Cette dure réalité à ses causes que tous les spécialistes connaissent parfaitement : les juges à quelque niveau que ce soit ferment trop souvent les yeux sur des comportements qui relèvent de la maltraitance sur enfant c’est-à-dire du pénal pur et dur, comportements qui se trouvent naturellement amplifiés – y a-t’il vraiment lieu de s’en étonner – très précisément parce que l’apparition du spectre judiciaire dans le conflit familial donne des ailes à l’acharnement quel que soit le camp qui s’y livre.
D’un côté la justice est instrumentalisée sans état d’âme, le plus souvent par le requérant, de l’autre côté, l’enfant est formidablement encouragé et entrainé par les paroles magiques : « Tu vois, le juge est pour moi ! ». A-t-on réfléchi au redoutable effet que vont produire sur un jeune cerveau le contexte et l’orientation judiciaires qui impressionnent aussi pas mal d’adultes ? Alors qu’on attend au contraire des juges un apaisement ou à tout le moins un vrai savoir-faire pour calmer le jeu. De nombreux justiciables usent leur vie à attendre et ne reverront jamais leurs enfants dans un état normal. Leur vie est gâchée.
Quant aux juges d’appels la pratique nous montre leur propension à fermer les yeux sur les renoncements et autres dysfonctionnements des collègues au risque d’entrainer un peu plus les enfants vers l’abîme dont on ne sait s’ils auront jamais une chance d’en ressortir indemne. On ne signale pourtant guère ce genre de réalité dans les études consacrées au droit de la famille.
Autrement dit, l’application des textes protecteurs des intérêts familiaux au sens où l’entend la Cour européenne des droits de l’homme est une formidable illusion que quelques rappels à l’ordre pourtant significatifs ne parviennent hélas pas à transformer en réalité.
Le résultat de cet abandon qui peut aller comme on va le voir jusqu’au déni de justice est de plonger les parents victimes de ces dysfonctionnement dans le désespoir que consolent bien peu les quelques coups de semonce aperçus ci et là. Quant aux avocats, ils se demandent pourquoi ils ont fait de si longues études pour se retrouver confrontés à des situations fort éloignées du droit. Tant que fonctionnera l’actuel système de contrôle du Conseil Supérieur de la Magistrature englué dans ses habitudes corporatistes, on n’en sortira pas et c’est l’un des domaines où le législateur ferait bien de s’investir plutôt que de se laisser piéger par des forums stériles sur la burqua ou d’autres fantaisies du même acabit. Car, ici, les situations de crise gérées à la hussarde se comptent par milliers.
1. Une hirondelle ne fait pas le printemps.
L’histoire de Michèle PLASSE-BAUER cette maman de 62 ans est révélatrice de l’état des lieux en matière de protection des intérêts familiaux. Séparée de ses quatre enfants qu’elle n’a pas vus depuis 15 ans, elle court de tribunal en cour d’appel pour ne pas devenir folle…alors que la justice ne lui reproche rien. Tout simplement parce que, comme pour des milliers de parents évincés de leur progéniture alors qu’ils ont obtenu des décisions judiciaires leur permettant d’exercer au moins un droit de visite et d’hébergement pour ne pas rompre les liens que l’autre parent s’acharne à détruire définitivement par esprit de vengeance, nos institutions dont les responsables sont payés à la fin du mois – merci pour eux – sont incapables de les faire respecter. Qu’on nous pardonne cette liberté de ton mais il ne sert pas à grand-chose de s’épuiser comme le font certains en analyses très sophistiquées sur le droit de la famille alors que le constat général est globalement calamiteux, ce qu’ils oublient malheureusement de préciser. Une pensée émue pour ceux qui font du bon boulot.
Michèle PLASSE-BAUER a fini par s’adresser à la Cour européenne des droits de l’homme (Requête n° 21324/02) qui a reconnu la responsabilité de l’Etat français mais seulement sur la base de l’article 6 de la Convention européenne sur l’absence de procès équitable, la Cour ayant estimé qu’il n’y avait dès lors pas lieu d’examiner les griefs portant sur la violation l’article 8 de ladite convention qui protège les intérêts familiaux. On peut regretter cette jurisprudence sélective qui laisse souvent de côté les aspects les plus douloureux des requêtes de parents à bout de souffle et d’espoir.
