Maisons de santé pluridisciplinaires : un nouvel outil en faveur de la pérennisation des modes complémentaires de rémunération.

Par Audrey Uzel, Avocat.

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Explorer : # maisons de santé pluridisciplinaires # modes de rémunération # accès aux soins # coordination des soins

Suivant un arrêté du 24 juillet 2017, sont approuvées les dispositions de l’accord conventionnel interprofessionnel relatif aux structures de santé pluriprofessionnelles et ses annexes, conclu le 20 avril 2017 entre d’une part, l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et d’autre part, la Fédération française des médecins généralistes, la Confédération des syndicats médicaux français, la Fédération des médecins de France, l’Union nationale et syndicale des sages-femmes, l’Organisation nationale des syndicats de sages-femmes, le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux, le Syndicat national autonome des orthoptistes, la Fédération nationale des centres de santé, la Fédération des mutuelles de France, la Fédération nationale des institutions de santé et d’action sociale d’inspiration chrétienne, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine.

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L’objectif recherché par cet accord est de poursuivre et améliorer les modes de rémunérations expérimentaux dont ont bénéficié les maisons de santé pluridisciplinaires (mono ou multi sites) et de renforcer l’accompagnement de ces structures. Ainsi, l’accord fixe un contrat type à conclure entre la structure pluriprofessionnelle (maison de santé, centre de santé), les caisses d’assurance maladie et l’agence régionale de santé.

Qui peut en bénéficier ?

- Les maisons de santé constituées sous forme de SISA ou en cours de constitution sous cette forme et ayant arrêté un projet de santé ;
- les centres de santé ayant élaboré un projet de santé et non adhérent à l’accord national des centres de santé.

Comment adhérer ?

Si les structures ont adhéré au contrat fixé par le règlement arbitral du 23 février 2015, elles sont considérées comme tacitement signataires du contrat défini par l’accord conventionnel interprofessionnel. Elles peuvent refuser cette adhésion jusqu’au 5 octobre 2017.

Pour les autres, elles doivent en faire la demande auprès de la caisse d’assurance maladie de leur ressort. La demande est examinée par la caisse d’assurance maladie et par l’Agence régionale de santé, qui s’assurent de l’éligibilité des demandeurs.

L’objet du contrat :

La conclusion de ce contrat permet de bénéficier d’une rémunération modulée en fonction de l’atteinte à des objectifs fixés par indicateurs autour de 3 axes :
- accès aux soins : amplitude horaire de 8h à 20h en semaine et de 8h à 12h le weekend, prise en charge des soins non programmés, accès à une offre de soins diversifiée et spécialisée, réalisation de missions de santé publique (lutte contre la tuberculose, lutte contre l’obésité chez l’enfant, actions en faveur d’une amélioration de la couverture vaccinale, prévention du suicide…), élaboration d’un questionnaire de satisfaction des patients.
- qualité et coordination des soins : fonction de coordination assurée par un professionnel de la structure dans le cadre de la prise en charge de patients complexes (insuffisance cardiaque, maladie chronique, patients obèses, grossesse pathologique…), élaboration de protocoles pluri-professionnels, organisation d’au moins 6 réunions de concertation par an, formation de jeunes professionnels, protocole de transmission des données de santé des patients vers l’extérieur de la structure.
- appui d’un système informationnel partagé : disposer d’un système d’information labellisé.

Parmi ces 3 axes, 3 indicateurs sont intangibles : l’amplitude horaire, la fonction de coordination, et le système d’information labellisé. A défaut, les structures ne sont pas éligibles aux modes complémentaires de rémunération.

Il est également tenu compte de la patientèle accueillie par la structure (nombre de patients ayant déclaré comme médecin traitant un médecin associé de la structure).

Comment est calculée la rémunération complémentaire ?

