Représentants de proximité : quel est l’intérêt de leur mise en place ?

Par Laura Chambon, Juriste.

8523 lectures 1re Parution: Modifié: 2 commentaires 4.64  /5

Explorer : # représentation du personnel # comité social et économique (cse) # proximité des salariés # négociation collective

Les représentants de proximité constituent une nouveauté issue des ordonnances Macron de septembre 2017. Ces derniers peuvent être désignés à l’occasion de la mise en place du CSE.

Pourquoi et comment mettre en place des représentants de proximité ? Nous répondons à ces questions au sein de cet article.

-

Les représentants de proximité sont des représentants du personnel désignés par le CSE, intervenant dans un champ de compétence plus restreint que celui du comité social et économique.

Les représentants de proximité constituent une émanation du CSE, qui peut être constitué soit par des membres appartenant à ce dernier, soit par des salariés de l’entreprise.

La loi n’impose pas la mise en place de représentants de proximité dans l’entreprise.

Les acteurs de l’entreprise conservent la liberté d’adapter la représentation du personnel aux besoins propres de chaque entreprise.

Qu’est ce qu’un représentant de proximité ?

Il convient de préciser que le Code du travail ne donne pas de définition du représentant de proximité.

Il ressort des différentes définitions données par les auteurs que ces derniers sont voués à maintenir une certaine proximité auprès des salariés.

Cependant, l’accord instituant les représentants de proximité peut parfaitement octroyer aux représentants de proximité d’autres droits et prérogatives.

L’objectif de la mise en place des représentants de proximité est de lutter contre une centralisation excessive de cette représentation au niveau de l’entreprise. Mais encore, compte tenu de la réduction du nombre d’élus et du nombre total d’heures de délégation, les représentants de proximité peuvent venir en « aide » aux membres du CSE ou encore, être présents sur une zone géographique où le CSE n’est pas représenté.

Comment sont mis en place les représentants de proximité ?

Sur ce point, l’article L. 2313-7 du Code du travail renvoie à l’article L. 2313-2 qui renvoie lui-même au premier alinéa l’article L. 2232-12 du même code.

Ce dernier article dispose que la validité d’un accord d’entreprise ou d’établissement est subordonnée à sa signature par, d’une part, l’employeur ou son représentant et, d’autre part, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50% des suffrages exprimés en faveur d’organisations syndicales représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique.

Ainsi, la mise en place des représentants de proximité tels que décrits par le Code du travail est uniquement envisageable dans les entreprises dotées à minima d’une présence syndicale.
Cet accord a toute latitude pour adapter leur nombre, leurs attributions et leurs modalités de fonctionnement au regard des besoins identifiés dans l’entreprise en matière de représentation du personnel.

Qu’en est-il pour les entreprises dénuées de présence syndicale ?

Nous pouvons tout à fait imaginer dans ce cas qu’un accord conclu avec les membres du CSE ou encore, le règlement intérieur du CSE puisse mettre en place un système similaire à celui prévu par le Code du travail.
Une question reste cependant en suspens : si les représentants de proximité bénéficient du statut protecteur prévu aux articles L. 2411-1 et suivant du Code du travail, nous ne pouvons affirmer avec certitude que les « représentants de proximité » mis en place dans les entreprises sans présence syndicale puissent bénéficier d’une telle protection.

Quel est le contenu de l’accord mettant en place les représentants de proximité ?

