Par Christophe Buffet Avocat Spécialiste en droit immobilier et en droit public
Chacun sait que l’agent immobilier doit disposer d’un mandat écrit de la part de son mandant.
C’est l’article 6 de la loi Hoguet qui prévoit cette obligation, et l’article 72 du décret d’application du 20 juillet 1972 dispose que : « Le titulaire de la carte professionnelle portant la mention : "Transactions sur immeubles et fonds de commerce" ne peut négocier ou s’engager à l’occasion d’opérations spécifiées à l’article 1er (1° à 5°) de la loi susvisée du 2 janvier 1970 sans détenir un mandat écrit préalablement délivré à cet effet par l’une des parties. ».
À défaut, l’agent s’expose à deux sanctions désagréables.
La première est la perte de sa commission, malgré les diligences qu’il aura pu accomplir.
La seconde est la sanction pénale prévue par l’article 16 de la loi Hoguet.
Ceci dit, on peut imaginer que l’agent immobilier ne se précipite pas pour faire signer un mandat à son client, pour des raisons commerciales en particulier (la course au mandat ne serait pas à l’honneur du professionnel).
C’est pourquoi il importe à l’agent de savoir à partir de quel moment, au plus tard, il doit être en possession d’un mandat signé par son mandant.
Ce moment peut être considéré comme celui où la négociation commence.
L’article 72 du décret d’application du 20 juillet 1972 indique en effet que le mandat doit être détenu dès lors que l’agent « négocie » ou « s’engage » à l’occasion des opérations d’intermédiaire visées à l’article 1 de la loi.
Or la négociation n’est que l’une des phases, et non la première, de l’activité de l’agent, qui dans un premier temps va rencontrer son client, puis visiter le bien à vendre, recueillir les éléments le concernant, faire de la publicité, recevoir les acquéreurs potentiels, leur décrire le bien, leur faire visiter ce bien, recueillir leurs observations et leur proposition éventuelle, et la transmettre enfin à son mandant.
Dans cet enchaînement de phases, à partir de quel moment la négociation commence-t-elle ?
Deux décisions de la Cour de Cassation permettent de déterminer ce moment.
La première décision est un arrêt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation du 15 décembre 1987
qui juge que ce moment est celui à partir duquel l’agent a dépassé le stade de la simple publicité, c’est-à-dire en l’espèce à partir de l’instant où il avait reçu le client et lui avait donné tous les renseignements utiles pour parvenir à l’acquisition du bien (c’est-à-dire, s’agissant de terrains « le prix à l’are, le nom du propriétaire et l’identité de la personne susceptible de traiter l’affaire »).
La seconde décision est un arrêt de la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation du 2 octobre 2007 qui a jugé que c’est à partir du moment où l’agent a dépassé « le stade de démarches publicitaires unilatérales » qu’il doit disposer d’un mandat, et cet arrêt considère que ce moment est celui de la visite des lieux qui implique « qu’il avait commencé à négocier avec cette société ».
Ainsi, on peut considérer que c’est à partir de la visite du bien vendu, et précisément avant cette visite, que l’agent immobilier doit disposer d’un mandat écrit signé par son mandant, mais que s’il a donné à l’acquéreur potentiel tous les éléments utiles pour parvenir à l’acquisition du bien, avant cette visite, il doit avant même de donner ces informations détenir ce mandat signé par son mandant.
On observera cependant qu’il est bien rare (et qu’il est imprudent) qu’avant la visite l’agent immobilier donne à l’acquéreur potentiel la totalité des éléments lui permettant d’acquérir le bien et en particulier le nom du vendeur… de sorte que c’est la visite qui dans la majorité des cas doit être considérée comme le moment où l’agent doit disposer du mandat.
Christophe Buffet Avocat