Succession : vous héritez d’un legs, gare à la prescription !

Par Daisy Labecki-Petit, Avocat.

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Ce que vous allez lire ici :

Un legs est un don par testament, transmis à une personne spécifique appelée légataire. Contrairement à un héritage, le légataire doit demander la délivrance des biens dans un délai de cinq ans, sinon il risque de perdre ses droits sur ceux-ci, selon la prescription du Code civil.
Description rédigée par l'IA du Village

Le droit des successions est une branche du droit civil particulièrement technique.
Parmi les nombreuses questions juridiques qui peuvent surgir dans le cadre d’une succession, celle de la prescription de la délivrance d’un legs est un sujet de grande importance, tant pour les héritiers que pour les légataires.
La prescription est un mécanisme qui permet de limiter dans le temps l’exercice d’un droit. La Cour de cassation a eu à se prononcer sur la prescription applicable à l’action en délivrance d’un legs universel : analyse de l’examen de l’arrêt de la Cour de cassation du 24 octobre 2024 (N°22-20.367).

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Qu’est-ce qu’un legs ?

Avant de plonger dans les subtilités de la prescription de délivrance, il est essentiel de comprendre ce qu’est un "legs".
Le legs est un don fait par testament, qui consiste en la transmission de biens ou de droits à une personne désignée, appelée le légataire.
Contrairement à l’héritage qui s’acquiert automatiquement à la mort du défunt, le legs nécessite une demande en délivrance des biens concernés.
Ainsi, un legs peut être universel, c’est-à-dire qu’il porte sur l’ensemble des biens du défunt, ou particulier, s’il ne concerne qu’un bien ou un groupe de biens spécifiques.
Le légataire universel, qui hérite de l’intégralité du patrimoine du testateur, doit solliciter la délivrance de ses biens, souvent auprès des héritiers réservataires (ceux qui ne peuvent pas être déshérités, comme les enfants ou les parents du défunt).
Un légataire n’est donc pas un héritier.

La prescription en droit civil : un mécanisme fondamental.

La prescription est un concept clé en droit civil. Elle permet de déterminer dans quel délai une personne peut revendiquer un droit ou une action en justice.
Plus concrètement, la prescription impose une limite de temps pour exercer un droit, au-delà de laquelle celui-ci est éteint.
Cela signifie que le légataire ne peut plus agir et ne peut donc recevoir la donation qui lui avait été faite.

Analyse de l’arrêt de la Cour de cassation du 24 octobre 2024.

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, le légataire universel, M. [X], demandait la délivrance d’un legs contenu dans un testament daté du 13 juillet 2007, après le décès de [N] [E] survenu le 8 décembre 2008.
La question centrale était celle du délai de prescription applicable à la demande en délivrance de ce legs.

Le contexte.

M. [X] se trouve dans une situation où, bien qu’il ait été désigné comme légataire universel par testament, il n’a pas reçu les biens à lui attribuer.
Il a alors formé une demande en justice pour obtenir la délivrance du legs.
Toutefois, la cour d’appel a estimé que cette demande était prescrite, en vertu de l’article 2224 du Code civil, qui prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

L’article 2224 du Code civil.

La question qui se posait était celle de savoir si cette demande en délivrance était soumise à la prescription quinquennale prévue par l’article 2224 du Code civil, ou si elle relevait de la prescription décennale, comme l’avait soutenu M. [X].
Ce dernier invoquait l’article 780 du Code civil, qui régit les actions relatives à la transmission des biens dans le cadre des successions.
La Cour de cassation a clairement affirmé que l’action en délivrance d’un legs, bien qu’elle porte sur des biens successoraux, présente le caractère d’une action personnelle.
En conséquence, cette action est soumise à la prescription quinquennale de l’article 2224, et non à la prescription décennale des actions en matière de succession.
Ce principe est fondé sur la nature de l’action en délivrance, qui est personnelle, c’est-à-dire qu’elle dépend de la volonté du légataire de faire valoir ses droits devant le juge, et non d’une action directement liée au transfert des biens.
Il y a donc un délai de 5 ans pour solliciter la délivrance du leg à son profit et son paiement.

Le point de départ de la prescription.

La cour d’appel avait fixé le point de départ de la prescription au 8 décembre 2008, date du décès du testateur.
Il s’agit d’une date clé, car c’est à partir de cette date que M. [X] pouvait légitimement connaître les faits qui lui permettaient d’agir.
La Cour de cassation a validé ce raisonnement, soulignant que le délai de prescription commence à courir dès que le légataire prend connaissance des faits qui justifient sa demande.
La cour a également précisé que les actions formées lors d’un autre litige en 2014, portant sur l’interprétation du testament, n’avaient pas interrompu le délai de prescription.
Le litige sur l’interprétation n’étant pas une demande en délivrance proprement dite, la prescription n’avait pas été suspendue.

Les dangers de l’oubli de la prescription : une vigilance cruciale.

Cet arrêt met en lumière les risques pour les légataires qui tardent à demander la délivrance de leur legs.
En effet, le non-respect des délais de prescription peut entraîner la perte définitive des droits sur les biens légués.
Il est donc essentiel pour les légataires de se rappeler qu’une action en délivrance doit être entreprise dans un délai de cinq ans après le décès du testateur.
Cette règle s’applique quelle que soit la situation familiale, et même si des différends sur l’interprétation du testament existent, ou qu’un contentieux successoral soit en cours d’instance et non jugé.

Comment demander la délivrance d’un legs ?

Il faut tout d’abord vérifier le testament pour s’assurer de sa validité. Ensuite, il convient de vérifier la légalité du legs en lui-même puis étudier le(s) bien(s) concerné(s).
Cette délivrance peut se faire de deux façons : amiable ou judiciaire.
De manière générale, le légataire sollicite auprès des héritiers ou du notaire en charge de la succession, la délivrance de son legs, c’est-à-dire qu’il revendique la donation reçue et confirme son souhait de l’obtenir.
A défaut, il faudra saisir le tribunal judiciaire pour en obtenir sa délivrance forcée.
En conséquence, il est nécessaire de retenir que contrairement à un héritier qui à vocation à recevoir la succession du défunt, un légataire doit réaliser des démarches formelles et ce dans un délai imparti sous peine de ne pas obtenir ce bien qui lui avait été pourtant donné par testament.

Conclusion : l’importance de bien comprendre la prescription en droit successoral.

L’arrêt du 24 octobre 2024 rappelle avec force qu’en matière de délivrance de legs, la prescription quinquennale prévue à l’article 2224 du Code civil s’applique.
Cela impose aux légataires une vigilance constante concernant les délais à respecter pour revendiquer leurs droits.
Si la prescription est un outil essentiel pour la sécurité juridique des héritiers et légataires, elle constitue également un risque si elle n’est pas bien comprise et observée.
Pour les justiciables, il importe donc de s’assurer, dès le décès d’un proche que tous les droits soient préservés, et que les actions nécessaires sont entreprises dans les délais prévus.

Daisy Labecki-Petit
Avocat au Barreau de Draguignan
https://labecki-avocat.com

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