Mariage : quel régime matrimonial choisir ?

Par Juliette Daudé, Avocate.

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Explorer : # régime matrimonial # protection financière # biens communs # séparation de biens

Selon la formule consacrée, le mariage est un engagement pris par deux personnes « pour le meilleur et pour le pire ».

Se dire « oui pour la vie » est sans nul doute le désir de tout un chacun lorsqu’un couple choisit de s’unir par le mariage.

Mais parce que le mariage n’est pas toujours un long fleuve tranquille et qu’il peut parfois prendre une tournure douloureuse ou conflictuelle, le choix du régime matrimonial semble essentiel.

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En effet, choisir un régime matrimonial peut permettre de protéger l’autre époux ou de se protéger soi-même en cas de difficultés financières, au moment du divorce mais aussi en cas de décès.

En fonction de la situation patrimoniale, professionnelle mais aussi personnelle de chaque époux, plusieurs options s’offrent à eux.

- La communauté de biens réduite aux acquêts

Le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts est prévu par les articles 1400 et suivants du Code civil.

C’est le régime légal depuis le 1er février 1966, c’est-à-dire que c’est celui auquel seront soumis les époux par défaut s’ils ne font pas d’autre choix.

Dans ce type de régime, chaque époux conserve la propriété des biens qui lui appartenaient avant le mariage, ainsi que ceux qu’il a acquis par donation, par succession ou par testament pendant le mariage.

Tous ces biens seront considérés comme appartenant en propre à cet époux, c’est à dire à lui seul.

En revanche, tous les autres biens acquis pendant le mariage tomberont, eux, dans la communauté et seront donc réputés appartenir aux deux époux.

Ainsi, un bien acheté par un seul époux après le mariage appartiendra à la communauté (sauf déclaration d’emploi ou de réemploi) de sorte qu’au moment de la liquidation de la communauté, l’autre époux s’en verra attribuer la moitié et ce de façon automatique.

En revanche, dans l’hypothèse où un bien a été acheté par un époux avant le mariage, et quand bien même le remboursement du crédit aurait été effectué avec les revenus des deux époux, ce bien reste à la disposition de l’époux qui en est le propriétaire sans tomber dans la communauté.

Toutefois, l’époux qui a contribué au remboursement du crédit de ce bien, aura droit à une « récompense » lors du divorce, c’est à dire à une somme d’argent le remboursant de sa participation financière.

De plus, les salaires du couple sont considérés comme étant des biens communs.

En cas de dettes, les créanciers pourront saisir les biens communs même si seul l’un des deux époux a contracté la dette.

Si ce régime permet de protéger celui des époux dont les revenus sont les plus faibles, il peut aussi entraîner des conflits en cas de divorce puisque lors de la liquidation de la communauté, chaque époux récupère la moitié de tous les biens communs, peu importe que ce soit l’autre époux qui ait tout acheté.

En cas de décès, l’époux survivant récupèrera également la moitié des biens communs sans avoir à payer de droits de succession.

- La communauté universelle

Le régime de la communauté universelle est prévu par l’article 1526 du Code civil et a pour particularité d’englober tous les biens dans la communauté.

Ainsi, tous les biens acquis, achetés ou reçus par les époux avant et pendant le mariage seront communs, sauf clause contraire.

Les époux seront solidairement tenus responsables de toutes les dettes contractées par l’un ou l’autre des époux.

L’avantage principale de ce régime et d’intégrer une clause d’attribution intégrale de la communauté au survivant.

Cette clause prévoit qu’en cas de décès de l’un des deux époux, l’autre récupère l’intégralité des biens du défunt et devient donc propriétaire de tous les biens communs sans avoir de droits de succession à régler.

En revanche, les enfants ne recevront aucun héritage jusqu’au décès du dernier époux vivant.

Ainsi, ils devront s’acquitter de droits de succession plus élevés puisque progressifs en fonction du montant du patrimoine.

- La séparation de biens

Le régime de la séparation de biens est prévu aux articles 1536 à 1543 du Code civil.

