Nouveaux paradigmes pour la protection de l’Environnement : les droits de la Nature.

Par Adoni Nyamuke, Juriste.

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Explorer : # droits de la nature # protection de l'environnement # gouvernance écologique # dégradation environnementale

La reconnaissance de la nature comme étant une partie prenante légale avec des droits inaliénables dans les procédures de droit de l’environnement est perçue à ce jour comme le palliatif au système juridique actuel, qui, disons-le clairement, s’avère inefficace dans la lutte contre le changement climatique.

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La Nature, sujet de droit ?

Le terme « droits de la nature » donne l’impression que l’objectif principal est de défendre les droits de la nature devant les tribunaux. Cependant, le paradigme des droits de la nature vise un changement de gouvernance plus fondamental que la seule défense des droits. À savoir, placer la nature et ses besoins avant les besoins humains, afin que les besoins humains soient reconfigurés dans les limites de la nature.

En ce sens, les Droits de la Nature dépassent le Droit de l’environnement traditionnel qui se limite à protéger une nature outil et propriété de l’être humain aux seules fins d’une croissance alimentée par une pression continue sur les ressources naturelles.

Ce champ juridique nouveau peut être définit comme l’ensemble de règles qui reconnaissent et protègent les entités naturelles et écosystèmes non simplement comme des biens qui peuvent être possédés, mais comme des entités qui ont un droit indépendant d’exister. Ces droits sont notamment, le Droit au respect, le Droit de ne pas être pollué et le droit à la réparation en cas de violation.

Les droits de la Nature gagnent du terrain.

De plus en plus de pays adoptent ces droits aux niveaux national et local ainsi que dans des décisions de justice. Plusieurs textes de référence dédiés en tout en ou partie à la protection des droits de la nature ont été élaborés et adoptés à partir de 2006 à travers le monde. Parmi eux figurent la Constitution équatorienne (2008).

Il s’agit de la première constitution au monde à consacrer les droits légaux de l’environnement. L’article 71 indique que « la nature, ou Pacha Mama, où la vie se reproduit et se produit, a le droit au respect intégral de son existence et du maintien et de la régénération de ses cycles de vie, de sa structure, de ses fonctions et de ses processus évolutifs. »

Les dispositions constitutionnelles relatives aux « droits de la nature » trouvées pour la première fois dans un cadre juridique national transforment la nature d’un objet de droit en un sujet de droit. Ainsi, en Équateur, la nature n’est plus considérée comme une chose sans droits légaux mais plutôt d’une entité détentrice de droits.

Nous pouvons également citer la loi-cadre bolivienne sur les Droits de la Terre Mère (2010). Aux Etats-Unis, les premières lois sur les droits de la nature ont été promulguées au niveau local à partir de 2006, avec plus de trente lois locales en vigueur dans dix États.

Au niveau international, nous avons la Déclaration universelle des Droits de la Terre Mère (2010), ou encore la Déclaration mondiale de l’UICN sur la règle de droit environnemental (2016). Ces textes convergent vers un ensemble relativement succinct et précis de Droits de la Nature.

Faire évoluer les systèmes juridiques actuels.

Comme nous pouvons le constater aujourd’hui, le droit de l’Homme à un environnement sain est impossible à réaliser si l’environnement lui-même est malsain. En effet, Klaus Töpfer, ancien directeur du Programme des Nations-Unies pour l’environnement a déclaré que les droits de l’homme en général « ne peuvent pas être garantis dans un environnement dégradé ou pollué ».

Il explique que le droit fondamental à la vie est menacé par la dégradation des sols et la déforestation et par les expositions aux produits chimiques toxiques, aux déchets dangereux et à l’eau potable contaminée. Les conditions environnementales aident clairement à déterminer dans quelle mesure les gens jouissent de leurs droits fondamentaux à la vie, à la santé, à une alimentation et à un logement adéquats, ainsi qu’aux moyens de subsistance et à la culture traditionnels.

Alors que les températures grimpent, le niveau des mers monte et d’autres menaces pour l’environnement se développent, les lois environnementales conventionnelles basées sur le cadre de la nature en tant que propriété s’avèrent non seulement inadéquates au défi, mais de plus en plus comprises comme faisant partie du problème. Avec cela, il est de plus en plus reconnu que nous devons changer fondamentalement la façon dont nous traitons la nature sous la loi.

L’impact de l’activité humaine sur la biodiversité et l’environnement devenant de plus en plus grave, reconnaître la nature comme une partie prenante légale avec des droits inaliénables va constituer un puissant contrepoids à l’industrialisation à outrance.

Quel avenir pour les droits de la Nature.

Il est évident que des changements majeurs dans l’utilisation humaine de l’environnement doivent intervenir. La question est de savoir comment avancer au mieux. Afin de faire de ce nouveau paradigme une vraie machine pour inverser la tendance actuelle de dégradation de la terre, plusieurs défis et des nombreuses questions restent sans réponse.

En effet, comment les lois sur les droits de la nature seraient-elles mises en œuvre ? Quel niveau de la nature aurait le droit de s’épanouir : un bassin versant, un écosystème entier, un seul fleuve, une vallée, le climat du monde ? Qui déterminerait si une utilisation donnée interfère avec le bien-être de la nature et comment serait-elle mesurée ? S’il y a des dommages, comment seraient-ils mesurés, quel serait le remède et comment serait-il mis en œuvre ? Comment les communautés humaines se reconfigureraient-elles pour vivre de manière durable et stable, sans instabilité, pauvreté et utilisation excessive des ressources ? Comment les besoins humains et le besoin de la nature de s’épanouir sans interférence seraient-ils équilibrés pour créer la plénitude des deux parties ?

Adoni Nyamuke

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