Frustrée de la reconnaissance qu’elle était en droit d’attendre de la violation continue de ses droits de mère à qui – il faut y insister - on ne reproche rien – Michèle PLASSE-BAUER s’est engagée dans un nouvelle croisade contre la justice française pour faire condamner l’Etat pour faute lourde, procédure qui aboutit rarement est-il besoin de le rappeler. La demande a été introduite devant le TGI de TOULON qui a tout de suite tiré prétexte de la décision favorable que venait de rendre la Cour européenne en faveur de la requérante pour la débouter de sa demande. Persuadée d’être en présence non seulement d’une faute lourde mais également d’un déni de justice, Michèle PLASSE-BAUER s’est alors tournée vers la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE qui vient de rendre un arrêt qui fait pas mal de bruit dans le silence assourdissant qui règne habituellement dans ce type de contentieux. C’est une décision courageuse.
Cour d’appel d’Aix-en-Provence (1ère chambre A) 18 mai 2010 :
« Sur la prescription
1. Attendu que Michelle PLASSE a assigné l’ETAT sur le fondement de l’article L 141-1 du
Code de l’Organisation Judiciaire par acte du 3 janvier 2008 ;
2. Attendu qu’elle invoque une série de faits traduisant l’inaptitude du service public de la
Justice à remplir la mission dont il est investi constitués de décisions rendues depuis l’ordonnance de
non-conciliation du 7 décembre 1993 jusqu’à l’arrêt du 28 février 2007 ayant eu pour conséquence de
la priver irrémédiablement sans motif valable de tous liens affectifs avec ses enfants et de renforcer son
ex-mari dans un sentiment d’impunité qui lui a permis selon elle de développer à leur détriment un
"syndrome d’aliénation parentale" pour les amener à rejeter leur mère ;
3. Attendu que les actions en responsabilité de l’Etat obéissent en matière de prescription à la
Loi du 31 décembre 1968 ;
Attendu que la déchéance quadriennale des créances sur l’Etat commence à courir le premier jour de l’année au cours de laquelle s’est produit le fait générateur du dommage allégué ;
4. Attendu qu’en matière civile, l’acte juridictionnel peut constituer une faute lourde éventuelle,
à condition que l’exercice des voies de recours n’ait pas permis de réparer le mauvais fonctionnement
allégué ;
Attendu qu’en ce qui concerne les actes du Parquet, et spécialement le "mal apprécié" quant au classement sans suite ou au refus d’appel, il doit être tenu compte lorsque les faits et l’auteur sont connus, des prérogatives de la partie civile, citation directe ou constitution de partie civile, ou encore appel sur intérêts civils ;
5. Attendu qu’en ce qui concerne l’instance en divorce, qui s’est déroulée entre le 7 décembre
1993 et la dernière ordonnance de référé invoquée du 13 mars 1998, force est de constater que la
prescription quadriennale est acquise à l’Etat à la date de l’assignation ;
6. Attendu qu’il en est de même pour les décisions de classement sans suite non précédée
d’enquêtes préliminaires reprochées au Parquet ou de non-appel, celles-ci ne pouvant plus donner de
droit à agir postérieurement à l’année 2004, la dernière vaine demande d’engagement de poursuite
adressée au procureur de la République suite aux plaintes du justiciable pour non représentation
d’enfant étant en date du 16 mai 2000 ;
7. Attendu en revanche que le dommage allégué à propos de la procédure pénale qui s’est
déroulée du 28 juillet 1998, date du dépôt de la plainte avec constitution de partie civile au 28 février
2007, date du dernier arrêt de la Cour d’Appel de céans n’est pas atteint par la prescription
quadriennale, à la date de l’assignation, de sorte qu’il y a lieu de réformer le jugement et de statuer sur
le fond du litige ;
Sur la faute lourde
1. Attendu que tant l’article L 141-1 du Code de l’Organisation Judiciaire visant le déni de justice que l’article 6-1 de la Convention EDH stigmatisent tout manquement de l’Etat à son devoir de protection juridictionnelle comprenant le droit pour tout justiciable de voir statuer - quelqu’en soit la solution donnée sur ses prétentions - dans un délai raisonnable ;
Attendu qu’en l’espèce, le degré de simplicité de l’affaire et l’absence de maîtrise de l’appelante sur le calendrier de la procédure d’appel conduisent à retenir un déni de justice en considération d’un délai de plus de trois ans mis pour statuer sur l’appel, suivi d’un délai de plus de 17 mois pour statuer sur l’opposition de Michelle PLASSE, celui de 4 mois et demi pour statuer sur celle de F. O. paraissant en revanche plus raisonnable quoique tardif ;
Attendu que le préjudice moral subi par Michelle PLASSE pour avoir du attendre pratiquement 5 années pour obtenir une décision contradictoire, générateur d’insécurité juridique et d’un déséquilibre significatif dans l’exercice par les parties de leurs droits respectifs au respect des décisions de justice justifie l’allocation à Michelle PLASSE de la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts ;
Vu l’article 696 du Code de Procédure Civile ;
PAR CES MOTIFS LA COUR.
