Façonnage pharmaceutique : aspects juridiques, par Nathalie CAZEAU, Avocat.

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L’entreprise de façonnage pharmaceutique entre dans la catégorie des entreprises de fabrication industrielle du médicament.

Intermédiaire certes, le façonnier n’en demeure pas moins en effet, au sens juridique du terme, un fabricant de produits pharmaceutiques, dont la définition est donnée à l’article R 5124-1 du Code de la Santé Publique, c’est à dire, toute entreprise se livrant, en vue de leur vente en gros ou de leur cession à titre gratuit, à la fabrication de médicaments.

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La fabrication est définie par ses diverses composantes, à savoir :

- l’achat des matières premières et des articles de conditionnement,

- les opérations de production,

- le contrôle de la qualité,

- la libération des lots,

- le stockage (1).

Toutes les opérations ci dessus doivent répondre au critère des bonnes pratiques de fabrication tel qu’il ressort de l’article L 5136-3 du Code de la Santé Publique (2) qui sont bien entendu applicables aux façonniers.

Plus particulièrement, le façonnier est, du point de vue juridique, celui qui intervient comme sous traitant pour la fabrication de la spécialité pharmaceutique , au profit de l’exploitant du médicament, qui à son tour, se chargera de commercialiser ladite fabrication.

Ceci étant dit, la sous-traitance peut intervenir à des stades différents, et aboutir, de ce fait, à des situations complexes et variées en fonction des tâches et des responsabilités qui pourront être confiées au façonnier.

Notons par exemple que bien que n’étant pas exploitant, au sens juridique du terme, le façonnier conserve une responsabilité lors de la mise sur le marché du médicament, puisque notamment l’article R 5121-21 du Code de la Santé Publique dispose « La demande d’AMM est adressée au directeur de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Elle mentionne : 1. Le nom et l’adresse du responsable de la mise sur le marché et, lorsque celui-ci ne fabrique pas la spécialité pharmaceutique, le nom et l’adresse du fabricant... ».

A priori, le Façonnier se distingue de l’exploitant, qui vend en gros aux intermédiaires que sont les distributeurs en gros et les officines de pharmacie mais là encore, il est parfaitement possible que le démembrement des fonctions de fabrication aboutisse à faire parfois du Façonnier un quasi-exploitant.

Ce démembrement peut engendrer des situations fort complexes, notamment suite à la mise en cause de la responsabilité des divers intervenants.

De façon notable à ce sujet, le législateur est intervenu pour empêcher le recours par le fabricant à la sous-traitance, sous réserve du respect de certaines conditions, interdiction insérée à l’article R 524-47 du Code de la Santé Publique (3).

Ce texte implique, pour le recours à la sous-traitance en matière de fabrication de médicaments, la conclusion d’un contrat écrit.

Dans ces conditions, il est bien évident que la rédaction du contrat de façonnage constitue une étape essentielle, non seulement pour se prémunir contre toute difficulté soulevée par les parties, mais aussi pour se conformer aux exigences impératives de Santé publique.

La variété des tâches et des responsabilités confiées par l’exploitant au Façonnier a des conséquences directes sur la rédaction du contrat de façonnage, qui est celui par lequel un exploitant va confier à un sous traitant appelé Façonnier, la mission de fabriquer une spécialité pharmaceutique donnée.

Intermédiaire sous traitant, le façonnier joue un rôle souvent majeur dans la fabrication du médicament. Son rôle majeur au plan économique et industriel a aussi ses conséquences au niveau de la rédaction du contrat qui le lie à l’exploitant.

Deux grandes phases dans les rapports unissant l’exploitant au façonnier se dégagent, qui posent des difficultés pratiques et des problématiques bien distinctes au niveau de l’intervention du juriste :

- La phase préparatoire à la fabrication

- La phase de fabrication

I. La phase préparatoire des relations entre le Façonnier et le Laboratoire :

L’objet du contrat de Façonnage : permettre à l’exploitant de confier à une société extérieure, la fabrication de la spécialité pharmaceutique envisagée.

Le plus souvent, cette situation va donner lieu à une mise en commun, entre les deux acteurs de ce contrat, de leurs brevets, de leur savoir faire, voir de leurs secrets de fabrication.

D’un côté, le Façonnier dispose d’un ensemble de connaissances protégée sur ses techniques de fabrication qu’il devra dévoiler à l’exploitant, pour assurer une collaboration minimum, et de l’autre, l’exploitant, titulaire des droits sur un principe actif, devra confier au façonnier des données protégées pour les besoins de l’exécution du contrat envisagé.

Dans certains cas, la protection du patrimoine industriel de chacune des parties est une question d’autant plus cruciale, que le projet de fabrication confié au Façonnier, va porter sur une spécialité nouvelle envisagée par l’exploitant, en cours de développement, et non encore protégée par un système fiable comme le brevet d’invention.

Le façonnier prenant alors une véritable part à la création de la spécialité pharmaceutique, il passe du statut de simple sous traitant, à celui d’un véritable co-auteur d’une création industrielle.

Quelles que soient les situations envisagées (développement d’un nouveau produit ou fabrication au sens strict), il est clair que le Façonnier, comme l’exploitant, ont le plus grand intérêt à signer, avant de s’engager plus avant dans le contrat de façonnage lui-même, des accords de confidentialité dont l’objet est à la fois de rappeler l’état du patrimoine industriel de chacune des parties, et le niveau de protection que les parties entendent lui donner.

1.1 La protection du patrimoine intellectuel des deux parties dès la phase préparatoire par les accords de confidentialité :

Pour être efficaces et protéger suffisamment le patrimoine de chacune des parties, les accords de confidentialité doivent absolument être signés avant tout autre contrat de développement ou de Façonnage.

En effet, l’engagement de confidentialité réciproque pris par les parties est et doit être juridiquement indépendant du contrat de Façonnage lui-même.

Le respect par chacune des parties du patrimoine intellectuel de l’autre partie est un préalable nécessaire et absolument indispensable à la signature du contrat de Façonnage lui même.

En outre, l’accord de confidentialité ne doit en aucun cas dépendre de la conclusion ultérieure du contrat de Façonnage :

Les engagements pris par les parties, pour assurer le respect de la confidentialité des données de chacune d’entre elles, doivent perdurer, que le contrat de Façonnage ou de Développement soit ensuite signé ou non.

A partir du moment où il y a divulgation entre les parties, d’un savoir faire industriel protégé, le contrat de confidentialité doit être envisagé et signé.

Examinons les principales clauses d’un accord de confidentialité :

L’accord doit contenir tout d’abord la définition des Informations Confidentielles de chacune des parties.

