Dans cette affaire, une salariée, engagée en qualité de coiffeuse a fait l’objet d’un licenciement. Cette salariée a saisi par la suite la juridiction prud’homale d’une demande de rappel de salaires au titre d’heures supplémentaires et de congés payés afférents.
La salariée invoque à l’appui de sa demande la modification unilatérale par l’employeur de son temps de travail et par conséquent, de sa rémunération.
La salariée percevait un salaire correspondant à 186,33 heures mensuelles de travail composées de 151,67 heures de travail à temps complet et de 34,66 heures supplémentaires majorées à 25% depuis décembre 2010 a minima.
Seulement, à partir du mois d’août 2011, les heures supplémentaires de la salariée lui ont été retirées et par conséquent, la rémunération de la salariée, ne travaillant que 35 heures hebdomadaires, a fait l’objet d’une diminution.
Les juges du fond déboutent la salariée de ses demandes de rappel de salaires et de congés payés afférents au titre des heures supplémentaires. Ces derniers considèrent en effet, que la perte de revenus de la salariée ne pouvait être sanctionnée que par l’attribution de dommages et intérêts pour réparer le préjudice subi par cette dernière. Pour les juges du fond, la salariée n’ayant pas effectué les heures supplémentaires, elle ne pouvait prétendre à leur rémunération, le salaire étant la contrepartie de la fourniture d’une prestation de travail.
La salariée forme un pourvoi en cassation.
La chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 7 mars 2018 (n°17-10.870) casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel.
La Cour considère que les heures supplémentaires constituaient en l’espèce, un élément de la rémunération prévue au contrat de travail de la salariée. Par conséquent, l’employeur ne pouvait modifier la rémunération de la salariée de manière unilatérale. Ainsi, la cour d’appel ne pouvait débouter la salariée de ses demandes au titre que cette dernière ne pouvait être rémunérée sur la base d’heures supplémentaires non effectuées, se basant sur le principe selon lequel la rémunération est la contrepartie d’une prestation de travail.
Pour rendre sa décision, la chambre sociale se base sur l’article L. 1221-1 du Code du travail qui dispose que le contrat de travail est soumis aux règles de droit commun.
Par règle de droit commun, il convient d’entendre le régime général des obligations.
Par conséquent, l’ancien article 1134 du Code civil, devenu article 1103 qui dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits s’appliquaient en l’espèce.
En application de cette disposition l’employeur, tenu par les stipulations du contrat de travail, ne pouvait modifier unilatéralement le temps de travail de la salariée et par conséquent, sa rémunération.
En effet, de manière générale, la modification d’un élément essentiel du contrat de travail nécessite l’accord du salarié.
Pour rappel, la rémunération étant un élément essentiel du contrat de travail, toute modification concernant cette dernière nécessite l’accord du salarié, que la modification soit minime ou substantielle ou encore, qu’elle touche à la structure de la rémunération, sans que le montant final ne varie (Cass. soc 18 mai 2011 n° 09-69175).
Ainsi, par application logique de ce principe, la modification de la durée du travail d’un salarié nécessite l’accord du salarié car :
- Elle constitue un élément essentiel du contrat de travail (Cass. soc. 20-10-1998 n° 96-40.614) ;
- Elle détermine la rémunération du salarié (Cass. soc. 31-3-1999 n° 97-41.819).
A défaut de solliciter et d’obtenir l’accord du salarié pour modifier un élément essentiel de son contrat de travail, ce dernier se poursuit aux conditions initiales (Cass. soc. 5-10-1993 n° 90-42.064).
Dans cette affaire, par application de ce principe, la salariée pouvait donc prétendre à un rappel de salaire, son contrat de travail n’ayant en réalité, jamais été modifié et ce, même si cette dernière n’a pas effectué d’heures supplémentaires.
Nous attendons ainsi avec impatience la décision qui sera rendue par la Cour d’appel de renvoi.
Source : Cour de cassation, Chambre sociale, 7 mars 2018, n°17-10.870.