L’atteinte des indicateurs précités donne lieu à l’attribution de points. Un point vaut 7 euros. Certains indicateurs donnent lieu à l’attribution de points fixes, et d’autres de points variables. Par exemple, si la structure couvre l’intégralité de la plage horaire susvisée (8h-20h en semaine et 8h-12h le samedi), la structure bénéficie de 800 points (soit une enveloppe financière de 5.600 €). En revanche, une diminution des points est opérée si elle ne couvre pas l’intégralité de la plage horaire. Ainsi, si la structure n’est pas ouverte le samedi matin, une minoration de 120 points est opérée (soit une minoration de 840 €).

Pour l’obtention de ces rémunérations complémentaires, la structure adresse à l’organisme d’assurance maladie l’ensemble des justificatifs permettant la vérification du niveau de réalisation des différents indicateurs, avant le 31 janvier de l’année suivant l’année civile servant de référence pour le suivie des engagements, pour un paiement avant le 30 avril de la même année.

En fonction des objectifs atteints, l’assurance maladie calcule le montant de la rémunération. Elle peut appliquer une majoration de précarité (nombre de patients CMU et AME pris en charge par la structure).

Pour la première année, la structure peut bénéficier d’une avance égale à 60 % de la rémunération complémentaire prévisible.

Quelle est la durée de l’accord ?

Le contrat est conclu pour une durée de 5 ans, dans la limite de validité de l’accord conventionnel. Ce dernier est également conclu pour une durée de 5 ans à compter du 6 août 2017, soit jusqu’au 5 août 2022. Il est renouvelable par tacite reconduction.

Comment résilier ?

La structure peut résilier par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à l’organisme d’assurance maladie. La résiliation est effective deux mois suivant sa réception.

L’ARS et l’assurance maladie peuvent également être à l’initiative de la résiliation si et seulement si la structure ne transmet pas les justificatifs permettant d’apprécier le respect des indicateurs, ou si elle ne remplit plus les conditions d’éligibilité au contrat. Dans ces cas, la structure peut contester la décision de résiliation devant la commission paritaire régionale de son ressort, composée d’un représentant de l’ARS, d’un représentant de la fédération régionale des maisons et pôles de santé, d’un représentant désigné par les unions régionales des professionnels de santé, d’un représentant des structures siégeant à la conférence régionale de la santé et de l’autonomie choisi parmi les représentants des centres, maisons et pôles de santé. Cette saisine suspend l’effet de la décision de résiliation.

En cas de résiliation, le paiement de la structure s’effectuera pour la période de l’année où elle était encore sous contrat.

En conclusion :

La signature de ce contrat conduit in fine à mettre en place de véritables structures de soins de premier recours, à l’instar d’un établissement de santé. Elle impose aux professionnels de santé une organisation coordonnée et non un exercice isolé au sein d’un même bâtiment, comme cela est encore le cas aujourd’hui dans certaines structures.

La signature n’est donc pas sans incidence. Elle engage les professionnels auprès de l’assurance maladie mais également auprès de l’ARS qui vérifie la réalisation des missions de santé publique et peut faire des propositions à la structure pour modifier son projet de santé.

Quand bien même ce contrat constitue une avancée et une reconnaissance du travail effectué jusqu’alors quasi bénévolement par des professionnels engagés, certains professionnels avaient marqué leur réticence à contractualiser avec l’assurance maladie lors du règlement arbitral de 2015, voyant en cet acte une diminution de leur liberté et une mainmise de l’assurance maladie sur leur exercice. Reste donc à observer si l’adhésion sera massive ou non !

En tout état de cause, le texte est publié à point nommé, le gouvernement devant annoncer d’ici fin septembre-début octobre son plan d’action pour améliorer l’accès aux soins.

Source : Arrêté du 24 juillet 2017 portant approbation de l’accord conventionnel interprofessionnel relatif aux structures de santé pluriprofessionnelles.

Audrey UZEL
SELARL KOS AVOCATS
Avocats au Barreau de Paris

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