I. Le traitement fiscal de l’indemnité.
Il est primordial de savoir si l’indemnité perçue est imposable au titre de l’impôt sur le revenu ou au titre de l’impôt sur la fortune immobilière.
A) L’impôt sur le revenu.
L’indemnité versée en réparation d’un préjudice corporel peut prendre la forme d’un capital versé en une seule fois ou d’une rente. Le traitement fiscal de l’indemnité, en matière d’impôt sur le revenu, varie en fonction de la forme du versement.
- Versement de l’indemnité en capital.
Les indemnités versées en réparation d’un préjudice corporel ou moral (donc non-économique) sous forme de capital ne sont pas imposées au titre de l’impôt sur le revenu.
Toutefois, il existe une exception puisque les indemnités perçues en réparation d’un préjudice moral sont imposables dans la catégorie des traitements et salaires pour la fraction excédante 1 million d’euros [1].
Cette exception ne vaut que pour les indemnités versées en réparation d’un préjudice moral. Les autres formes de préjudices (corporel par exemple) ne sont pas visées et ne sont donc pas soumises à l’impôt sur le revenu.
- Versement de l’indemnité en rente.
Les indemnités versées sous forme de rente viagère sont imposables à l’impôt sur le revenu [2].
Il existe également ici une exception puisque sont affranchis de l’impôt sur le revenu les rentes viagères servies en représentation de dommages-intérêts pour la réparation d’un préjudice corporel ayant entraîné pour la victime une incapacité permanente totale l’obligeant à avoir recours à l’assistance d’une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie [3]. Depuis 2018, l’exonération n’est plus limitée aux seules rentes versées en exécution d’une décision de justice [4].
Par exemple, les rentes versées à la victime d’un accident de la circulation en exécution d’une décision de justice sont imposables à l’impôt sur le revenu [5].
En revanche, sont exonérées les rentes versées à la victime d’un accident de la circulation ou d’un accident domestique en exécution d’une transaction intervenue entre la victime et la compagnie d’assurances si cet accident a entrainé pour la victime une incapacité permanente totale l’obligeant à avoir recours à l’assistance d’une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie [6].
B) L’impôt sur la fortune immobilière (IFI).
L’assiette de l’IFI est limitée aux actifs immobiliers de sorte que les indemnités perçues en sont exclues.
Dans l’hypothèse où le montant de l’indemnité a servi à acquérir un bien immobilier, la valeur vénale de ce bien sera imposable à l’IFI. Toutefois, si le bien a été acquis avant le 1ᵉʳ janvier 2018, le montant de l’indemnité perçue pourra être déduit de l’assiette de l’IFI.
Cette possibilité de déduction est applicable que l’indemnité ait été perçue sous forme de rente ou sous forme de capital.
Toutefois, il appartient au contribuable de prouver que la somme a été employée à l’acquisition d’un immeuble car à défaut, seule une fraction correspondant au prorata du patrimoine imposable à l’IFI sur le patrimoine global est déductible. Cette preuve est plus facile à rapporter lorsque l’indemnité a été perçue en capital.
II. Impact successoral de l’indemnité.
La déclaration de succession doit comporter tous les biens du défunt au jour du décès.
Dès lors, une créance d’indemnité qui n’aurait pas encore été versée au jour du décès du défunt doit également être indiquée dans la déclaration de succession.
Toutefois, les rentes et indemnités versées ou dues au défunt en réparation d’un préjudice corporel lié à un accident de la vie ou à une maladie sont déductibles de l’actif successoral [7].
Par ailleurs, sont également déductibles les sommes versées aux ayants droits des victimes en réparation de préjudices moral et économique subi par eux du fait du dommage corporel subit par la victime directe de l’actif successoral de leur propre succession. Il est toutefois nécessaire que ces sommes aient un caractère indemnitaire. Cependant, il n’est pas possible de déduire les sommes qui ont été versées aux ayants droits de la victime en exécution d’un contrat d’assurance postérieurement au décès de l’assuré [8].
Quant à l’étendue de la déduction, celle-ci est limitée au montant nominal de l’indemnité ou de la rente. Il n’est donc pas possible de tenir compte d’une éventuelle revalorisation de l’indemnité.
Pour bénéficier de cette possibilité de déduction, il est nécessaire de ramener la preuve de l’existence de la rente ou de l’indemnité. Par exemple, la preuve peut être apportée par la copie des quittances de versement.
III. La gestion patrimoniale de l’indemnité perçue.
Il est important de connaître les possibilités de placement et de transmission de l’indemnité perçue ainsi que leurs conséquences fiscales.
A) L’assurance-vie.
L’indemnité perçue peut être placée sur un contrat d’assurance-vie.
En effet, le contrat d’assurance-vie reste un outil de transmission très avantageux selon la date de souscription du contrat, la date de versement des primes et l’âge de l’assuré au jour du versement des primes [9].
La principale difficulté de ce placement résulte du fait que l’assurance-vie n’intègre pas l’actif successoral du défunt [10]. En conséquence, le montant de l’indemnité ne pourra pas s’imputer sur le montant inscrit sur le contrat d’assurance-vie, ce qui peut poser difficulté si le défunt n’avait que l’assurance-vie à transmettre car le bénéfice de l’inscription du montant de l’indemnité au passif de la succession serait alors perdu.
En revanche, si le contrat d’assurance-vie ne désigne pas de bénéficiaire, les sommes inscrites intègrent l’actif successoral. Dès lors, il est possible de déduire le montant de l’indemnité.
B) La donation.
L’indemnité perçue peut être transmise par donation. Rappelons que les transmissions en ligne directe (entre parents et enfants) bénéficient d’un abattement de 100 000 € sur la part reçue par chacun des enfants par chacun des parents. Celui-ci est reconstitué tous les 15 ans. Il est donc possible de donner 100 000 € par parent et par enfant tous les 15 ans.
En outre, une personne âgée de moins de 80 ans peut également effectuer des dons d’argent à ses enfants, petits-enfants, arrières petits enfants voire à ses neveux et nièces à défaut de descendance, dès lors que ceux-ci sont majeurs ou émancipés, sans que des droits de donation soient applicables. En effet, ces dons sont exonérés d’imposition dans la limite de 31 865 € tous les 15 ans. Ce don peut donc être réitéré tous les 15 ans [11].
L’indemnité peut également servir à acquérir un bien immobilier. Dans l’hypothèse d’une donation de ce bien, celui-ci ne sera plus à l’actif successoral. Si le défunt n’avait pas d’autres biens dans son actif successoral, il ne sera plus possible d’imputer une quelconque indemnité au passif de la succession.
Il en résulte que la donation du bien acquis avec l’indemnité n’est avantageuse que si le défunt à d’autres biens à son actif successoral.