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;
Réforme le jugement ;
Statuant à nouveau ;
Déclare Michèle PLASSE prescrite à agir contre l’Etat du chef de la procédure de divorce ;
La déclare recevable du chef de la procédure pénale ;
Reconnaît la responsabilité de l’Etat de ce chef ;
Condamne l’Etat représenté par l’Agent Judiciaire du Trésor à payer à Michelle PLASSE la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts outre celle de 3000 euros en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;
Déboute les parties de surplus de leurs demandes ;
Condamne l’Etat aux dépens ; »
Maigre consolation certes pour Michèle PLASSE mais terrible constat d’incurie du système judiciaire qui dans cette affaire comme dans des milliers d’autres fait quotidiennement la démonstration de son incapacité à gérer le droit de la famille en conformité de la loi et des conventions internationales.
Ce qui est vrai pour les parents privés des liens naturels avec leurs enfants otages en quelque sorte d’une démission de la justice est encore plus terrible pour les enfants comme on peut le constater toutes les rares fois qu’un magistrat courageux met les pieds dans le plat.
2. Il est parfois salutaire de savoir mettre un terme à une mesure d’assistance dangereuse.
N’en déplaise aux adeptes du politiquement correct, les solutions radicales mises en place par le législateur (tribunal pour enfants) peuvent créer largement plus de problèmes qu’elles ne sont capables d’en résoudre. On peut même déplorer qu’elles en créent souvent qui n’existait pas avant et, en pareil cas, il ne faut pas trop compter sur une sorte de sagesse naturelle incitant les juges à dire non avant de mettre en route la machine infernale. Ou tout simplement incitant à mettre un terme à un engrenage qui risque d’être fatal. Il est rarissime que les magistrats du siège ou du parquet fassent état du danger qu’ils ont eux-mêmes contribué à créer. Ils en ont pourtant parfaitement conscience mais le système est ainsi conçu que ces choses là ne s’expriment pas. D’où l’intérêt de faire connaître la très courageuse décision ci-dessous qui a su arrêter les frais. On espère à temps.
JUGEMENT
Nous, S. VAUZELLE, Vice président chargé des fonctions de juge des enfants,
Vu les articles 375 et suivants du Code Civil, 1181 et suivants du Code de Procédure Civile,
Vu la procédure d’assistance éducative concernant :
L.. X.., née le …2002 à PARIS.
dont le père, M. L. Y, demeure à PARIS et la mère, Mme D. , demeure à PARIS
Après avoir entendu à l’audience la mineure, la mère, le père assistés de leurs conseils respectifs, en présence de l’éducatrice du service ...
Il résulte des renseignements recueillis , notamment du rapport du service éducatif, de la décision du juge aux affaires familiales en date du 22/04/2010 et des entretiens à l’audience que L… reste sous l’emprise de sa mère et ne s’autorise pas à aimer son père et à garder avec lui des liens positifs.
Tous les professionnels ayant eu à connaître de cette situation ont fait le même constat.
De multiples procédures judiciaires ont été diligentées, pour la plupart à l’initiative de Madame D. et, lorsqu’elles l’ont été à l’initiative du père, c’est en raison du non respect de ses droits ou des plaintes réitérées qui l’ont amené à solliciter lui même un droit de visite médiatisé.