A l’inverse de la communauté universelle, tous les biens acquis, achetés et reçus avant et pendant le mariage par un époux lui appartiendront en propre.

Il en va de même pour les biens reçus par donation ou par succession.

Lorsque les biens auront été acquis par les deux époux au cours du mariage, la répartition se fera en proportion de la quote-part de chacun des époux.

Ce régime procure donc aux époux une grande autonomie financière et matérielle.

En effet, toutes les dettes contractées par l’un des époux et qui ne sont ni ménagères, ni liées à l’éducation des enfants, n’engagent pas les biens de l’autre époux.

Les créanciers ne pourront donc saisir que les biens de l’époux débiteur.

Ce régime est ainsi très sollicité par les entrepreneurs afin de ne pas engager le patrimoine de leur époux(se) en cas de difficultés financières.

En outre, les revenus de chaque époux sont des biens propres.

Lors du divorce, chacun des époux reprendra son patrimoine personnel même si lorsque le mariage a duré de nombreuses années, il est souvent difficile de déterminer à qui appartient chaque bien et en quelle proportion.

S’il est impossible de déterminer le propriétaire d’un bien ou si les deux époux ont acheté un bien ensemble, alors les règles de l’indivision s’appliqueront.

En cas de décès de l’un des époux, la succession du conjoint survivant obéit aux règles légales de dévolution patrimoniale.

Il est toutefois possible pour les époux, de leur vivant, d’aménager la succession du conjoint survivant par testament, par donation ou par des clauses contractuelles.

- La participation aux acquêts

La participation aux acquêts est un régime hybride prévu par les articles 1569 à 1581 du Code civil dans lequel les règles de la séparation de biens s’appliquent pendant le mariage et le régime communautaire s’applique au moment de la dissolution.

En effet, lors de la dissolution, chacun des époux ou leurs héritiers auront le droit de participer pour moitié en valeur aux acquêts net constatés dans le patrimoine de l’autre époux et mesurés par la double estimation du patrimoine originaire et du patrimoine final.

En cas de divorce ou de décès, chaque époux devra donc évaluer l’évolution de son patrimoine en mesurant la différence entre son patrimoine d’origine et son patrimoine au jour de la dissolution.

Si le déficit est exclusivement supporté par l’époux, la plus-value doit en revanche être partagée entre les deux époux puisque l’on considère que l’autre époux aura participé pour moitié à la constitution de cette plus-value.

L’estimation des patrimoines est souvent conflictuelle lors de la dissolution de sorte que la liquidation est généralement assez longue.

Remarques : Afin de choisir l’un de ces trois derniers régimes, les futurs époux devront se rendre chez un Notaire pour que ce dernier rédige un contrat de mariage et ce, avant la date du mariage.

Il est par la suite possible de changer ou de modifier son régime matrimonial au cours du mariage dans un délai minimal de deux ans après la date du mariage.

Il faudra que les époux s’adressent à un Notaire afin qu’il rédige un acte authentique.

Les enfants majeurs des époux seront alors personnellement informés du changement et un avis devra être publié dans un journal d’annonces légales afin d’en informer les créanciers.

En cas d’opposition des enfants majeurs ou des créanciers ou encore en cas de présence d’enfants mineurs, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance du lieu de résidence de la famille devra homologuer la nouvelle convention.

Dans cette hypothèse, l’assistance d’un avocat est obligatoire.

Juliette Daudé

Avocate à la Cour

Site : http://cabinet-avocat-daude.fr/

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Discussions en cours :