Ces Informations Confidentielles se rapporteront sans limitation au savoir faire, aux documents, aux formules, aux procédés, aux plans commerciaux, aux formulations, aux informations techniques, aux informations portant sur un nouveau produit, au mode de livraison du produit, aux procédures de tests, aux échantillons de produits, aux spécifications, aux fiches de données de sécurité des composants ainsi qu’à toutes autres informations, données scientifiques, cliniques, commerciales ou autres considérées par nature comme confidentielles .

Bien entendu, l’accord devra préciser que certaines informations ne pourront être considérées comme confidentielles, par exemple parce qu’elles relèvent du domaine public (exemple : les informations incluses dans un brevet d’invention ou une demande de brevet publiée).

Si l’une des parties dispose d’une technologie brevetée, il conviendra de le préciser et d’inclure au titre des informations confidentielles qui seront protégées, l’ensemble des connaissances permettant la mise en œuvre concrète du brevet et qui ne sont pas nécessairement incluses dans la demande de brevet.

L’accord de confidentialité doit ensuite définir les engagements des parties en termes de protection des Informations Confidentielles de chacun des protagonistes. A cette occasion, il est important de bien définir comment doit et peut se faire l’accès aux informations confidentielles des parties, et quel est leur périmètre d’utilisation.

Il est également essentiel de préciser dans l’accord de confidentialité, qu’aucune des parties ne revendique de droits de propriété industrielle ou intellectuelle sur les informations de l’autre partie.

En particulier, il faut penser à préciser que les parties à l’accord de confidentialité s’interdisent de déposer toute demande de brevet, fondée en tout ou en partie, sur les informations confidentielles de l’autre partie.

Cette clause n’est pas une clause de style, et il peut arriver qu’une société dépose un brevet portant sur la technologie de son interlocuteur, en pleine phase de négociations....

Il peut être également opportun de prévoir, dans un accord de confidentialité, qui sera titulaire des informations confidentielles obtenues après analyse, par l’une ou l’autres des parties, des informations confidentielles de l’autre partie. Mais cet aspect de la question, très souvent problématique, est plus généralement réglé dans les contrats de développement, dont l’objet est précisément de définir les obligations des parties, à l’occasion d’un projet de développement pour une spécialité nouvelle.

Vient ensuite l’engagement de confidentialité à proprement parler, c’est à dire l’engagement pris, par chacune des parties de ne pas exploiter à son profit et de garder le secret le plus absolu concernant toutes les informations confidentielles communiquées par l’autre partie et de ne pas divulguer à des tiers ou exploiter ces informations confidentielles à toutes autres fins que celles définies dans le contrat.

Il est également important de préciser la durée de l’accord et les conditions de la restitution des informations confidentielles dévoilées.

En pratique, il est fréquent de prévoir une durée de 10 ans à compter de la signature.

En outre, et si un contrat de développement est conclu entre les parties, il sera important de préciser dans cet accord, qu’en cas d’abandon du projet de développement et de rupture des négociations et ou des contrats de partenariat industriel et commercial, éventuellement signés entre les Parties, pour quelque cause que ce soit, l’accord de confidentialité restera en vigueur pendant la durée prévue, soit pendant 10 ans par exemple.

Une clause de restitution de documents confidentiels échangés devra être prévue, sur demande de l’une des parties.

La signature de l’accord de confidentialité permet ainsi aux parties de commencer à travailler dans la sérénité, et de s’échanger leurs données confidentielles, pour mener à bien leur projet.

Comme déjà indiqué, le contrat de Façonnage peut recouvrir des situations extrêmement variées, en fonction de la mission que l’exploitant va confier au Façonnier.

Or s’il arrive parfois que le Façonnier intervienne pour la fabrication d’une spécialité déjà connue et mise sur le marché depuis longtemps - auquel cas le contrat de Façonnage n’est soumis à aucun aléa - et le Façonnier se contente de procéder à une fabrication industrielle, sans passer par une phase préalable de recherche et de développement, dans d’autres cas, en revanche l’exploitant confie au Façonnier une mission de développement pour une spécialité, puisqu’il ignore si, une fois mise en œuvre la technique de fabrication, la spécialité sera conforme à ses attentes.

Un contrat de développement sera alors signé entre Façonnier et exploitant, qui, s’il donne lieu à des résultats satisfaisants, pourra permettre de déboucher sur la fabrication industrielle de la spécialité.

Le Contrat de développement est donc une étape fréquente, mais pas systématique des relations entre Façonniers et exploitants, et il est nécessaire de s’y attarder quelque peu, car ce cas de figure est la parfaite démonstration de la complémentarité du rôle de l’exploitant, et du Façonnier.

1.2 Les contrats de développement

Examinons les principales clauses des contrats d’évaluation et de développement :

Généralement, le préambule précise que l’exploitant a le projet de commercialiser une spécialité utilisant la technique de fabrication du Façonnier et à cette fin il souhaite utiliser l’expertise du Façonnier et lui confier la mise au point et le développement d’une formule élaborée à partir de composants appartenant à l’exploitant, et la réalisation d’un lot pilote industriel.

Le but du contrat d’évaluation et de développement est donc de permettre à l’exploitant de vérifier si la technique de fabrication du Façonnier peut s’associer de manière satisfaisante avec les composants appartenant à l’exploitant, avant de prendre la décision de lancement commercial du produit.

> Le Programme d’évaluation et de développement :

Il est conseillé de prévoir, dans ces contrats, l’élaboration d’un programme précis d’évaluation et de développement, qui permettra de mieux cerner les responsabilités de chacune des parties dans le travail envisagé.

C’est à cette occasion que sera constatée l’existence d’un véritable partenariat entre le Façonnier et l’exploitant, puisque certaines phases du développement pourront selon les cas être réparties entre l’exploitant et le Façonnier.

Juridiquement nous sommes ici dans un cas de création intellectuelle et industrielle commune, qui doit faire l’objet de clauses protectrices très bien définies.

Le programme d’évaluation et de développement, une fois défini, va également servir de calendrier aux parties, pour la validation du programme, ou son arrêt, en cours d’exécution. Ce programme constitue également un support très utile, pour gérer la façon dont le Façonnier est payé pour chacune de ses interventions.

Il est généralement prévu qu’au vu du rapport établi par le Façonnier au terme de chaque phase, l’exploitant décide soit l’interruption du développement, soit sa continuation.

Le contrat de développement a cette particularité qu’il doit permettre aux parties, compte tenu de l’aléa dans les résultats du programme envisagé, de mettre un terme au contrat très rapidement, sans aucune conséquence juridique en terme de responsabilités. C’est le recours habituel aux clauses appelées « STOP or GO ».

Il est vrai que de ce point de vue, le façonnier reste tout à fait soumis à la décision arbitraire de l’exploitant, de continuer ou pas son programme. Il y a très certainement dans la réalisation d’un tel programme, une part de prise de risques importante, prise par le Façonnier, qui parie sur l’avenir , en cas de développement commercial futur du produit .

Il est en général prévu que le Façonnier sera payé de son travail au terme de chaque étape.