Force est de constater que :
Les plaintes déposées par Madame D… contre Monsieur L… ont toutes été classées sans
suite ou ont fait l’objet d’un non lieu , confirmé par la Chambre d’instruction . A ce jour aucune
procédure pénale contre le père n’est en cours.
Le juge aux affaires familiales a ordonné un droit de visite médiatisé, non en raison du
comportement du père mais en raison du climat de suspicion que la mère fait peser sur ce dernier et des plaintes systématiquement déposées contre lui.
La mesure éducative en milieu ouvert, qui s’exerce depuis deux ans, est inopérante puisque
Madame D… a une relation fusionnelle avec sa fille, qu’elle ne laisse pas à l’éducatrice un libre
accès à L… et qu’en tout état de cause la mineure ne peut s’autoriser à se distancier de sa mère et
à émettre un avis personnel. Au surplus le directeur de l’école de L… a eu accès au dernier rapport
du service éducatif, au moins pour partie, le conseil de la mère ayant enfreint les dispositions légales
ainsi que rappelé ci dessus. Le directeur de l’école a crû devoir déposer plainte contre l’éducatrice qui
n’a jamais failli à ses obligations professionnelles. Cette plainte jugée infondée, a été classée sans
suite par le Procureur de la République. La position de ce directeur semble dépourvue de neutralité
dans cette situation, Monsieur L…ayant été également amené par le passé à écrire à
l’Académie pour évoquer les problèmes rencontrés avec ce dernier. Il s’ensuit que la collaboration
entre le service éducatif et l’établissement scolaire, qui est habituelle lorsque les mineurs bénéficient
d’une mesure éducative en milieu ouvert, est rendue difficile.
La mesure éducative a donc désormais atteint ses limites et, mise en échec par la rnère et l’enfant, n’a pas pu faire évoluer la situation.
Enfin la mineure a fait l’objet en 2007- 2008 d’une mesure de placement afin de vivre en lieu neutre et d’avoir accès à son père, sans être sous l’emprise quotidienne de sa mère. Il a cependant été donné mainlevée du placement, l’enfant souffrant de la séparation d’avec sa mère. Monsieur L… lui même a indiqué au juge aux affaires familiales et au juge des enfants qu’il ne souhaitait pas un nouveau placement.
Si L...n’est pas en danger immédiat auprès de sa mère, qu’elle est décrite comme une excellente élève ne posant pas de problème de comportement, sa relation fusionnelle avec sa mère et l’image négative qu’elle a de son père risquent à terme de compromettre son développement, affectif, psychique et social au sens de l’article 375 du code civil.
Pour l’heure la mesure éducative en milieu ouvert étant inopérante, une nouvelle mesure de placement n’étant pas adaptée à la situation de l’enfant, et L… étant légitimement lassée par les multiples procédures judiciaires, il convient d’en tirer toutes les conséquences en clôturant le dossier. Il est désormais impératif que L...vive sa vie d’enfant, soit tenue à l’écart des déchirements parentaux et procédures judiciaires et qu’elle grandisse sereinement en lien avec chacun de ses parents.
PAR CES MOTIFS
Statuant en Chambre du Conseil et en premierressort
Disons n’y avoir plus lieu à assistance éducative. Ordonnons l’exécution provisoire.
3. Pitié pour les gosses.
Avant de conclure sur les causes de ces drames qui ne devraient pas exister si l’autorité judiciaire faisait correctement son travail, il faut se pencher sur les dégâts occasionnés par le laxisme régnant qui laisse la bride sur le cou à des intervenants très budgétivores.
Reprenons l’exemple de Michèle PLASSE qui ne se remettra jamais vraiment de la séparation d’avec ses quatre enfants. Sa défense n’est pas venue les mains vides devant le tribunal de Toulon puis devant la cour d’appel. Elle a au contraire enfoncé le clou sur une réalité qui dérange encore trop souvent et qui n’est pas près de faire partie du « politiquement correct » parce que nos chers juges n’aiment pas ça : (1)
« Le syndrome d’aliénation parentale
Le passage du temps et les conditions très brutales de la séparation intervenue au mois de juin 1993 ont détruit les liens entre la mère et ses enfants, ceux-ci n’étant en contact qu’avec leur père ils n’ont reçu que des informations provenant de lui qui ont entrainé la crainte et le rejet de la mère.
