Un litige avec le RSI, l’URSSAF, la CAF... ?

Par Perrine Athon-Perez, Avocat.

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Explorer : # litiges sociaux # recours administratif # expertise médicale # tribunal des affaires de sécurité sociale

Rappel sur les actions à mener en cas de contentieux avec un organisme social.

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Les litiges avec les organismes sociaux sont légion. Professionnel indépendant, commerçant, artisan ou même particulier, il arrive malheureusement bien trop souvent d’être confronté aux erreurs du RSI, de l’URSAFF, de la CAF ou de tout autre organisme social.

Pire, même lorsque l’erreur est évidente ou grossière, il faut bien admettre qu’il reste difficile de se faire entendre et de permettre que l’affaire ne se résolve avant la phase contentieuse. Il s’instaure parfois une sorte de dialogue de sourds entre l’affilié et l’organisme de sorte que les réclamations de l’affilié – écrites ou orales- ne sont pas toujours prises en compte.

Voici quelques fondamentaux à connaitre en cas de contentieux avec un de ces organismes.

1. Quels litiges et quelle réglementation ?

Ces litiges sont pour la plupart soumis au Code de la sécurité sociale (CSS) au titre de ce qui y est désigné comme le « Contentieux général » (art. L. 142-1 et suivants CSS).
Ils concernent alors :
-  l’affiliation
-  les cotisations
-  les prestations (maladie-maternité, vieillesse-invalidité-décès, allocations familiales …….) pour l’application des législations de Sécurité sociale.
-  la CSG et à la CRDS

Attention, pour les litiges de santé entre la caisse et l’assuré, il convient de faire une expertise médicale avant de saisir le Tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) compétent (art. L 141-1 et suivant CSS).
Le contentieux général comprend une phase administrative obligatoire devant la commission de recours amiable (CRA) et, éventuellement, une phase judiciaire devant le TASS. Mais les litiges de santé entre la caisse et l’assuré relèvent d’une procédure spécifique : l’expertise médicale.

2. Le parcours « classique » en deux phases

Soumis au régime du recours administratif préalable obligatoire (RAPO), ces contentieux se déroulent donc pour la plupart en deux phases.
Pour contester une décision estimée illégale du RSI, de l’URSSAF ou de la CAF, il convient de saisir d’abord la CRA avant d’enclencher la phase judiciaire devant le TASS.

- La phase précontentieuse devant le Commission de recours amiable ( art. R. 142-1 et suivants CSS) en bref :

La CRA est un organisme administratif.
En toute logique, il convient d’adresser son recours à la CRA de l’organisme qui a pris la décision contestée.
La CRA doit impérativement être saisie dans les 2 mois qui suivent la notification de la décision contestée.
Lorsque le litige concerne une décision URSSAF, une majoration ou des pénalités de retard, la CRA doit être saisie dans le délai d’1 mois à compter de la notification de la décision (mise en demeure) (art. R. 142-1 CSS).
La CRA va étudier le dossier, il convient de s’assurer que le recours est complet en termes d’argumentation et de pièces.
La CRA rend normalement sa décision dans le délai d’1 mois à partir de la réception de la demande (qu’il aura été utile d’envoyer par un courrier recommandé). Passé le délai d’un mois, le silence de la CRA signifie que la demande est rejetée.
La décision doit être motivée et indiquer les délais et les modalités de recours devant le TASS.
Enfin, il doit être précisé que lorsque l’organisme social a émis un titre exécutoire, il n’est pas nécessaire de soumettre son action à cette première phase précontentieuse (cf. ci-dessous).

-  La phase contentieuse devant le Tribunal des affaires de Sécurité sociale (TASS)

Si la phase précontentieuse n’a pas abouti, ne reste donc plus d’autre choix que celui de saisir le TASS.
Le TASS est présidé par un magistrat professionnel assisté d’un assesseur représentant des travailleurs indépendants. Il peut ordonner un complément d’instruction ou une expertise judiciaire. Il ne statue qu’après s’être efforcé d’avoir fait concilier les parties (art. R 142-21 CSS).
La compétence territoriale est définie par les articles R. 142-12 et R. 142-18 CSS (en général en fonction du domicile du demandeur).
Le TASS est saisi par lettre déposée ou envoyée au greffe (le courrier recommandé avec accusé de réception reste préférable) dans les 2 mois à compter de la notification de la décision de la CRA (explicite ou implicite).
L’affaire est inscrite à une audience à laquelle le demandeur est convoqué au moins 15 jours avant. Il comparait personnellement ou représenté, notamment par un avocat.

L’appel doit intervenir dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision du Tribunal. Toutefois, les voies de recours varient selon la nature et le montant de l’affaire. Ainsi par exemple, les décisions du TASS portant sur un montant inférieur à 4 000 euros ne peuvent être contestées que devant la Cour de cassation.