> Le Comité Technique :

Il est également conseillé d’instituer entre les Parties un Comité Technique constitué par un représentant de chaque Partie.

Les membres du Comité Technique pourront se faire assister par tout expert de leur choix à la condition qu’il fasse partie du personnel de leur société, et qu’il soit tenu, de ce fait, au respect des obligations découlant de l’engagement de confidentialité signé entre les parties et annexé au présent contrat.

Le rôle du Comité Technique est essentiellement de permettre aux parties de faire le point sur l’état d’avancement des travaux, au terme de chaque phase du programme d’évaluation et de développement, et aussi, d’aborder sereinement toutes les difficultés qui pourraient naître dans l’exécution du contrat.

Il est évident que l’existence du Comité Technique est un moyen de prévenir efficacement, par la communication, tout litige potentiel et également de vérifier l’état d’avancement du projet.

Ceci étant dit, il faut aussi prendre bien garde à limiter le rôle juridique du Comité Technique, qui ne doit avoir pour but que de donner un avis, sans pouvoir donner lieu à une modification du contrat. Attention, par conséquent aux clauses qui donneraient trop de pouvoir au Comité Technique.

Il est bon de rappeler en effet que la seule façon de modifier un contrat utilement, c’est de prévoir un avenant, dûment signé par le représentant légal de chaque partie.

Voici un exemple de rédaction de clause « Comité Technique » :

Le Comité Technique a pour mission générale de proposer après accord de ses membres, toutes dispositions dans le cadre du présent accord, nécessaires à l’avancée des Travaux. Il devra notamment :

(i) proposer une redéfinition, en tant que de besoin, des objectifs poursuivis tels que précisés dans le PED ;

(ii) proposer les Travaux à effectuer dans l’hypothèse où une redéfinition des objectifs entraînerait une modification du budget tel que défini dans le présent accord,

(iii) prendre connaissance des résultats des Travaux effectués

(iv) proposer à chaque Partie la poursuite ou l’arrêt des Travaux à la fin de chaque phase en fonction des résultats obtenus au cours de la phase précédente.

(v) Les propositions du Comité Technique ne pourront entraîner une modification éventuelle du contrat qu’après rédaction d’un avenant signé par les représentants légaux de chacune des parties le Comité Technique ayant un rôle consultatif.

> Les obligations des Parties :

Bien entendu, le façonnier ne peut être tenu, dans le contrat de développement, que d’une obligation de moyens et non d’une obligation de résultats.

Les obligations de moyens sont celles dans lesquelles le débiteur promet d’apporter tous ses soins et diligences à la mission qui lui est confiée.

Il ne s’engage cependant pas au succès de cette mission.

Le débiteur est donc tenu d’employer tous les moyens possibles pour procurer satisfaction à son créancier mais ne peut en aucun cas garantir le résultat.

En conséquence, la responsabilité du Façonnier ne peut être engagée dans le contrat de développement que si l’exploitant prouve un manquement à ses devoirs de prudence et de diligence.

En effet, le fait que le résultat espéré ne soit pas obtenu ne suffit pas à faire présumer une défaillance du débiteur.

On ne peut donc engager la responsabilité du débiteur que sur la base d’une faute prouvée correspondant à l’absence de mise en oeuvre de tous les moyens possibles.

A l’inverse, les obligations de résultat sont celles dans lesquelles le débiteur s’engage à fournir un résultat déterminé. Ainsi le transporteur et l’entrepreneur ont des obligations de résultats puisque le premier s’engage à livrer la chose et le second à effectuer les travaux.

En conséquence, la responsabilité du débiteur est engagée sur la constatation de l’absence de résultat, le défaut de résultat faisant présumer une défaillance du débiteur.

C’est donc le problème de la charge de la preuve qui est au centre de cette qualification puisque pour les obligations de moyens, c’est au créancier de rapporter la preuve de la défaillance du débiteur pour voir sa responsabilité engagée, alors que pour les obligations de résultat, le créancier n’a qu’à présenter l’absence de résultat pour voir la responsabilité du débiteur engagée.

Il est donc conseillé de prévoir que le façonnier . mettra en œuvre toute son habileté, ses soins et sa diligence afin de satisfaire à ses devoirs en vertu du contrat et remplira toutes ses obligations dans le respect des règles admises dans la profession et conformément aux dispositions légales et réglementaires en vigueur en France et dans la communauté européenne au moment de la signature du contrat.

Tout dépend, au moment de la rédaction de ces clauses, en général très sensibles, de quel côté l’on se place.

Une problématique souvent rencontrée, et qui doit être abordée très sérieusement, est celle, liée à l’engagement du Façonnier, de respecter , dans le contrat de développement, la réglementation en vigueur au moment de la signature du contrat. En effet, il faut savoir gérer, dans les clauses contractuelles des contrats de développement, tout comme dans celles des contrats de façonnage à proprement parler, la question de la modification des normes réglementaires en cours de contrat, par exemple, le cas d’une matière première dont la réglementation viendrait à changer en cours d’exécution du contrat.

Le contrat doit être suffisamment équilibré, et rappeler aussi les obligations de l’exploitant. Ce dernier, donneur d’ordre devra, dans le cadre d’un contrat de développement, désigner les composants de la Formule, fournira, préalablement au Façonnier, toutes les informations économiques, techniques, commerciales dont il dispose et nécessaires à l’exécution des Travaux .

> Responsabilités et Garanties :

Cette clause est essentielle pour définir exactement l’étendue des engagements du Façonnier, dans le cadre du contrat de développement. Comme déjà indiqué, le Façonnier est tenu d’une obligation de moyen donc il ne peut en aucun cas s’engager à l’obtention d’un résultat dans le cadre du contrat de développement, qui repose entièrement sur l’aléa du projet.

Voici un exemple de clause :

« Le Façonnier mettra en œuvre toute son habileté, ses soins et sa diligence afin de remplir ses obligations en vertu du Contrat , il veillera à ce que l’ensemble des Travaux réalisés ne violent ni les droits de tiers, ni les lois ou réglementations en vigueur en France au moment de la signature du présent contrat, et dans la communauté européenne et donc à ce que l’exploitant ne soit pas exposé à des poursuites à quelque titre que ce soit, par la faute du Façonnier, notamment, il déclare respecter les obligations du Code du Travail en particulier celles visées à l’article L.324-10 et suivants, relatives à l’interdiction du travail dissimulé et atteste que les Travaux, objet du présent contrat, seront réalisés conformément à la législation du travail en vigueur. »

C’est également à cette occasion que doit être réglé l’épineux problème de la modification de la réglementation en cours d’exécution du contrat, liée par exemple à des décisions d’interdiction de l’utilisation d’un composant .