Dans ce contexte, les enfants ne peuvent être que victimes du syndrome d’aliénation parentale. En effet, lors d’un conflit parental lié à une rupture, il n’est pas rare de voir l’enfant balloté entre ses deux parents, prendre fermement le parti de l’un d’eux, voir de le dénigrer totalement.
L’enfant et le parent aliéné sont alors exposés à un risque de séparation définitive.
C’est exactement ce qui s’est produit.
Suivant Françoise DOLTO, médecin psychiatre expert : « on ne protège pas la sécurité de la relation en privant l’enfant de la connaissance de l’autre parent. C’est au contraire, la promesse d’une très grande insécurité future, et qui serait déjà présente dès la mise en œuvre d’une telle mesure, puisque c’est une annulation d’une partie de l’enfant par laquelle il lui est signifié implicitement que cet autre est quelqu’un de dévalorisé et de fautif ».
Mme Mireille LASBATS, psychologue clinicienne, expert près la cour d’appel de Douai a réalisé une étude de laquelle il ressort les constatations suivantes :
« Le syndrome d’aliénation parentale mentale est le processus où l’enfant est amené par un parent, de façon plus ou moins subtile, à partager un ensemble d’idées et de perceptions fausses, déformées ou exagérées sur l’autre parent.
L’enfant devient graduellement captif du mode de pensée du parent aliénant.
Il y adhère totalement et véhicule, à propos de l’autre parent, des propos insensés, voire des allégations de tout genre qui font douter le professionnel de la capacité parentale du parent aliéné.
L’analyse d’un ensemble de cas caractéristiques permet de démontrer les influences pathogènes d’une telle situation.
Dans tous les cas, l’enfant est exposé à des dangers menaçants son équilibre personnel et l’évolution de sa personnalité.
Lorsque les prérogatives parentales sont démesurées, au point d’entraîner une relation parentale exclusive et nier les prérogatives de l’autre, la situation peut, dans ses conséquences immédiates ou à long terme, placer l’enfant dans une position dite de danger, eu égard à son évolution psychoaffective. »
Des auteurs ont dénoncé le trouble qui apparaît dans le contexte de dénigrement injustifié d’un parent par l’enfant : c’est le syndrome d’aliénation parentale.
Deux factures contribuent à la constitution du syndrome d’aliénation parentale :
1. la combinaison de la manipulation par un parent,
2. la propre contribution de l’enfant à la calomnie du parent cible.
Le syndrome d’aliénation parentale nécessite trois acteurs : le parent aliénant, le parent aliéné, le ou les enfants aliénés. :
• le parent aliénant apparaît sous l’appellation : parent hébergeant, parent principal, parent résidant, parent gardien, parent continu.
• Le parent aliéné est également nommé : parent non hébergeant, parent secondaire, parent non résidant, parent non gardien, parent discontinu, parent cible.
• L’enfant aliéné est un otage.
Huit manifestations se retrouvent :
1. campagne de dénigrement qui se manifeste dans les actes et verbalement,
2. rationalisation de la dépréciation : explications légères, peu convaincantes de l’enfant pour justifier de son attitude,
3. absence d’ambivalence : propos donnés avec trop de certitude
4. phénomène d’indépendance, l’enfant affirme qu’il est seul parvenu à sa prise de position et que personne ne l’a influencé,
5. dans le conflit parental, l’enfant manifeste son soutien unilatéral au parent aliénant,
6. absence de culpabilité de la part de l’enfant à dénigrer le parent aliéné,
7. présence de scénarios imaginaires, l’enfant relate les faits qu’il n’a pas vécus,
8. extension de l’animosité envers les proches du parent aliéné.
De son côté, le neurologue W. Von Boch-Galhau, spécialiste en psychothérapie et en psychiatrie reprend en grande partie les analyses de M. Bone et M. R. Walsh et assimile le syndrome d’aliénation au syndrome de stockholm.