  • par Maryse Martin , Le 21 septembre 2019 à 15:36

    Bonjour, et merci pour votre article.
    Je suis en couple depuis 19ans et j’ai 6 enfants avec mon futur époux.
    Nous avons décidé de se marier l’année prochaine.
    Nous avons toujours fait nos dépenses ensemble, mais ma participation est de 70% et lui de 30% par rapport à nos revenus.
    J’ai acquis un bien immobilier seule, le but c’était qu’on le fasse à deux malheureusement il ne gère pas bien. Du coup je l’ai acheté seule.
    Nous avons deux voitures que j’ai acheté, mais il a jamais dit que c’est " ma femme qui a acheté " par respect pour lui ou orgueil je ne sais pas.
    Ça ne m’as jamais dérangé, j’ai toujours couvert l’homme que j’aime.
    Par contre nos amis et famille penses que c’est lui qui fait tout.
    J’ai d’autres projets dans le futur.....
    Je suis d’accord on ne va pas à la mairie avec le projet séparation plus tard.
    Il y a le décès aussi qui ne prévient pas.
    Et même, on ne sais pas ce que la vie nous réserve, il peut aussi gagner un peu plus que moi un jour, qui sait ?

    Je me dis : on fait un contrat de séparation des biens et on aura quelques bien ensemble.......
    Car si je décède avant lui et que nous n’avons pas signé un contrat, les hommes en général se remarie et il va profiter des mes efforts ave une autre. Or moi avec le temps que nous avons passé ensemble et avec 6 enfants, je ne me vois pas refaire ma vie avec un autre homme si lui il partait avant moi.

    Quel contrat pensez- vous convenir à ma situation svp ?

    Merci de votre réponse.

  • par Valerie Panegassi , Le 25 mars 2019 à 04:17

    Je suis marié sans avoir signé un contrat de mariage devant notaire ! Comment puis je savoir si je suis sous le régime de la communauté universelle auquel cas tous les biens acquis avant et après le mariage sont en commun ou sous le régime de la communauté réduite aux acquêts ? Sur le livret de famille, je ne vois pas de distingo ?

    Merci de vos éclaircissements !

  • Avec les mariages mixtes , il est complexe de faire avec contrat .Même si l’on dit qu’ils sont "" sous doués ,,,,,,,,, ils savent gagner "d’où moitié moitié " en cas de divorce , et ils , elles , savent attendre quelques années .
    Autrement dit , que le blanc ou la blanche se marie , c’est payer pour les déplacements , payer la dot , payer les frais , payer le retour payer les études et la mise en emploie , et payer le divorce ,,,,,,,bien sur vu qu’ils n’ont rien , ça va de soi . OUI , un coupage de mariage blanc .Vrai aussi que chez nous il y a de nombreuses années que c’est en vogue .La femme est bien égale à l’homme , et vice versa .Toutes les entrées d’argents ne sont tout de même pas déclaré , vu que l’homme ne peut déclarer des pertes aux impôts ni donation , avec le nom des destinataires .

    • par Ribes Michel , Le 19 janvier 2017 à 09:27

      Bonjour,
      Je suis veuf depuis 7 ans et marié sou le régime de la communauté universelle avec attribution de la totalité du patrimoine au dernier vivant.
      Ma compagne est divorcée depuis 20 ans et a acheté un appartement après son divorce.
      Nous souhaitons nous marier. Nous souhaitons vendre nos biens respectifs et acheter une maison où nous vivrons. Pouvez-vous nous dire si nous pouvons opter pour la communauté universelle avec attribution de la totalité de notre patrimoine au dernier vivant.
      A quel moment devons nous vendre nos biens propres et opter pour la communauté universelle et quel en sera le coût.
      Merci pour votre réponse.

      Ghislaine De Potter et Michel Ribes

  • par Bernard , Le 23 juillet 2016 à 11:34

    Si on choisit le régime légal, comment faire pour identifier à son profit une somme d’argent reçue par l’un des 2 futurs époux de ses parents ?
    Question complémentaire : les futurs époux acquièrent conjointement un bien immobilier avant ou après leur mariage. Dans chacune des 2 hypothèses, comment celui des 2 qui a un apport significativement supérieur à l’autre peut-il le faire acter ?
    Merci de votre apport.

  • par Emson , Le 13 décembre 2015 à 14:26

    Tout d’abord félicitations pour cette article, très bon travail. À présent une petite question : si je signe un contrat de mariage devant le notaire au Mexique, et pars après vivre en France avec ma femme, est ce que ce contrat sera valide en France en cas de divorce ?

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