Voici un exemple de clause qui peut être retenu, pour régler cette difficulté en respectant les intérêts du Façonnier et de l’exploitant :

« Dans l’hypothèse où, pendant une durée d’un an à compter de la réception définitive de la totalité des Travaux par l’exploitant conformément aux dispositions prévues ci-dessus , l’utilisation d’un composant dans le Produit venait à faire l’objet de réserves ou d’interdictions par les autorités réglementaires compétentes françaises ou européennes, le Façonnier pourra reprendre le travail d’évaluation et de développement effectué afin de tenter de remédier à la situation ainsi créé, après que les parties aient redéfini, ensemble les modalités financières liées à ces nouveaux Travaux, supplémentaires dont le montant devra être payé par l’exploitant ».

> Clauses sur la la propriété des Développements :

Il est absolument indispensable de prévoir d’ores et déjà au stade du développement, comment est gérée la propriété industrielle afférente aux résultats obtenus du fait du Développement, puisque ces résultats sont la conséquence d’utilisation du savoir faire du Façonnier et de sa technologie d’une part, et d’autre part, de la formule du composant qui appartient à l’exploitant.

Il est donc conseillé de prévoir tout d’abord des clauses qui vont décrire l’état des lieux, c’est à dire qui vont rappeler à qui appartiennent les technologies utilisées pour la mise en œuvre du développement ;

Les clauses des contrats devront ensuite prévoir à qui appartiennent la propriété des développement, brevetables ou non, réalisés par le Façonnier au cours du Programme d’évaluation et de développement. Une distinction peut ainsi être faite, dans la propriété des développements, en fonction de l’utilisation de chaque technologie , et on pourra par exemple prévoir que tous les développements ultérieurs relatifs à la technologie particulière de chacune des parties, lui appartiendront et seront réputés être sa propriété.

Il est très utile de rappeler à cette occasion, que l’utilisation du savoir faire du Façonnier n’est pas effectuée de façon exclusive au profit du donneur d’ordre et peut être utilisée pour d’autres développement, ceci n’empêchant nullement de prévoir les termes d’une éventuelle exclusivité afférente au développement envisagé.

> Clause concernant le droit d’exclusivité pour la fabrication ultérieure du Produit :

Cette clause est évidemment essentielle, surtout pour le Façonnier. En pratique, elle n’est pas toujours admise, car il arrive très souvent que l’exploitant ne souhaite pas prendre d’engagements fermes, concernant le futur contrat de façonnage qui sera éventuellement signé, si le développement se révèle satisfaisant .

Voici un exemple de clause qui protège suffisamment les intérêts des deux parties, c’est à dire qui présente des garanties pour le Façonnier, et qui n’est pas trop contraignante pour l’exploitant :

« A l’issue du présent contrat, et dans l’hypothèse ou l’exploitant déciderait de commercialiser le Produit objet du présent contrat, ce dernier s’engage à réserver au Façonnier l’exclusivité de la fabrication du Produit, l’exploitant s’interdisant, en conséquence, de confier la fabrication dudit Produit à une société concurrente du Façonnier ».

Dans tous les cas, il convient de faire preuve d’une certaine prudence, dans la mesure où ces accords peuvent donner lieu à un examen sous l’angle du droit de la concurrence.( voir développements ci après) .

Bien entendu il existe encore d’autres clauses, qui doivent jalonner un contrat de développement, et qui sont des clauses classiques de force majeure, de résiliation, ou de loi applicable, que l’on retrouve dans tous les contrats.

Le moment est venu maintenant d’aborder justement l’hypothèse d’un développement réussi et du passage à la phase industrielle qui donne lieu au contrat de façonnage à proprement parler.

II. la phase industrielle des relations entre le Façonnier et l’exploitant : le Contrat de Façonnage à proprement parler :

Le contrat de Façonnage, aussi appelé contrat de sous-traitance pharmaceutique a donc pour objet de définir les conditions dans lesquelles un laboratoire pharmaceutique, exploitant, va confier au sous traitant, aussi appelé Façonnier, la fabrication de la spécialité pharmaceutique commercialisée par le laboratoire.

Il faut observer que le contrat de Façonnage peut porter sur la fabrication d’une spécialité pharmaceutique, comme sur un complément alimentaire, dont le régime diffère.

Quel que soit cependant l’objet du contrat, c’est à dire, qu’il s’agisse de la fabrication d’une spécialité pharmaceutique ou d’un complément alimentaire, la problématique juridique afférente à la rédaction des contrats de Façonnage est peu ou prou la même, et les clauses habituellement rencontrées présentent très peu de différence.

Le contrat va donc rappeler en préambule, que Le Donneur d’Ordre commercialise des produits définis dans le cahier des charges de sous-traitance qui sera souvent annexé au contrat, et qui seront en général appelés "Produits Finis" dont il maîtrise la conception .

Lorsque ce sera le cas, le préambule pourra utilement rappeler que ce Produit Fini a fait préalablement l’objet d’un développement conformément aux termes du cahier des charges développement annexé en annexe 1 bis au présent contrat.

On mesure ici, tout de suite, l’importance du Cahier des Charges, annexé au contrat de Façonnage et qui est la feuille de route du Façonnier.

C’est souvent ce document qui servira de référence en cas de litige, pour déterminer très exactement les prescriptions mises à la charge du Façonnier.

Le Cahier des Charges n’est donc pas seulement un document à vocation technique, il est une véritable référence, qui pourra servir de base juridique à la détermination des obligations de chacun, et le juriste qui travaille à l’élaboration d’un contrat de Façonnage doit vérifier tout aussi scrupuleusement les indications qui figurent au Cahier des Charges.

Le Contrat de Façonnage va donc rappeler en préambule que les parties sont convenues d’opérer entre elles une répartition des rôles selon laquelle, en conformité avec le cahier des charges établi par le Donneur d’Ordre, le Sous- Traitant fabriquera le Produit Fini au profit du Donneur d’Ordre.

Le plus souvent, le Façonnier procèdera à la Fabrication du Produit fini à titre exclusif, au profit du Donneur d’Ordre.

La mission qui sera confiée au Façonnier comprendra en général, ( mais pas toujours ) d’une part l’achat et le stockage des matières premières nécessaires à la fabrication, et d’autre part et surtout, la fabrication, le conditionnement, et la mise à disposition au Donneur d’Ordre du Produit Fini.

Bien entendu, l’étendue des prestations confiées à un Façonnier peut varier, et ces mécanismes sont présentés à titre d’exemple.

Après avoir exposé les étapes essentielles du contrat de Façonnage, nous aborderons le régime de la responsabilité du Façonnier.

> EXPOSE DES PRINCIPALES ETAPES DU CONTRAT DE FACONNAGE :

Clauses de définitions :

Il est très utile de recourir à une clause de définition des principaux termes utilisés dans le contrat de Façonnage pharmaceutique.

Voici en général, les termes dont la définition est importante, car elle permet de sécuriser le contrat (les exemples donnés ci après ne le sont qu’à titre indicatifs et peuvent varier, en fonction des situations).