Il écrit ceci : « l’angoisse et la dépendance font que la victime s’identifie à l’agresseur d’une manière si radicale qu’elle refuse toute aide et toute prise d’influence extérieure ».
L’aliénation parentale est une relation d’emprise, liée à la puissance de la conviction à laquelle adhère un enfant, persuadé que l’un de ses deux parents est fondamentalement mauvais.
Trompé, il glisse dans l’aliénation en tuant sur le plan psychologique, ce parent.
Les répercussions psychologiques sur l’enfant placé dans une situation de rupture familiale basée sur de tels conflits, sont considérables.
Le parent dit « aliénant » méprise le rôle de l’autre parent dans le développement de l’enfant par ses convictions personnelles et la projection d’une problématique ancienne sur la vie relationnelle de l’enfant.
L’empêchement d’un possible lien triangulaire est à l’origine de troubles psychologiques et fonctionnels du sujet victime, privé d’une base nécessaire à son équilibre.
Le clivage identitaire peut provoquer une problématique identitaire, des troubles du comportement, dans un contexte dépressiogène.
Ce déficit parental doit être pris en considération en vue des mesures de garde et l’orientation vers l’instance judiciaire à saisir.
Par la complexité de liens aussi troublants, cette situation dite du syndrome d’aliénation parentale peut être assimilée à celle d’un enfant en danger de maltraitance psychologique.
Cette étude permet de prendre connaissance du vécu des enfants séparés brutalement de leur mère, sans avoir le moindre contact avec elle durant des années.
Le parent aliénant a été libre de tenir tous propos discréditants sur l’autre parent, entraînant ainsi un trouble affectif majeur chez ses enfants et la rupture totale des relations.
Mme PLASSE souffre chaque jour de cette séparation, sa vie est devenue un calvaire.
Non seulement Mme PLASSE-BAUER n’a jamais revu ses enfants, mais elle a été en outre diabolisée. Elle a ainsi perdu tout lien avec eux, physique, mais aussi affectif. Son image de mère a été bafouée et ensuite supprimée.
Ses enfants sont enfermés dans leur refus de la rencontrer et traumatisés. Ils ont souffert du manque d’affection maternelle provoqué par la séparation brutale ayant débuté en juin 1993 et ont de leur mère une image qu’ils rejettent.
Mme Michèle PLASSE-BAUER a dû affronter quatorze années d’une procédure qui a débuté en juin 1993, date de l’enlèvement des enfants par leur père et qui s’est achevée le 28 février 2007 par l’arrêt de condamnation de la Cour d’Appel d’Aix en Provence à l’encontre du père.
Après sa condamnation par la Cour Européenne, le 28 février 2006, le gouvernement français n’a entrepris aucune démarche permettant à Mme Michèle PLASSE-BAUER de retrouver ses enfants, lui refusant cette possibilité parce qu’ils étaient désormais majeurs…
Elle a déposé auprès du Commissariat de Toulon, le 08 octobre 2008 des demandes de recherches de ses enfants dans l’intérêt des familles qui n’ont pas été suivies d’effets.
Ce décalage entre la toute puissance de l’autorité judiciaire capable de faire des miracles dans certaines situations et les souffrances des parents frustrés interpelle car les causes sont connues autant que les effets.
La cause est purement institutionnelle : une absence totale de contrôle à peine atténuée par les interventions de la Direction de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, cette annexe du ministère de la justice qui couvre la plupart du temps les fautes, y compris les plus graves, au nom de l’indépendance des magistrats. Quant aux parquets, lorsque leur intervention est prévue par la loi comme par exemple en matière d’assistance éducatives, il est bien rare qu’ils s’investissent. Ce qui explique que leurs réquisitions écrites dépassent rarement deux ou trois lignes.
L’enfant est alors livré « aux bons soins » des services sociaux qui font ce qu’ils peuvent pour gérer de trop nombreux dossiers tout en ne s’écartant pas trop des orientations du juge qui les a désignés. Sans parler de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) très critiquée un peu partout, y compris par les services de police spécialisés, pour la brutalité de ses méthodes. Et tout cela, bien entendu coûte une fortune à la république, à raison en moyenne de 3.000 voire 4.000 euros par mois, pour des prestations qui dépassent rarement une heure d’audition par semaine.
