Tendances du recrutement juridique en 2025 : focus sur l'état d'esprit et les priorités des salariés et collaborateurs.

Tendances du recrutement juridique en 2025 : focus sur l’état d’esprit et les priorités des salariés et collaborateurs.

Nathalie Hantz, Rédaction du Village de la Justice

Le recrutement pour les professionnels du droit en France traverse actuellement une période faite de nuances. Alors que le recrutement global des cadres connaît un ralentissement notable en 2024, avec une baisse de 8 % par rapport à l’année précédente et des perspectives de nouvelle baisse en 2025 [1], le secteur juridique semble maintenir une certaine stabilité.
À titre d’exemple, 30 % des avocat(e)s interrogés par le CNB à ce sujet envisageait de recruter au moins un avocat en 2024. 19 % envisageait au moins un recrutement de collaborateur ou associé [2].

Voilà pour la tendance en chiffre, qui ne révèle cependant pas l’évolution de l’état d’esprit des salariés et collaborateurs. Vous le savez, l’attractivité d’un poste ou d’un cabinet ne se résume plus à quelques critères traditionnels. Juristes en entreprise ou avocats, ils expriment un ensemble d’attentes plus complexes et diversifiées, et posent ainsi les nouvelles règles du jeu du recrutement. En voici une synthèse.

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La rémunération : un critère central mais complexe.

La rémunération demeure un facteur important dans ses choix de carrière. Elle figure même en tête des critères lors de la recherche d’une collaboration (60 % des collaborateurs la citent comme critère le plus important) et constitue la principale raison de quitter un cabinet (52 % des collaborateurs partant le font pour une meilleure rémunération). [3]

Malgré une satisfaction globale concernant la rémunération en légère hausse (53 % des avocats satisfaits en 2024, +3 points par rapport à 2023, toujours selon l’enquête du CNB déjà citée), ne pas en être satisfait reste un moteur de départ majeur. Les fortes rémunérations observées dans les spécialités en tension (Fusion-acquisition, Compliance, Protection des données etc. [4]) créent un effet de benchmark, une comparaison entre les performances des entreprises ou cabinets. Les professionnels évoluant dans des domaines moins "porteurs" ou dans des structures moins généreuses peuvent ressentir un décalage et une sous-valorisation, ce qui alimente le désir de chercher des emplois mieux rémunérés, ailleurs.

Flexibilité, télétravail et conditions de travail : bienvenue dans l’ère de l’hybridation !

Deuxième critère donc : l’organisation du travail, qui inclue le télétravail et plus largement la flexibilité dans l’organisation... Qui veut recruter rapidement n’oubliera pas de mentionner cette possibilité dans son offre d’emploi !

D’autant que la pratique du télétravail est désormais bien installée, ce que nous avons pu constater dans notre enquête "Où en est-on du télétravail chez les juristes et les avocats ?" : environ 60 % des professionnels du droit télétravaillent, et 69 % des cabinets d’avocats le permettent à leurs collaborateurs. Chez les juristes d’entreprise, le rapport présentiel/télétravail satisfait une large majorité (85 %), un chiffre en forte progression.

Les avantages perçus sont multiples : meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, plus grande flexibilité dans l’organisation quotidienne, réduction du stress et du temps perdu dans les transports, et accès à des opportunités professionnelles géographiquement plus éloignées, potentiellement mieux rémunérées. Les outils collaboratifs, lorsqu’ils sont bien mis en place (ordinateur portable fourni dans 72 % des cas, plateforme collaborative dans 54 % ), peuvent même fluidifier le travail d’équipe.

Cependant, le télétravail présente aussi des inconvénients potentiels : risque d’isolement social et professionnel, difficulté accrue à délimiter la frontière entre travail et vie privée, intégration plus complexe pour les nouveaux arrivants, et perte des interactions informelles et de l’apprentissage "sur le tas", particulièrement préjudiciable en début de carrière. Maintenir le lien social et la culture d’entreprise devient un défi si le télétravail devient la norme absolue.

Face à cela, une tendance se dessine chez les employeurs. L’enquête Wolters Kluwer 2024 "Avocats et Juristes face au futur" révèle qu’une majorité substantielle (73 %) des cabinets et directions juridiques exigent désormais une présence au bureau d’au moins quatre jours par semaine. En France, 46 % des répondants à cette enquête déclarent être soumis à cette exigence de quatre jours de présence hebdomadaire [5].

On identifie clairement la source possible de tension. D’un côté, les salariés et collaborateurs plébiscitent l’équilibre offert par le modèle hybride, et une part significative souhaiterait même télétravailler davantage. De l’autre, les employeurs poussent pour un retour plus marqué au bureau. Le compromis pourrait résider dans la notion de "souplesse" – moins une question de nombre de jours fixes qu’une capacité à adapter l’organisation selon les besoins, tout en préservant la cohésion et la transmission des informations.

