Le Code des Douanes de l'Union (CDU) : une opportunité économique ? Par Alexandre Siat, Avocat.

Le Code des Douanes de l’Union (CDU) : une opportunité économique ?

Par Alexandre Siat, Avocat.

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Explorer : # valeur en douane # opérateur Économique agréé # renseignements contraignants # dématérialisation des procédures

Ce nouveau Code des Douanes, issu du règlement n° 952/2013 du 9 octobre 2013, annule et remplace le Code des douanes communautaires (CDC) et entrera en vigueur le 1er mai 2016.

Il illustre également la nouvelle hiérarchie des normes dans la mesure où ce Code est accompagné d’un règlement portant sur les actes délégués (règlement n° 2015/2446 du 28 juillet 2015) et un règlement portant sur les actes d’exécution (règlement n° 2015/2447 du 24 novembre 2015).

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Le CDU apporte des nouveautés sur de nombreux domaines, notamment la valeur en douanes (I), le statut d’opérateur économique agrée (OEA – II), la modification des règles concernant les renseignements contraignants (III) et sur le commissionnaire en douanes et la prescription (IV).

Enfin, il est fixé un objectif de dématérialisation totale des procédures douanières pour 2020.

I. La valeur en douane (articles 69 et s. du CDU)

La valeur en douane représente l’assiette sur laquelle les droits sont calculés lors d’une importation.

Elle n’est pas identique au prix de vente des marchandises car à ce prix, il convient d’ajouter ou retrancher certains coûts pour déterminer le prix effectivement payé ou à payer.

En ce domaine, deux nouveautés méritent particulièrement qu’on s’y intéresse dans la mesure où elles modifient de manière importante le droit en vigueur.

  • La fin de la règle dite de la 1ère vente : cette règle permettait d’éviter d’additionner au prix initial la réintégration de coûts ajoutés lors des ventes successives avant la 1ère mise en circulation d’un bien sur le territoire communautaire.
    Dorénavant, ce sera la valeur retenue lors de la dernière vente précédant la mise sur le marché qui servira d’assiette au calcul des droits de douane.
    Cette modification entre dans le cadre d’une préservation plus importante des intérêts financiers européens car elle permet de calculer les droits sur une assiette plus élevée.
  • Les redevances : sous le régime du CDC, les redevances devaient être ajoutées au prix de vente que si trois conditions étaient remplies (article 159 des dispositions d’application du Code). Or, le règlement d’exécution du CDU prévoit, dans son article 136, que dorénavant les redevances seront à ajouter dès lors qu’une seule condition visée à cet article est remplie.

Ainsi, il résulte de ce qui précède qu’il sera plus difficile à l’avenir de ne pas incorporer les redevances dans la valeur en douane.

II. L’opérateur économique agréé (articles 38 et s. du CDU)

Le CDU entend favoriser les opérateurs économiques souhaitant obtenir un agrément communautaire leur permettant de bénéficier d’un statut leur facilitant les démarches douanières.

Il existe trois types d’autorisation, à savoir l’OEA-C pour les simplifications douanières, l’OEA-S pour les matières relevant de la sûreté-sécurité et l’OEA-Full pour les opérateurs qui demandent à bénéficier des deux précédents statuts.

Ce statut offre de nombreux avantages, notamment :

  • Dédouanement centralisé (DC) au niveau communautaire : le bureau de déclaration n’est pas forcément le bureau d’arrivée des marchandises sur le territoire communautaire. Ce dispositif va mettre les douanes des pays de l’Union en concurrence pour les sociétés ayant une implantation sur plusieurs de ces pays, car les opérateurs vont étudier le comportement des administrations des différents pays pour déterminer où effectuer les déclarations.
  • Auto-évaluation : ce dispositif permet aux opérateurs d’obtenir une délégation pour certaines formalités douanières, de déterminer eux-mêmes le montant des droits à payer et de réaliser certains contrôles sous supervision douanière.
    Ainsi, les OEA bénéficient d’une plus grande liberté, ce qui devrait avoir un impact économique positif pour leur activité.
  • Garantie globale : le statut d’OEA permet de déposer une garantie globale pour la réalisation des formalités douanières plus faibles (jusqu’à 30% de réduction) que le montant cumulé des garanties nécessaires actuellement.
    Ce dispositif constitue un nouveau bénéfice économique pour les entreprises car le coût financier de cette garantie sera moins élevé.
  • Contrôle douanier : le statut d’OEA a pour corollaire un allègement des contrôles, ainsi que leur notification préalable, le choix du lieu de contrôle et la priorité dans la réalisation des contrôles.