En application de l’article L. 2313-7 du Code du travail, l’accord définit :
- Le nombre de représentants de proximité
- Les attributions des représentants de proximité, notamment en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail par délégation du Comité social et économique, comme par exemple, de prévenir les situations de harcèlement, d’identifier les charges de travail excessives, de préconiser des améliorations dans l’organisation du travail du site, de recommander des actions de nature à améliorer la qualité de vie au travail du personnel, etc.
- Les attributions peuvent dépasser le champ de la sécurité, de la sécurité ou des conditions de travail. Il est possible de prévoir une clause prévoyant que les représentants de proximité peuvent gérer une partie des œuvres sociales (distribution des cadeaux ou chèques cadeaux ou autres, organisation de certaines manifestations, etc.) et qu’ils peuvent également, par exemple, être en charge de la communication mise en place par le CSE (affichage des procès-verbaux par exemple). De même, les représentants de proximité pourront également jouer un rôle en matière de présentation des réclamations individuelles ou collectives dans les différents sites géographiques de l’entreprise lorsque le périmètre des établissements distincts de l’entreprise retenu se situe à un niveau plus centralisé. Il est cependant convenu sur ce dernier point que les représentants de proximité ne doivent pas remplacer le CSE sur cette mission. Ils constituent plus un intermédiaire ou encore, une présence de proximité.
- Les modalités de leur désignation : le Code du travail prévoit que les représentants de proximité sont soit membres du CSE (mais ici, l’intérêt d’être désigné représentant de proximité n’est pas encore réellement démontré), soit désigné par lui, c’est-à-dire un salarié de l’entreprise.
- L’accord doit prévoir les modalités de désignation en pratique. Il peut s’agir par exemple, d’une élection interne au CSE comme cela pouvait avoir lieu concernant l’élection des membres du CSE par les délégués du personnel et les membres du comité d’entreprise. Dans tous les cas, il apparaît à la lecture de l’article L. 2313-7 du Code du travail, que les représentants de proximité ne peuvent pas être élus par l’ensemble des salariés ou désignés par les syndicats représentatifs dans le champ d’application, cela relève uniquement du CSE.
- Leurs modalités de fonctionnement, notamment le nombre d’heures de délégation dont bénéficient les représentants de proximité pour l’exercice de leurs attributions.

Si à l’heure actuelle, le Code du travail laisse une grande place à la négociation collective, il prévoit sur certains points, des dispositions supplétives (c’est-à-dire les dispositions qui s’appliquent à défaut d’accord). Il convient cependant de préciser que le Code du travail ne prévoit aucune disposition supplétive concernant les représentants de proximité.

Il est ainsi recommandé de faire en sorte que l’accord instituant les représentants de proximité (ou un équivalent), soit le plus complet et le plus précis possible puisqu’en cas de doute, le Code du travail ne pourra pas répondre à la question.

Dans la pratique, nous pouvons constater que les clauses suivantes peuvent être utiles :
- Périmètre de désignation ou de mise en place des représentants de proximité : complémentaire au nombre de représentants de proximité prévu par l’article L. 2313-7 du Code du travail. Il convient de préciser sur ce point que le périmètre de désignation des représentants de proximité n’est pas forcément lié au périmètre de mise en place du CSE. Ainsi, il est possible de mettre en place des représentants de proximité au niveau d’un site, non reconnu comme étant un établissement distinct
- Les moyens octroyés aux représentants de proximité : Plusieurs moyens peuvent être envisagés :
- Les heures de délégation : l’accord doit nécessairement prévoir un crédit d’heures de délégation pour que les représentants de proximité puissent exercer leurs missions. Ce crédit d’heures paraît d’autant plus indispensable lorsque les représentants de proximité ne sont pas membres titulaires du CSE et ne disposent pas déjà ainsi, d’un crédit d’heures. Sur ce point, il convient de préciser que certains accords prévoient le « don » d’heures de délégation par les membres titulaires du CSE aux représentants de proximité. Nous attendons sur ce point, une position des juges ou de l’administration afin de s’assurer que cette pratique n’est pas susceptible de constituer un délit d’entrave (puisque les membres du CSE disposeraient d’un crédit d’heures diminué pour exercer leurs missions..). Plus que le crédit d’heures de délégation, il semble également indispensable de prévoir les règles entourant l’utilisation de ces heures de délégation. Ces dernières sont-elles soumises aux mêmes règles d’utilisation que le crédit d’heures de délégation des membres du CSE ? Dans tous les cas, il semble nécessaire de préciser si oui ou non, les heures de délégation des représentants de proximité peuvent être mutualisées ou reportées. Il convient de préciser qu’en l’absence de précisions au sein de l’accord, cela vaut absence de crédit d’heures spécifique pour les représentants de proximité puisque le Code du travail ne prévoit aucune disposition à titre supplétif.
- Budget de fonctionnement et dépenses : il est possible de mettre à la disposition des représentants de proximité un budget de fonctionnement afin que ces derniers puissent exercer au mieux leurs missions, si ces dernières nécessitent notamment des déplacements ou encore, la fourniture de certains produits ou services.
- Formation des représentants de proximité : il convient de préciser sur ce point que l’article L. 2315-61 du Code du travail dispose que le CSE peut décider de consacrer une partie de son budget de fonctionnement au financement de la formation des représentants de proximité. Mais il est cependant possible de prévoir dans l’accord mettant en place les représentants de proximité le financement d’une formation par l’employeur. De même, la question se pose de savoir comment sera traité le temps passé en formation par les représentants de proximité : il serait judicieux que l’accord traitement également cette question.
- Moyens de fonctionnement : il est possible de prévoir par accord que les représentants de proximité bénéficient d’un local ou encore, d’un ordinateur et d’une connexion internet ou bien, d’une ou plusieurs ligne(s) de téléphone fixe ou portable. Ces moyens pourraient être financés soit par l’employeur et/ou par le CSE. Dans tous les cas, il paraît indispensable de prévoir les moyens nécessaires à la bonne exécution des missions qui sont confiées aux membres du CSE. La mise à disposition de moyens aux représentants de proximité sera donc dépendante de l’importance des missions et des responsabilités confiées aux représentants de proximité.