Les perspectives d’évolutions comme ligne d’horizon.

Les employeurs sont aussi évalués à l’aune des perspectives d’avenir qu’ils offrent. Le manque de perspectives d’évolution claires est d’ailleurs une raison majeure poussant les collaborateurs à quitter leur cabinet (38 % des partants), selon l’enquête du CNB. La capacité à se former et à monter en compétences est également un critère de choix important lors de la recherche d’une collaboration.

Pour les avocats collaborateurs, deux éléments sont particulièrement déterminants : la possibilité de développer leur propre clientèle personnelle et la perspective d’une association à terme. Le fait que plus d’un tiers des cabinets envisagent d’associer leurs collaborateurs témoigne de la reconnaissance de cet enjeu pour la rétention des talents [6].

Du côté des juristes, leurs futurs employeurs ont tout intérêt à se démarquer sur ce point, puisqu’ils sont 62% à penser qu’ils n’ont pas de perspectives d’évolutions dans leur direction [7].

Culture d’Entreprise, autonomie et reconnaissance : à ne pas oublier !

L’ambiance et la qualité des relations de travail, ainsi que le degré d’autonomie accordé, ont une influence jugée majeure sur le bien-être au travail par une écrasante majorité de collaborateurs.

Sans doute que juristes et avocats ne perçoivent pas les choses de la même façon : le travail en entreprise peut être perçu comme plus structuré, davantage axé sur l’équipe et moins soumis à la pression individuelle que dans certains cabinets d’avocats. Par ailleurs, les attentes spécifiques des clients envers leurs conseils externes contribuent à façonner la culture et les exigences propres aux cabinets.

Autre point sensible : celui de la reconnaissance. Bien que cruciale pour la motivation et le sentiment d’appartenance, elle est souvent le parent pauvre des discussions, notamment lors des processus de recrutement. Ce manque de reconnaissance peut générer une insatisfaction diffuse mais non sans conséquence...

Culture d’entreprise, ambiance, reconnaissance : voilà des éléments tangibles qui participent à la fameuse QVCT (Qualité de vie et conditions de travail), un des grands enjeux 2025 en matière de RH.

Intelligence artificielle : s’adapter à la nouvelle donne.

On en serait presque à s’excuser d’aborder encore ce sujet mais, à l’inverse, ne pas le faire pourrait nous être reproché, à juste titre en 2025.

L’IA, notamment générative, est une réalité intégrée dans le quotidien de nombreux professionnels du droit. Une majorité de juristes (76 %) et d’avocats (68 %) déclarent l’utiliser au moins une fois par semaine, voire quotidiennement pour plus d’un tiers d’entre eux, selon l’enquête Wolters Kluwer déjà citée.

Surtout, les futurs recrues y seront de plus en plus formés, à l’université ou dans les écoles d’avocats notamment.

Côté recrutement, cela signifie donc que les organisations qui n’auraient pas encore intégré l’IA de façon formelle et formalisée pourraient être jugées à la traîne par ceux qu’ils souhaitent recruter...

Résumons-nous...

Le marché du recrutement en France est clairement entré dans une nouvelle ère, davantage dictée par les attentes et l’état d’esprit des salariés et collaborateurs, et le recrutement juridique n’y échappe pas. Pour attirer et fidéliser les talents, les employeurs – cabinets d’avocats comme directions juridiques – doivent désormais composer avec un ensemble de priorités claires et interdépendantes :
- Rémunération
- Flexibilité et l’équilibre de vie.
- Perspectives de carrière
- Culture de travail positive
- Adaptation aux nouvelles technologies

Face à ces attentes, les employeurs doivent repenser leur proposition de valeur. Il ne s’agit plus seulement d’offrir un salaire compétitif ou le prestige d’une marque, mais de proposer une expérience collaborateur complète et cohérente. Cela implique une transparence accrue dès le processus de recrutement sur la culture réelle de l’entreprise, les conditions de travail, la politique de rémunération et les parcours d’évolution possibles. Cela demande également une adaptabilité constante des politiques de travail, des modes de management (notamment pour gérer des équipes hybrides) et potentiellement des modèles économiques face à l’impact de la technologie.

Les employeurs qui parviendront à tirer leur épingle du jeu seront ceux qui comprendront profondément cet état d’esprit et sauront y répondre en offrant non seulement un emploi, mais une véritable trajectoire de carrière, enrichissante, équilibrée et en phase avec les aspirations contemporaines.

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Nathalie Hantz, Rédaction du Village de la Justice

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L'auteur déclare avoir en partie utilisé l'IA générative pour la rédaction de cet article (recherche d'idées, d'informations) mais avec relecture et validation finale humaine.

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