Il résulte de ces différents points que les opérateurs économiques ont un intérêt financier et pratique évident à bénéficier du statut d’OEA, qui va certainement connaître un essor à la suite de l’entrée en vigueur du CDU.

III. les renseignements contraignants (articles 33 et s. du CDU)

Le CDU harmonise à la fois les conditions de délivrance des renseignements tarifaires contraignants (RCT) et des renseignements contraignants en matière d’origine (RCO), qui peuvent être assimilés à des rescrits en droit français, et les conditions de validité.

Ainsi, un seul RCT ou RCO ne peut être déposé par titulaire et pour une même marchandise afin d’éviter que ces RC ne soient contradictoires, ce qui peut arriver actuellement si un opérateur dépose des demandes identiques dans des États différents.

L’administration a alors un délai maximum de 120 jours pour traiter la demande et l’existence de ces renseignements contraignants devra figurer dans les dossiers d’importation.

En outre, la durée de validité de ces RC sera de 3 ans (contre 5 ans pour les RCT aujourd’hui). Enfin, ils deviennent également contraignants pour les opérateurs alors qu’ils ne l’étaient que pour l’Administration sous le régime du CDC.

IV. Commissionnaire en douanes et prescription

Le CDU met fin à la représentation directe (établissement des déclarations en douane au nom et pour le compte d’un tiers) et, en conséquence, au monopole des commissionnaires en douane agréés.

Cette modification est importante au niveau national dans la mesure où les commissionnaires étaient, en dehors des sociétés qui s’occupaient elles-mêmes de leurs formalités douanières, les prestataires obligatoires pour les opérations d’importation ou d’exportation.

Ainsi, la perte du monopole, cumulée au dédouanement centralisé, pourrait conduire à une perte de compétitivité du pays en matière de procédures douanières et ce d’autant plus qu’il n’existe pas de formation spécifique relative aux procédures de dédouanement.

Par ailleurs, la réglementation en matière de prescription pourrait également devenir un critère de choix du pays dans lequel le dédouanement est effectué car le CDU fixe le délai de prescription entre 5 et 10 ans en fonction de la législation des états (article 103 du CDU).

A cet égard, le délai en France passera de 3 ans à 5 ans au minimum pour les délits douaniers.

En conclusion, il ressort du CDU et de ses actes d’exécution qu’il a vocation à mieux garantir les intérêts économiques de l’Union, tout en permettant aux opérateurs économiques de gagner en compétitivité par la mise en place de procédures plus attrayantes.

Alexandre SIAT
Avocat
Cabinet SAJE

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Discussions en cours :

  • par jd , Le 15 mars 2017 à 13:01

    Bonjour ,
    comme annoncé dans l’article, c’est effectif ,
    depuis le 1er Mars, le délai de prescription des délits douaniers est rallongé de 3 ans , soit désormais 6 ans.

    https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2017/2/27/JUSX1607683L/jo/texte

  • par ED , Le 7 avril 2016 à 17:33

    Cher Confrère,
    La représentation directe ne disparait pas, mais se trouve ouverte à l’ensemble des opérateurs (et pas uniquement aux commissionnaires en douane, comme précédemment). Ainsi, à titre d’exemple, une entité d’un groupe pourra dédouaner au nom et pour le compte de ses sociétés-sœurs.
    VBD

  • par PSN , Le 1er avril 2016 à 23:43

    Merci Maître pour cet article de synthèse. Je partage votre avis sur le fait que la PDUC va profondément changer le visage du dédouanement en Europe.
    Juste une précision sur la prescription. C’est le droit de reprise sur les droits de douane qui passe à cinq ans. La prescription des infractions douanières , qui est alignée sur la durée de prescription des délits de droit commun reste fixée à trois ans. Enfin tant que le projet de loi actuellement en discussion n’est pas adoptée. C’est aussi le cas des taxes nationales perçue au moment de l’importation comme la TVA. Ainsi en cas d’ISD l’administration disposera d’un délai de trois pour poursuivre l’infraction, réclamer LK e paiement de la TVA mais disposera de 5ans pour poursuivre le recouvrement des droits de douanes et les droits annexes éventuels (DAD par exemple).
    Enfin si la douane engage des poursuites judiciaires, la prescription devient trentenaire.
    Y..P

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