Enfin, nous préciserons également que les représentants de proximité sont mis en place dans les conditions prévues par le Code du travail, ce sont des salariés protégés, même lorsqu’ils ne sont pas membres du comité social et économique (art. L. 2411-11, 4°).

Ainsi, le licenciement d’un représentant de proximité ou d’un candidat aux fonctions de représentant de proximité ne peut intervenir qu’après autorisation de l’inspecteur du travail (art. L. 2411-8, art. L. 2411-9).

Quel est l’intérêt de mettre en place des représentants de proximité ?

La création et la mise en place du CSE a eu pour conséquences directe une diminution du nombre de représentants du personnel total ainsi qu’une diminution des heures de délégation offertes aux représentants du personnel, de façon globale.

Ainsi, la mise en place du CSE peut entraîner une perte de proximité des élus avec le terrain, notamment dans cadre des entreprises multi-sites.

Les représentants de proximité ont donc été créés « afin d’éviter que la fusion des institutions représentatives du personnel au sein d’une instance unique (le comité social et économique) et l’unification du périmètre de la représentation du personnel qui en découle ne se traduisent, dans certains cas, par une centralisation excessive de cette représentation au niveau de l’entreprise » selon le ministère du travail (100 Questions/Réponses sur le comité social et économique par le ministère du travail, page 21).

Ainsi, l’intérêt des représentants de proximité tient dans une représentation de proximité pour recueillir les questions locales et éviter une centralisation excessive au niveau de l’entreprise de la représentation des salariés.

Pour accentuer cette proximité, les représentants de proximité peuvent jouer un rôle en matière de présentation des réclamations individuelles ou collectives dans les différents sites géographiques de l’entreprise, ils peuvent également jouer un rôle en matière de prévention grâce à leur proximité des salariés.

La création et la mise en place du CSE laissent aux entreprises et aux partenaires sociaux de grandes marges de manœuvre pour adapter les relations collectives à l’image et au fonctionnement de l’entreprise.

Les représentants de proximité sont une illustration de la place laissée au dialogue social pour construire un système de relations collectives propres à défendre les intérêts des salariés, tout en s’adaptant au fonctionnement et à la nature de l’activité de l’entreprise.

Laura Chambon
Juriste et formatrice en droit social
Cabinet Consilium
contact chez cabinet-consilium.com

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

11 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Commenter cet article

Discussions en cours :

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 340 membres, 27875 articles, 127 257 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Assemblées Générales : les solutions 2025.

• Avocats, être visible sur le web : comment valoriser votre expertise ?




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs