d’ailleurs : cet ouvrage, destiné initialement aux magistrats, ne leur est pas pour autant réservé. Il intéressera tous ceux qui souhaitent professionnellement se faire entendre et comprendre du plus grand nombre, et qui accepteront de réserver les tournures de phrases plus littéraires à d’autres écrits...
A titre d’exemples : la syntaxe étrangère au français courant...
...et le casse-pipe de la double négation :
A lire aussi : le témoignage de Stéphane Wegner, magistrat (Vice-président du Tribunal administratif de Grenoble) et Anne Vervier, linguiste, Experte en communication écrite et en langage clair, qui ont relevé le défi : expliquer en quoi consiste le langage juridique clair, énumérer ses bénéfices et surtout démontrer, par l’exemple, comment (ré) écrire une décision de Justice en langage clair pour ses destinataires : les justiciables.
L’article (dont le titre est directement inspiré de l’ouvrage ici évoqué) est à lire là.
Et dans le même ordre d’idée : Du côté de la France, un lexique administratif édité par le Ministère de la fonction publique et de la réforme de l’État à retrouver ici. Il présente les termes les plus souvent utilisés par l’Administration et propose des mots et expressions pour les remplacer.
Informations techniques :
Titre : Dire le droit et être compris. Comment rendre le langage judiciaire plus accessible. Guide pour la rédaction des actes judiciaires.
Auteur : Association syndicale des magistrats
Éditeur : Bruylant et Anthémis.
ISBN : 978-2-8072-0336-5
Prix : 41 euros
Nombre de pages : 156
Parution : 15/12/2017