La Convention érige en principe la criminalisation de comportements particulièrement nocifs pour l’environnement. Désormais, les États membres devront poursuivre pénalement des actes tels que la pollution industrielle massive, le trafic d’espèces protégées ou la destruction illégale d’écosystèmes. Par exemple, une entreprise qui déverserait illégalement des substances toxiques dans une rivière, causant la mort de la faune et la dégradation des milieux naturels, s’exposera à des poursuites renforcées et à des sanctions plus lourdes qu’auparavant.
Le texte cible également les réseaux criminels transnationaux, en encourageant la coopération judiciaire et policière entre États. Cette approche vise à mieux coordonner les enquêtes et à lutter plus efficacement contre des fléaux tels que le trafic d’espèces ou la déforestation illégale, qui dépassent largement les frontières nationales. La Convention introduit par ailleurs un mécanisme de suivi destiné à garantir la mise en œuvre effective de ses dispositions et à renforcer l’obligation de rendre des comptes, notamment pour les entreprises impliquées dans des atteintes graves à l’environnement.
Vers la reconnaissance de l’écocide.
Fait marquant, la Convention ouvre la voie à la reconnaissance de l’écocide comme crime international, en assimilant la destruction grave et à grande échelle de l’environnement à une infraction pénale majeure. Cette avancée, longtemps attendue par la société civile et de nombreux parlementaires, place la protection de la nature au même rang que la défense des droits humains fondamentaux. L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a d’ailleurs recommandé d’intégrer dans la législation nationale la définition de l’écocide, afin de garantir une protection solide et globale de la nature.
Un symbole fort, mais des limites structurelles.
Pourtant, derrière l’ambition affichée, des questions demeurent quant à l’effectivité du dispositif. Si la Convention fixe des standards minimaux, elle laisse aux États une large marge de manœuvre dans la transposition et l’application des mesures.
L’histoire du droit pénal environnemental montre que l’effectivité dépend moins de la lettre des textes que de la volonté politique, des moyens alloués à la justice, de la formation des magistrats et de la capacité à remonter la chaîne des responsabilités, notamment dans les affaires impliquant de grands groupes industriels ou des montages juridiques complexes.
Certains experts soulignent également que, malgré la robustesse du cadre juridique, le Conseil de l’Europe a manqué l’occasion d’inscrire explicitement le droit à un environnement sain comme un droit humain fondamental, à l’instar de ce qui existe dans d’autres régions du monde. À l’heure où les Européens subissent de plein fouet les conséquences de la crise environnementale, ce manque d’audace juridique est vivement critiqué par la société civile et le milieu universitaire.
Un levier pour l’avenir, à condition d’une mobilisation collective.
En définitive, la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection de l’environnement par le droit pénal constitue un progrès historique et symbolique. Elle place la protection de la planète au cœur des préoccupations pénales européennes et offre un cadre solide pour lutter contre l’impunité environnementale. Mais elle ne saurait, à elle seule, résoudre la complexité des défis à venir.
Son efficacité dépendra de la détermination des États à transformer l’essai, à doter la justice des moyens nécessaires et à faire vivre ces nouvelles normes au quotidien. Ce traité n’est pas une panacée, mais il trace une feuille de route ambitieuse pour un avenir plus résilient et plus juste, où la défense de l’environnement ne sera plus sacrifiée sur l’autel de l’inaction.
L’adoption de ce texte doit donc être saluée avec lucidité : il s’agit d’une étape décisive, mais dont la portée réelle dépendra, in fine, de notre capacité collective à faire primer l’intérêt général et la justice environnementale.