Matière première : désigne toutes substances sous quelque forme que ce soit, utilisées dans la fabrication du produit à l’exclusion des articles de conditionnement.

Composants : désigne la matière première, le principe actif et plus généralement tout intermédiaire de fabrication, mélange, articles de conditionnement.

Formule : désigne la Formule définie en annexe ...... au cahier des charges de Sous- Traitance

Produit Fini : désigne le complément alimentaire ou la spécialité pharmaceutique, dont la formule et le conditionnement sont définis conformément au cahier des charges ci-après annexé en annexes ..............

Cahier des charges : désigne les documents visés en annexes au présent contrat, comprenant notamment les indications devant figurer sur le colisage, le système de palettisation à respecter, le système de numérotation de lots et les conditions de chargement et de transport des lots, et plus généralement toutes informations nécessaires au Sous- Traitant pour respecter les conditions de qualité produit requises à la fois par les textes applicables et par le Donneur d’Ordre.

Spécifications techniques : désigne les caractéristiques physiques et chimiques des Matières Premières, du Produit Fini et des Composants telles que définies au cahier des charges de sous-traitance ci-après annexé.

Fabrication : désigne l’opération industrielle à la charge du Sous-Traitant allant de l’achat des matières premières, des composants et des articles de conditionnement à la fabrication du Produit Fini proprement dite.

Contrôle qualité : désigne les procédures de contrôle telles que définies au cahier des charges de sous-traitance, ci-après annexé.

Conditionnement : désigne toutes les opérations notamment de remplissage, la mise en étui, l’étiquetage, l’encaissage, la palettisation qui permettent au produit de devenir un Produit Fini.

Dossier de lots : désigne tout document établi conformément au modèle ci après annexé.

Description des tâches confiées au Façonnier :

Le contrat va ensuite exposer les principales tâches confiées au Façonnier, notamment, celles liées à l’achat des matières premières, lorsque ce sera le cas, des composants et des articles de conditionnement.

Si le Façonnier doit acheter les matières premières pour le compte de l’exploitant, il est alors essentiel de vérifier que les spécifications de ces dernières soient clairement établies dans le Cahier des Charges et de prévoir également, si le fournisseur du Façonnier devra ou non avoir été préalablement agréé par le Donneur d’Ordre, car il arrive que certains exploitants imposent un contrôle du fournisseur au Façonnier.

Clause de contrôle des matières premières :

Lorsque le Façonnier doit acheter les matières premières pour le compte de l’exploitant, il est fréquent que le contrat prévoie qu’à réception des matières premières sur son site, le sous-traitant devra les contrôler conformément au cahier des charges et aux spécifications techniques.

Bien entendu, il sera indiqué que le sous-traitant déclare que les Matières Premières décrites au Cahier des Charges et entrant dans la composition du Produit Fini, ne sont pas, en l’état de ses connaissances actuelles, interdites par les autorités sanitaires françaises et européennes.

Là encore, on retrouve la question liée à l’intervention d’une décision des autorités sanitaires en cours de contrat, interdisant l’utilisation d’une ou de plusieurs matières premières composant le produit fini.

Voici un exemple de Clause utilisable dans un tel cas :

« Dans l’hypothèse ou Le Sous- Traitant serait informé d’une décision des autorités sanitaires interdisant l’utilisation d’une ou de plusieurs matières premières composant le Produit Fini il s’engage à en avertir immédiatement le Donneur d’Ordre, et à prendre toute mesure utile, pour déterminer, en accord avec le Donneur d’Ordre, une nouvelle définition de la Formule, de façon à permettre la poursuite du contrat en conformité avec la réglementation applicable.

Dans cette hypothèse, les parties conviennent de discuter ensemble et de bonne foi, les conséquences économiques éventuelles que cette situation pourrait générer sur le présent contrat. »

Clauses de Fabrication commandes et livraison du produit fini :

Le contrat va prévoir la définition des étapes suivantes :

- CONDITIONS DE FABRICATION

Le sous-traitant devra transmettre au Donneur d’Ordre l’intégralité des informations nécessaires aux autorités réglementaires afin de conserver la traçabilité de l’ensemble du processus de sous-traitance de fabrication et de conditionnement, en l’état actuel des connaissances.

Le sous-traitant respectera le process de fabrication définies au cahier des charges de sous-traitance,

AUDITS/ VISITES

Le Donneur d’Ordre pourra, à condition d’avoir prévenu le sous-traitant avant la date prévue de sa visite, procéder à une inspection des moyens de fabrication des produits contractuels chez le sous-traitant, ses inspections ne devant pas perturber le fonctionnement du sous-traitant.

Le Donneur d’Ordre, dans le cadre de ces procédures de contrôle, n’aura accès qu’aux zones dédiées au stockage des produits.

Il peut être utile de prévoir qu’à l’issue de cet Audit et avant remise du rapport au sous-traitant, les parties devront se réunir afin d’en discuter les conclusions.

La visite d’inspection donnera lieu à l’établissement d’un rapport d’audit par le Donneur d’Ordre dont un exemplaire sera remis au Sous-traitant pour d’éventuels commentaires et remarques.

COMMANDES ET PLANNING INDUSTRIEL

Il est de l’intérêt du Façonnier d’obtenir, tant que faire se peut de la part du donneur d’ordre un planning de commande des produits.

Le contrat doit permettre de trouver un équilibre entre d’une part les obligations de livraison imposées au Façonnier et d’autre part, la connaissance par ce dernier de la cadence de production exigée par l’exploitant.

A titre d’exemple, il peut être indiqué que le sous-traitant s’oblige à respecter le délai de livraison tel que spécifié dans la commande qu’il aura reçue du Donneur d’Ordre à la condition que la commande ait effectivement été reçue par le sous traitant trois mois avant la date de livraison spécifiée.

La sécurisation du contrat passe aussi par la description précise du mode de transmission des commandes et leur acceptation par le Façonnier.

Voici le type de clause utile pour la protection des intérêts de chacune des parties :

« Les commandes seront transmises par écrit au Sous-traitant par le Donneur d’Ordre au plus tard trois mois avant la date de livraison spécifiée sur le bon de commande.

Les commandes seront considérées comme fermes et définitives lorsqu’elles auront été confirmées par le Donneur d’Ordre au Sous-Traitant, par écrit selon les moyens suivants : Télécopie, Courrier,

Le Sous-traitant commandera les matières premières et articles de conditionnement nécessaires à la production du produit uniquement après avoir reçu une commande écrite de la part du Donneur d’Ordre dans les conditions ci-dessus définies.

En cas de commande tardive du Donneur d’Ordre, c’est à dire , transmise moins de trois mois avant la date de livraison prévue, Le Sous-Traitant appréciera au cas par cas s’il peut donner suite ou non à la commande.

Le coût des matières premières et articles de conditionnement achetés par le Sous -Traitant sans avoir reçu de commandes écrites de la part du Donneur d’Ordre devra être supporté par le Sous-traitant.

Les commandes fermes et définitives ne pourront faire l’objet d’une annulation par le Donneur d’Ordre, sauf accord préalable exprès du sous-traitant à cet égard. En tout état de cause, les commandes fermes et définitives pour lesquelles le sous traitant aura acheté les Matières Premières correspondantes seront facturées au Donneur d’Ordre, ce dernier s’engageant à lui en payer le montant. »

- LIBERATION DES LOTS :

Il est généralement prévu que le Sous-traitant sera responsable de la réalisation des dossiers de lots conformément au cahier des charges de sous-traitance.

L’exploitant pourra demander à ce que son Contrôle Qualité vérifie le dossier de conformité adressé par le Sous-traitant et procédera à la libération définitive des lots permettant la distribution sur le marché.

- REFUS DU LOT, LOT DEFECTUEUX

Il est essentiel de prévoir ce qu’il advient en cas de refus d’un lot ou de lot défectueux.

Généralement, le Système adopté repose sur une grille d’évaluation de la gravité des défauts, qui figure au Cahier des Charges. Le traitement du défaut sera différent d’un point de vue contractuel, s’il est mineur ou majeur.

Si le défaut constaté est mineur au regard du Cahier des Charges de sous-traitance, le Donneur d’Ordre pourra donner son accord pour que ce lot soit accepté.

Dans l’hypothèse d’un défaut majeur ou substantiel au sens du Cahier des Charges précité, et qui affecterait tout, ou une partie substantielle du lot, le lot sera systématiquement rejeté par le Sous-Traitant ou le Donneur d’Ordre, information en étant par ailleurs immédiatement donnée au Sous-traitant ou au Donneur d’Ordre selon les cas.

Clauses de Garanties :

Il s’agit là en général, des clauses qui posent le plus de difficultés dans la négociation.

Il sera généralement prévu que le Façonnier s’engage à ce que le Produit Fini au moment de sa livraison au Donneur d’Ordre, dans les conditions prévues au contrat sera conforme aux spécifications agréés par les parties dans le Cahier des Charges de sous-traitance.

Cependant il doit aussi être mentionné les cas d’exclusion de la responsabilité du Façonnier, par exemple dans les circonstances suivantes :

Si le défaut ou le manquement allégué, provient d’un vice de la conception de la Formule, ou d’une erreur commise par le Donneur d’Ordre dans la définition des spécifications du Produit telle que rédigées dans le Cahier des Charges de Sous-traitance ou si le défaut ou le manquement allégué résulte de la force majeure.

On sera bien avisé de prévoir également les garanties données par l’exploitant, qui portent en général sur la Formule.

Par exemple, on peut prévoir que le donneur d’ordre garantisse que la Formule qui lui appartient, et qui a été transmise au Sous-traitant pour les besoins de la fabrication du Produit Fini, est conforme aux spécifications définies au Cahier des Charges de Sous-traitance.

Il sera également prévu que le donneur d’ordre garantisse que cette formule ne contrevient à aucun principe réglementaire ou à aucune interdiction émise par les autorités sanitaires, au moment de la signature du présent contrat.

Clauses d’exclusivité :

L’exclusivité de la relation entre le Façonnier et l’exploitant est un des aspects les plus importants du contrat de Façonnage.

D’un côté, le caractère exclusif de la relation assure au Façonnier un chiffre d’affaire important, et le sécurise vis à vis de ses concurrents. De l’autre, ce caractère exclusif lui enlève une certaine liberté, qui peut être un sérieux frein à la participation à d’autres projets industriels.

Sur le plan du droit de la concurrence, il n’est d’ailleurs pas certain que les clauses d’exclusivité dans ces contrats ne soient pas considérées comme autant d’atteinte aux principes de la libre concurrence.

1. Exclusivité au profit du sous traitant

Cette clause peut être rapprochée des clauses d’exclusivité d’approvisionnement dans la mesure où le donneur d’ordre s’engage à ne faire fabriquer un produit que par le façonnier cocontractant.

L’obligation d’achat exclusif créé au profit du fournisseur, c’est à dire ici du sous traitant, un monopole de vente au donneur d’ordre pendant toute la durée du contrat . L’accord d’achat exclusif pose alors des problèmes sur le terrain du droit de la concurrence.

De façon générale, les clauses relatives à un approvisionnement exclusif sont contraintes tant par le droit de source interne qui limite leur durée, que par le droit de la concurrence.

Le droit Français en son article L 330 -1 du code de commerce limite à 10 ans la validité des clauses d’approvisionnement . Cette limitation s’impose à tous les accords de distribution comportant une obligation d’exclusivité d’achat à la charge du distributeur ( ici l’exploitant) qu’elle soit ou non complétée par une obligation réciproque du fournisseur.

Par ailleurs, le droit de la concurrence de source communautaire réglemente indirectement la durée de ces clauses en s’opposant à l’exemption automatique d’une clause de non concurrence d’une durée supérieure à 5 ans .

Le droit de la concurrence et la liberté du commerce n’interdisent pas de s’engager à ne faire fabriquer un produit qu’à un seul façonnier et dès lors formaliser cet engagement au travers une clause d’exclusivité.

En effet, l’engagement du donneur d’ordre ne concerne qu’un produit spécifique et non tous les produits qu’il serait amené à commercialiser. De plus, le façonnier reste libre de travailler pour d’autres laboratoires.

En conséquence, cette clause reflète la relation d’affaires existant entre les parties, relation qui n’a ni but ni effet anti-concurrentiel sur le marché de la production des médicaments.

Cette clause dont le bénéficiaire est le façonnier n’est donc pas en soi contraire aux principes du droit de la concurrence ce d’autant que le choix du façonnier par le donneur d’ordre relève largement de ses qualités et compétences.

En effet, c’est en fonction du savoir-faire du façonnier que le donneur d’ordre décide de lui confier la fabrication de son médicament. Juridiquement, ce type de relation contractuelle est marquée par un certain intuitu personae.

Cette situation est encore plus marquée lorsque précédemment au contrat de façonnage, il y a eu accord de développement, la clause d’exclusivité est alors une conséquence légitime de la relation des parties et de leur rôle respectif dans la création du produit.

2. Exclusivité au profit du donneur d’ordre

Par cette clause, le donneur d’ordre s’engage à ne faire fabriquer la spécialité pharmaceutique concernée qu’exclusivement, par le façonnier.

Ces clauses sont fondamentales pour le Façonnier car elles contribuent à protéger son marché et son savoir faire, en évitant qu’il ne soit utilisé au profit de concurrents.

L’appréciation de la validité de telles clause, en droit de la concurrence, sera fonction des éléments de fait de chaque dossier, et notamment de la puissance économique du ou des partenaires en cause et du rôle effectif du façonnier.

Une clause d’exclusivité imposée par un laboratoire d’importance international pour un produit largement répandu n’a pas la même conséquence sur le marché qu’une clause identique imposée par un laboratoire d’importance moindre pour un produit dont la diffusion est plus restreinte.

Enfin, une clause d’exclusivité se comprend d’autant mieux que le façonnier apporte un fort savoir faire au projet alors qu’elle se justifie plus difficilement lorsque le façonnier n’est chargé que d’un travail technique sans savoir faire particulier.

Voici le type de clause habituellement rencontré en pratique :

- Exclusivité au profit du SOUS TRAITANT :

« Pendant la durée du présent contrat, le Donneur d’Ordre s’engage à ne confier à aucune autre entité ou société, que celle du Sous-traitant une mission identique à celle définie au présent contrat, et comportant, entre autres la fabrication du Produit Fini tel que défini au présent contrat le Donneur d’Ordre prenant l’engagement de s’approvisionner en Produits Finis exclusivement auprès du Sous-traitant. »

Le donneur d’Ordre sera toutefois libéré de son engagement d’exclusivité dans les cas suivants :

En cas d’inexécution caractérisée faute lourde ou grave du fait du Sous Traitant ou encore des personnes placées sous sa responsabilité, de ses obligations telles que définies au contrat.

- Exclusivité au profit du Donneur d’Ordre :

Pendant la durée du présent contrat, le Sous-Traitant s’engage à n’accepter pour un tiers aucune mission identique définie au présent contrat comportant, la fabrication du Produit Fini tel que défini au présent contrat, le Sous-Traitant prenant l’engagement de fournir exclusivement le Donneur d’Ordre en Produits Finis.

Le Sous Traitant sera toutefois libéré de son engagement d’exclusivité dans les cas suivants :

En cas d’inexécution caractérisée par le Donneur d’Ordre de ses obligations telles que définies au présent contrat.

Clauses de propriété industrielle :

Ces clauses sont tout aussi essentielles dans le contrat de Façonnage que dans les contrats de développement.

Les clauses rappellent en général à qui appartient chaque technologie utilisée de part et d’autre.

Clauses de conditions de paiement :

Le contrat va préciser exactement les conditions tarifaires de Produits Finis.

Attention à bien gérer la durée de la tarification et les possibilités de renouvellement et de modification du tarif.

Il est fréquent de prévoir que les prix du Façonnier pourront évoluer en fonction du prix d’achat des matières premières achetées par ce dernier.

L’essentiel est ,sur ce point de bien vérifier la façon dont le prix est déterminé dans la convention, ou au moins, clairement déterminable.

EXPOSE DU REGIME DE RESPONSABILITE DU FACONNIER :

La question qui doit être abordée ici est celle de la responsabilité civile du Façonnier en tant que producteur de médicaments, responsabilité qui doit être envisagée ici non seulement sous l’angle contractuel c’est à dire dans le cadre des relations qu’entretient le Façonnier avec son client qu’est l’exploitant, mais aussi sous l’angle civil, c’est à dire vis à vis des tiers, qui seraient les consommateurs de produits fabriqués par le Façonnier à la demande du donneur d’ordre.

Le régime de la responsabilité générale du producteur de médicaments ne sera pas abordé ici, car les questions posées sont beaucoup trop vastes, mais plus précisément, celui qui découle de la loi la loi du 19 mai 1998.

Sans analyser la loi du 19 mai 1998 de façon exhaustive, on soulignera ici les dispositions concernant plus particulièrement les producteurs de médicaments, plus particulièrement lorsque deux ou plusieurs d’entre eux sont associés dans l’élaboration de ceux-ci par voie de sous-traitance ou de co-traitance comme c’est le cas pour le Façonnage.

- La désignation du responsable :

La loi du 19 mai 1998 désigne comme producteurs non seulement le fabricant du produit fini mais également le fabricant d’une « partie composante » (C. civ., art. 1386-6). Le texte légal instaure en conséquence une responsabilité in solidum de ces intéressés à l’égard des victimes (C. civ., art. 1386-8).

Par ailleurs, la loi mentionne expressément que l’engagement de la responsabilité du producteur est parfaitement indépendant de l’existence, ou non, d’un rapport contractuel entre ce dernier et la victime du produit défectueux.

Le Code civil mentionne enfin, en son article 1386-8 : « En cas de dommage causé par le défaut d’un produit incorporé dans un autre, le producteur de la partie composante est celui qui a réalisé l’incorporation sont solidairement responsables. »

Cela signifie bien qu’un façonnier, comme tout intervenant dans le processus de fabrication peut se voir assigner en responsabilité pour un défaut de sécurité du produit à la fabrication duquel il a participé, au même titre que le véritable fabricant/vendeur du produit en question.

Cependant, cette responsabilité solidaire n’est pas encourue en logique lorsque le défaut naît postérieurement à la prestation du fabricant du composant, la loi du 19 mai 1998 ne s’appliquant qu’à compter de la mise en circulation de ce composant (C. civ., art. 1386-11, 2°).

La loi institue à cet égard une présomption d’antériorité du défaut par rapport à la date de la mise en circulation du produit, qu’il incombe au producteur de renverser, à l’opposé de la garantie des vices cachés de droit commun ou la preuve de l’antériorité du vice incombe à la victime. Dans la même perspective, l’article 1386-11 in fine du Code civil exonère le producteur du composant de sa responsabilité s’il établit « que le défaut est imputable à la conception du produit dans lequel cette partie a été incorporée ou aux instructions données par le producteur de ce produit ».

A l’inverse sont interdites et réputées non écrites « les clauses qui visent à écarter ou à limiter la responsabilité du fait des produits défectueux », à l’exception de celles stipulées exclusivement entre des professionnels et concernant « les dommages causés aux biens qui ne sont pas utilisés par la victime principalement pour son usage ou sa consommation privée » (art. 1386-15, al. 1 et al. 2). Cette dérogation est la seule exception autorisée à la règle de réparation intégrale, maintenue par principe au profit des victimes.

- La portée de la responsabilité encourue :

La loi unifie les responsabilités contractuelle et délictuelle de droit commun, l’article 1386-1 instaurant un régime de responsabilité du fait des produits défectueux applicable au producteur « qu’il soit ou non lié par un contrat avec la victime ».

Si la preuve du défaut incombe en principe à cette victime, il est vraisemblable que cette démonstration sera en pratique inutile à chaque fois que celle-ci établira un dommage en relation avec l’utilisation du médicament, la loi définissant du reste le produit défectueux comme celui qui « n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre »

Cette responsabilité de plein droit n’est cependant pas absolue. Le producteur poursuivi ne peut certes exciper du fait d’un tiers - sauf cas de force majeure rompant l’enchaînement causal exigé par l’article 1386-9 du Code civil - pour prétendre réduire sa responsabilité (C. civ., art. 1386-14), ce qui corrèle les hypothèses de responsabilité in solidum précédemment évoquées lorsque plusieurs producteurs concourent à l’élaboration du médicament.

Mais la loi réserve la faute de la victime venant s’ajouter au défaut dans la production du dommage (art. 1386-13 C. civ.) : parmi ces fautes possibles, ont été mentionnés l’usage de médicaments sans en respecter les notices et étiquetages, ou la conservation de spécialités périmées.

Dans le même esprit, une information suffisante sur les effets indésirables du médicament devrait caractériser l’étendue de la sécurité à laquelle son utilisateur peut légitimement s’attendre et exclure dans cette mesure la qualification de produit défectueux propre à la loi du 19 mai 1998 (C. civ., art. 1386-4).

En revanche, il est considéré - selon une jurisprudence traditionnelle et d’autres dispositions légale que le respect des procédures d’autorisation de mise sur le marché du médicament ne vaut pas exonération du producteur au sens de l’article 1386-11 5° du Code civil, celui-ci ne visant comme cause exonératoire que « des règles impératives d’ordre législatif ou réglementaire » elles mêmes défectueuses, et assimilables par leur nature coercitive à un cas de force majeure pour le producteur. L’AMM relève au contraire de « l’autorisation administrative » visée par l’article 1386-10 C. civ. et déclarée inopposable aux victimes au même titre que le respect « des règles de l’art ou de normes existantes ».

Enfin et surtout, la loi de 1998 autorise formellement l’exonération du producteur pour risque de développement de son produit, ici défini comme le défaut indécelable « en l’état des connaissances scientifiques au moment où il a mis le produit en circulation » (C. civ., art. 1386-11, 5°).

Cette exonération est générale, hormis pour les produits issus du corps humain (C. civ., art. 1386-12 al. 2) ou si le producteur n’a pas respecté l’obligation de suivi du médicament telle que résultant de l’article 1386-12 al. 1 du Code civil et qui lui impose « en présence d’un défaut qui s’est révélé dans un délai de dix ans après la mise en circulation du produit » de prendre « les dispositions propres à en prévenir les conséquences dommageables ». Si le principe de l’exonération est donc incontestable, il incombe à la jurisprudence de délimiter la notion de risque de développement du produit ; en l’absence de décision interne rendue sous l’empire de la loi nouvelle, on soulignera qu’un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes du 29 mai 1997, raisonnant in abstracto, a imposé un niveau de connaissances « le plus avancé, tel qu’il existait au moment de la mise en circulation du produit », en refusant d’apprécier ce niveau seulement par rapport à « la pratique et les normes de sécurité en usage dans le secteur industriel dans lequel opère le producteur », mais à la condition que ces connaissances aient été « accessibles » au producteur.

Par ailleurs, il importe de mentionner l’existence de deux décisions rendues par la Cour de Justice des Communautés Européennes en avril 2002, à l’encontre de la France et de l’Espagne, sanctionnant ces deux états pour leur transposition de la directive sur les produits défectueux. La France ayant laissé aux victimes une option dans leur action en responsabilité. Concrètement, le système français permettait aux victimes d’agir en responsabilité contractuelle sur le fondement de l’obligation de sécurité imposée en jurisprudence à tout vendeur de produits. Cette responsabilité ne faisant l’objet d’aucune dérogation du fait des risques de développement, l’exception prévue en ce sens dans le cadre de la responsabilité du fait des produits défectueux perdait un peu de son effet pour les victimes. Cependant, la Cour de Justice a estimé que la transposition de la Directive devait intervenir « à plein », dans un objectif d’harmonisation des législations communautaires, et qu’il était donc impossible de retenir des systèmes alternatifs de responsabilité basés sur les mêmes fondements que la responsabilité du fait des produits défectueux.

Ceci laisse entrevoir une véritable immunité du fait des risques de développements qui peut parfaitement rejaillir sur le façonnier en matière pharmaceutique, si le défaut du produit relève bien d’un risque de développement.

S’agissant des rapports entre professionnels, qui nous intéressent directement dans le cadre des relations entre le fabricant et le façonnier, l’existence du régime instauré par la loi de 1998 aura nécessairement des incidences au niveau de la rédaction du contrat de façonnage.

En effet, si la solidarité entre les intervenants dans la fabrication de produits est la règle en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, il convient de préciser qu’entre professionnels, les partages de responsabilités, par le biais d’appel en garanties réciproques, peuvent très bien intervenir, afin de déterminer le responsable final du dommage causé.

Dans de telles conditions, il peut être opportun d’introduire, dans le contrat de façonnage, des conditions de mise en œuvre de la responsabilité de chacun au titre des éventuelles condamnations prononcées sur le fondement d’un défaut affectant le produit fabriqué (hypothèse de limitation de la garantie, prévision d’un plancher ou d’un plafond d’indemnisation).

Notes :

(1) Article R5124-2 du Code de la Santé Publique : « On entend par :

1º Fabricant, l’entreprise ou l’organisme se livrant, en vue de leur vente en gros, de leur cession à titre gratuit ou de leur expérimentation sur l’homme à la fabrication de médicaments, produits ou objets mentionnés à l’article L. 4211-1 et au 4º de l’article L. 5121-1.

La fabrication comprend les opérations concernant l’achat des matières premières et des articles de conditionnement, les opérations de production, de contrôle de la qualité, de libération des lots, ainsi que les opérations de stockage correspondantes, telles qu’elles sont définies par les bonnes pratiques prévues aux articles L. 5121-5 et L. 5136-3 applicables à cette activité. »

(2) « La préparation, l’importation et la distribution des produits mentionnés à l’article L 5136-1 du Code de la Santé Publique doivent être réalisés en conformité avec des bonnes pratiques dont les principes sont définis par arrêtés du ministre chargé de la santé »

(3) Article R 5124-47 du Code de la Santé Publique : « Les entreprises et organismes mentionnées à l’article R 5124-2 ne peuvent sous-traiter aucune des activités définies au même article et aucune des opérations mentionnées à l’article R 5124-40, sous réserve des exceptions mentionnées ci-dessous :

1° Les fabricants de médicaments mentionnés au 1° de l’article L 4211-1 (...) peuvent sous-traiter une partie des opérations constitutives de la fabrication auprès d’autres fabricants de ces médicaments ou produits dans le cadre d’un contrat écrit qui fixe, conformément aux bonnes pratiques prévues aux articles L5136-1 et L 5136-3, applicables à ces opérations, leurs obligations respectives. »

NATHALIE CAZEAU

AVOCAT A LA COUR

Article écrit à l’occasion du congrès de PTI France

43, RUE DE COURCELLES - 75008 PARIS

TEL. : 01 53 75 46 82 - FAX : 01 53 75 00 42

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