3. Les autres hypothèses

- L’hypothèse de l’opposition à contrainte (art. R133-3 et suivants CSS)

Comme évoqué, il existe une hypothèse précise dans laquelle il n’est pas nécessaire de saisir la CRA pour se défendre face à un organisme social. Il s’agit du cas où l’organisme a adressé à l’assuré/affilié une mise en demeure mais ce dernier n’a ni saisi la CRA dans le délai imparti, ni procédé au paiement des sommes réclamées. L’organisme risque alors d’engager une procédure dite de contrainte à son encontre.
L’acte de contrainte est un titre exécutoire produisant les mêmes effets qu’une décision de justice s’il n’est pas contesté.

Comment faire une opposition à contrainte ?

S’il estime que la somme est réclamée à tort par l’organisme, le cotisant doit former opposition par inscription auprès du secrétariat du TASS dans le ressort duquel il est domicilié dans les 15 jours à compter de la signification.
L’opposition doit être motivée et il faut y joindre une copie de la contrainte contestée (circulaire n° 2011/35 du 2 mai 2011 Caisse nationale d’assurance vieillesse).
La décision rendue sur opposition à contrainte est exécutoire de droit à titre provisoire (art. R 133-3 CSS). Elle est susceptible des voies de recours dans les mêmes conditions que les décisions du TASS.

- Les cas particulier de l’expertise médicale

Pour mémoire, le recours à un médecin expert est obligatoire en cas de contestation d’une décision relative à l’état de santé ou à la prise en charge thérapeutique d’une personne malade (avis de fin de versement d’indemnités journalières lorsqu’un arrêt de travail n’est plus justifié, sur le refus d’exonération du ticket modérateur au titre d’une affection de longue durée, …).
L’expertise est effectuée soit à la demande de la caisse primaire d’assurance maladie, soit de l’assuré. Si c’est ce dernier qui prend l’initiative, il doit adresser sa demande par lettre recommandée avec accusé de réception.
L’avis de l’expert s’impose à l’assuré comme à la caisse. Cette dernière notifie sa décision à l’assuré dans les quinze jours qui suivent.
Le juge peut toutefois ordonner un complément d’expertise à la demande d’une partie ou à sa demande, mais l’expertise est alors soumise à des règles particulières. Si l’assuré conteste la décision de l’expertise médicale, il doit saisir suivant les cas la CRA ou le tribunal du contentieux de l’incapacité.

4. La compétence d’autres juridictions que le TASS

A toutes fins utiles, il sera enfin précisé que d’autres juridictions que le TASS connaissent des recours impliquant les organismes sociaux.
C’est notamment le cas du tribunal du contentieux de l’incapacité compétent pour connaître du contentieux technique en cas d’invalidité et pour les cotisations d’accident du travail. (art. L 143-2 et suivant CSS).

Le juge administratif est également compétent. C’est entre autres le cas pour les contentieux concernant les pénalités pour les irrégularités, fausses déclarations et fraudes visées à l’article L 162-1-14 CSS (Tribunal des conflits, 6/07/2009, n° 3696) ou encore pour ceux relatifs au contrôle sur les prescriptions d’un médecin (Conseil d’État, 04/05/2011, n°341407).

Me Perrine ATHON-PEREZ
Avocate à la Cour
Cabinet ATHON-PEREZ
contact chez padp.fr
www.athon-perez-avocat.com

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Discussions en cours :

  • Bonjour Maître,
    Merci pour vos explications, très claires et très utiles.
    J’ajouterai simplement qu’une partie du contentieux social peut se dérouler devant les tribunaux administratifs.
    A cet égard, il convient de relever que l’appel sera supprimé à compter du 1er janvier 2014 pour les contentieux sociaux soumis au juge administratif (APL, RSA...).
    Il conviendra donc, encore plus qu’avant, de soigner les recours soumis au juge, en n’hésitant pas à faire appel à des avocats, bien entendu, ou à des associations d’usagers.
    Christophe
    Président de l’Association de Défense des Usagers de la CAF (ADUCAF)
    Notre site Internet : aducaf.org

    • par Jean , Le 7 juillet 2015 à 13:34

      Bonjour,

      une contrainte pour laquelle il y a eu opposition n’est pas exécutoire.
      une contrainte pour laquelle opposition n’a pas été formée pendant les 15 jours prévus devient exécutoire.

      pendant les 15 jours la contrainte n’est pas un titre.
      pourtant certains huissiers n hésitent pas à faire une saisie conservatoire fondée sur aucun titre.

      Que dit exactement la loi ?
      Que risque un huissier/un créancier qui bloque un compte d’entreprise de la sorte (a priori illégalement) ?