Si la mesure d’assistance était justifiée, l‘amélioration et le rapport qualité-prix restent souvent à démontrer. Si d’aventure, elle ne l’était pas, ce qui est assez fréquent, l’enfant sortira en très mauvais état au point qu’on peut parler de maltraitance. Les services sociaux, pas plus que l’ASE qui encore une fois coûtent une fortune à l’Etat ne peuvent rien faire face à un enfant-soldat qui le plus souvent les manipule en se moquant d’eux. Avant de devenir un petit dur qu’ils ne voient évidemment pas évoluer. En attendant, on paye pour ça. Quant aux avocats d’enfants dont l’intervention reste diversifiée si l’on en juge par les vives critiques des magistrats présents aux 10ème assises qui se sont tenues à la Maison du barreau de Paris les 20 et 21 novembre 2009, leur intervention demeurera un progrès si elle est sérieusement contrôlée ce qui n’est pas acquis . (Voir notre article sur le village du 12 novembre 2009 sous la rubrique « Tribunes et points de vue » : Les avocats d’enfants ou les limites du politiquement correct. )
L’absence de contrôle et le transfert de responsabilité vers les psy de tout poil qui ont rarement le courage de dire la vérité sur la nécessité d’une mesure d’assistance et surtout sur ses dangers font que les juges sont trop souvent tentés de sortir le parapluie et de se contenter de faire de la psychologie aléatoire au lieu de faire appliquer la loi en commençant par faire respecter les intérêts et les liens familiaux. (1) Comme les y invitent pourtant à longueur d’année la Cour de cassation et la Cour européenne des droits de l’homme. « Vox clamens in deserto ! ».
Jean PANNIER
Docteur en droit
Avocat à la Cour de Paris
jean.pannier chez gmail.com
(1) Voir notre note sous un jugement du JAF de Toulon du 4 juin 2007 sur le village du 10 novembre 2008 à la rubrique Droit civil)
(2) Voir le communiqué de la rédaction du village du 28 novembre 2008 intitulé « Suggestions quant aux droits de l’enfant lors de la séparation des parents » :
1« Le 20 novembre 2008 fut célébrée la journée internationale des droits de l’enfant. A cette occasion, Dominique Versini a remis aux membres du pouvoir exécutif ainsi que législatif des rapports annuels d’activité montrant que près de la moitié des réclamations touchaient au problème du maintien des liens entre parents et enfants en cas de séparation parentale, et qu’en outre, un quart des enfants ne vit pas avec ses deux parents…
Pour finir, la mesure sans doute la plus importante de ce rapport demeure sans doute dans la demande d’insertion dans le Code civil du droit de l’enfant d’entretenir des relations personnelles avec chacun de ses parents et avec certains tiers.
A la suite de ce rapport, le Président de la république a demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaire pour faire suite à certaines de ces recommandations en cas de séparation parentale ».
Avertissement de la Rédaction du Village de la Justice :
L’expression du "Syndrome d’aliénation parentale" et l’usage du concept sont fortement déconseillés au niveau européen (Textes adoptés - La conséquence des violences conjugales et des droits de garde sur les femmes et les enfants - Mercredi 6 octobre 2021 ).
Au niveau français, une note d’information mise en ligne sur le site intranet de la direction des affaires civiles et du Sceau du ministère de la Justice, informe les magistrats du caractère controversé et non reconnu du syndrome d’aliénation parentale (voir à ce sujet : Syndrome d’aliénation parentale-Réponse du Ministère de la justice publiée le 12/07/2018 ).
Dans la continuité de cette note d’information de mars 2018 adressée aux Magistrats, une réponse du ministère de la Justice datée du 12 décembre 2024 rappelle que le syndrome ne fait pas l’objet de consensus médical, qu’il n’est pas reconnu par l’OMS et que les magistrats ont la possibilité de recourir à d’autres dispositifs pour garantir la protection et l’intérêt de l’enfant tels que les concepts de « conflit de loyauté », de « conflit parental ou d’emprise » dont l’assise scientifique n’est pas controversée. Merci de tenir compte des réserves exposées ci-dessus, cette expression étant ici employée sous la seule responsabilité de l’auteur.