Les garanties bancaires en droit mauritanien : efficacité des sûretés personnelles et rôle de la Banque Centrale ?

Par Moussa Eba.

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Explorer : # sûretés personnelles # cautionnement # garantie à première demande # banque centrale

Les hypothèses de la prise en compte des exceptions de l’obligation principale en matière des sûretés personnelles et les cas d’inexécution injustifiée, notamment en matière bancaire et financière justifie la question du rôle de la Banque Centrale, garant du bon fonctionnement du système bancaire et financier !

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Les sûretés personnelles les plus importantes en droit mauritanien, mais aussi les plus utilisées par les banques, sont le cautionnement et la garantie autonome ou la garantie à première demande. Ces deux mécanismes permettent au créancier d’une obligation d’être payé par une tierce personne étrangère à l’obligation principale, mais l’un d’entre eux est indépendant par rapport à cette obligation !
Le cautionnement est le mécanisme légal et traditionnel le plus utilisé dans la vie personnelle et civile, alors que la garantie autonome ou la garantie à première demande est une création de la pratique du commerce international. Dans ce dernier domaine, l’obligation de garantie du fournisseur à l’égard du client est souvent insuffisante. Les acteurs économiques ont ainsi inventé cette technique afin d’engager une tierce personne disposant d’une surface financière indiscutable d’apporter sa garantie financière à l’opération avec un paiement irrévocable.

Cautionnement et garantie à première demande, quelle différence ?

Le cautionnement est un contrat civil, en principe, et à titre gratuit. L’article 1049 du Code civil définit ce mécanisme comme la convention par laquelle une personne s’oblige envers le créancier à satisfaire à l’obligation du débiteur, si celui-ci n’y satisfait pas lui-même.
Par ailleurs, née de la pratique commerciale, la garantie à première demande est une technique commerciale, connue sous plusieurs appellations : certaines législations retiennent le caractère distinctif « garantie à première demande » et d’autres le support contenant « lettre de garantie »...
Le Code de commerce mauritanien a traité la lettre de garantie dans le chapitre XI du Titre III réservé aux contrats bancaires. L’article 1104 la définit comme la convention par laquelle, à la requête ou sur instruction du donneur d’ordre, le garant s’engage à payer une somme déterminée au bénéficiaire, sur première demande de la part de ce dernier. Elle ne peut être souscrite que par des personnes morales ayant une activité économique, sous peine de nullité (art 1105 du Code de commerce).

En matière du cautionnement, l’obligation de la personne qui s’engage est accessoire à l’obligation du débiteur (art 1049 du Code des contrats et des obligations). La caution se soumet envers le créancier à satisfaire à une obligation, si le débiteur n’y satisfait pas lui-même. Elle s’oblige à payer la dette du débiteur principal et peut, de ce fait, opposer au créancier les exceptions que le débiteur lui-même peut ou aurait pu opposer. Il existe un lien de dépendance entre l’obligation de la caution et celle du débiteur principal, en sorte que l’engagement de la première a un caractère accessoire par rapport à ceux du second.
Par ailleurs, en ce qui concerne la garantie à première demande, l’obligation de la personne qui s’engage à payer est une obligation autonome par rapport à l’obligation du débiteur. L’article 1105 du Code de commerce précise qu’il s’agit d’un engagement autonome, distinct de la convention, de l’acte et du fait susceptibles d’en constituer la base.
Par conséquent, à la différence du cautionnement, le bénéficiaire de la garantie autonome à première demande n’a pas besoin de prouver l’inexécution de l’obligation garantie pour obtenir son paiement. La garantie à première demande doit être exécutée conformément à ses stipulations.

Mais, quoi faire en cas de refus de règlement injustifié ?

La première de chose à faire est de notifier au garant, si la somme dépasse 50.000 UM, par exploit d’huissier, qu’à défaut de paiement dans un délai franc de 7 jours, la procédure de l’injonction de payer sera suivie à son encontre (article 250 du Code de procédure civile, commercial et administratif).
À défaut de règlement dans le délai de 7 jours, le bénéficiaire peut, par une procédure d’urgence, demander l’exécution forcée devant le président du tribunal du commerce (article 27 pour la compétence du tribunal et 249 et suivant du Code de procédure civile, commerciale et administrative).

L’article 252 du Code de PCCA dispose que la demande est formée par requête rédigée en double exemplaire adressée ou remise au greffier par le créancier ou par son mandataire. Elle contient :
- les nom, prénoms, profession, domicile des demandeurs et des défendeurs ;
- l’indication précise du montant exact de la somme réclamée ainsi que le fondement de créance.
Il faudra demander dans cette requête l’injonction de payer, mais aussi la saisie entre les mains d’un tiers qui permettrait au bénéficiaire de saisir tous les biens du garant détenus par le tiers y compris le solde de compte bancaire. Mais, qu’en est-il lorsque le tiers détenteur est la Banque Centrale, garant du bon fonctionnement du système bancaire et financier ?

Responsabilité et pouvoirs de la Banque Centrale

Il convient tout d’abord de préciser que la Banque Centrale est soumise au respect des décisions judiciaires prononçant la saisie sous les mains de tiers.
En outre, en tant que garant du bon fonctionnement du système bancaire et financier, la Banque Centrale doit mettre la pression sur les établissements de crédit qui nuisent à la confiance nécessaire au bon fonctionnement du système bancaire et financier. L’article 55 de l’ordonnance 2007-020 portant réglementation des établissements de crédit lui donne une habilitation générale pour appliquer l’une des sanctions prévues en cas de non-respect des textes législatifs et réglementaires en vigueur. Il s’agit, notamment du l’avertissement ou la mise en garde, du blâme, de l’injonction ou mise en demeure, amendes, de la suspension de certaines opérations, la nomination d’un administrateur provisoire, de l’interdiction provisoire ou définitive de certaines opérations et toutes autres limitations dans l’exercice de la profession, de la suspension d’un dirigeant avec ou sans nomination d’administrateur provisoire et du retrait d’agrément.

À part cette habilitation générale, la question qui se pose est celle de savoir si la Banque Centrale peut débuter directement le compte des établissements de crédit qui refuse injustement de régler une garantie à première demande sans décision judiciaire ?
La réponse à cette question est incertaine dans la situation actuelle des textes en vigueur. Mais, il serait plus prudent et plus pragmatique de prononcer une sanction pécuniaire ou une injonction de faire avec une astreinte dissuasives.

Moussa EBA

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