      A ce sujet, pouvez vous lever l’ambiguïté de votre phrase ?

      "L’acte de contrainte est un titre exécutoire produisant les mêmes effets qu’une décision de justice s’il n’est pas contesté."
      (dans quelles conditions ?)

      Merci
      Cordialement

  • par jean-françois , Le 16 mai 2015 à 16:11

    Bonjour à tous,
    Je vis dans les DOM TOM, en 2009,salarié je monte en parallèle et en autoentrepreneur une petite boite de création d’objets de décoration, histoire de ne pas bosser au black. Les deux premières années, je suis sensé être exonéré de cotisation (dixit textes de loi). Arrive des demande de paiement de la RAm RSI. J’envoie courriers , recommandés, visites, demandes d’explication…mais non rien pas de réponse, un mur qui me répète en boucle vous devez la somme de (environ 300€). Finalement excédé, mon entreprise ayant réalisé 0€ de CA, je jette l’éponge et ferme ma boite. En 2013, je ré ouvre toujours en autoentrepreneur un organisme de formation. Et revoila le RSi RAM de retour, rebelote, courriers, recommandés, menaces, huissier (ha ! ça c’est nouveau) qui laisse le papier bien en évidence à l’entrée de ma cage d’escalier histoire de raconter ma vie aux voisins, je ne vous parle pas de l’état de mon épouse . Finalement a force d’échange, je reçois un document qui me dit effectivement vous ne nous devez rien (ouf !). Quelques jours après la comédie reprend, mêmes sommes, mêmes éléments. Donc là, j’ai décidé de faire appel au tribunal administratif de la sécurité sociale. Déjà deux convocations, qui me coutent au passage un jour de congés à prendre auprès de mon actuel employeur. Le correspondant RSI RAM, m’a gentiment expliqué que : oui, vous n’avez rien à faire ici, ne vous inquiétez pas tout va se régler rapidement (j’ai très peur d’un coup). troisième convocation pour finaliser en novembre.A priori, je dois donc obtenir gain de cause et voir l’effacement de ma « dette ». Mais, les recommandés, le temps perdu, les jours de congé, le harcèlement c’est pour ma poche ? Si j’ai bien compris, ils ont le droit de faire des erreurs qui pourrissent la vie des gens et un simple désolé suffit ?

  • 19 octobre 2013

    Bonjour Maître,

    Vos explications sont très claires, mais face au RSI, pour exemple, il se joue bien des procédures entamées à leur encontre par les indépendants, pour rappel, vouloir travailler pour son propre compte, dire indépendant, c’est être affilié d’office au régime RSI, il n’y a aucun autre choix disponible.

    D’ailleurs, c’est le RSI qui vous fait parvenir votre affiliation .

    De fait pour ma part je viens d’avoir 65 ans et donc demandé ma retraite, c’est ainsi que le RSI, enfin plutôt leurs responsables, décident de vous faire parvenir un relevé de dette, sous prétexte que vous leur avez demandé, accompagné de la liste des années concernées.

    J’ai donc répondu et justifié, par périodes concernées , l’emploie et la cessation par liquidation judiciaire pour certaines, d’autre salarié, de fait il ne pouvait y avoir quelconque dette en cours.

    De plus, en 2004, cessation d’activité, faute due à l’expulsion des locaux me permettant mon emploie, de part la volonté de ma fille, locaux dont elle m’y autorisait par écrit à y demeurer et y entreposer mon matériel et matériaux pour mon entreprise.

    Ce qui m’a conduit à demander le RMI , en 2005, par manque d’activité professionnelle, puis le RSA, jusqu’en 2013.

    Ce qui ce traduit par aucune activité pouvant justifier de demande de cotisation de la part du RSI.

    Ces derniers, RSI, Montpellier et Clermont Ferrant, n’en tenant aucun compte de mes argumentations, préférant faire notifier contrainte par huissier et saisie sur compte joint, après avoir précédemment prétendu avoir besoin d’un RIB pour effectuer paiement de retraite, cette manœuvre douteuse pour ne pas dire malhonnête envers moi , a suscité de ma part l’envoie d’un courrier RA aux intéressés.

    J’attend leur réponse, pour diffuser ces méthodes sur le net. Merci de m’avoir lu en espérant que mon billet soit posté, bien à vous Maître avec mes respects. Gilles CHAMBERT

    • par TRAMIER JACQUES , Le 6 août 2014 à 10:37

      Bonjour, j’ai moi aussi un litige avec le RSI, je viens de recevoir par huissier une saisie attribution pour des sommes qui pour moi ne sont pas dues. Comment faire pour arrêter cette procédure ?
      Je suis actuellement à la retraite suite à la liquidation judiciaire de mon entreprise. Ma retraite ne me permet pas de payer.

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