La question des prescriptions assorties à un permis de construire a fait l’objet d’une évolution récente en jurisprudence.
Le jugement commenté du tribunal administratif de Rennes, qui applique cette jurisprudence, vient apporter des précisions sur cette dernière.
En effet, le Conseil d’État a récemment considéré que ce point et rappelé que « (…) l’administration ne peut assortir une autorisation d’urbanisme de prescriptions qu’à la condition que celles-ci, entraînant des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitant pas la présentation d’un nouveau projet, aient pour effet d’assurer la conformité des travaux projetés aux dispositions législatives et réglementaires dont l’administration est chargée d’assurer le respect (…) ».
Il a poursuivi en indiquant : « (…) que le titulaire d’une autorisation d’urbanisme est recevable à demander l’annulation d’une ou de plusieurs prescriptions dont celle-ci est assortie ; qu’il peut utilement soulever à l’appui de telles conclusions tout moyen relatif au bien-fondé des prescriptions qu’il critique ou au respect des exigences procédurales propres à leur édiction ; (…) ».
Enfin, il a conclu son propos en précisant : « (…) que, toutefois, le juge ne peut annuler ces prescriptions, lorsqu’elles sont illégales, que s’il résulte de l’instruction qu’une telle annulation n’est pas susceptible de remettre en cause la légalité de l’autorisation d’urbanisme et qu’ainsi ces prescriptions ne forment pas avec elle un ensemble indivisible ;(…) ».
Dans le cas d’espèce, le tribunal administratif de Rennes était saisi d’une demande d’annulation de l’arrêté de non-opposition à déclaration préalable visant à la réalisation d’une clôture avec portail automatique en tant qu’une prescription avait été assortie à cette décision.
Le contentieux ne portait donc pas sur l’intégralité de l’autorisation d’urbanisme, mais uniquement sur la prescription assortie à ce dernier, conformément à la jurisprudence Ciaudo.
La prescription était la suivante : « (…) afin d’éviter une entrave à l’usage de la servitude de passage au profit de la propriété AC 327, la pose d’un portail automatique devra être réalisée avec un recul minimum de 4,50 mètres par rapport à la limite de propriété matérialisée à la demande. Tant la pose du portail automatique que l’édification du muret le long de la servitude de passage ne devront en aucun cas entraver la libre circulation sur ladite servitude (…) ».
La nature de cette prescription interroge immédiatement en ce qu’elle porte et tant à la préservation d’une servitude privée.
Ainsi, le tribunal a censuré cette dernière en considérant : « (…) qu’en assortissant sa décision d’une prescription imposant la pose de ce portail avec un recul minimum de 4,50 mètres par rapport à la limite de propriété, justifiée, selon cette même autorité, par la volonté « d’éviter une entrave à l’usage de la servitude », le maire de Locquirec a entaché sa décision d’illégalité dès lors qu’il ne pouvait imposer une prescription portant sur les modalités d’usage d’une servitude de passage sur un terrain privé (…) ».
Le principe de l’annulation est classique et ne devrait donc pas être remis en cause en cas d’appel.
Toutefois, à l’occasion de cette affaire, le rapporteur public a considéré que le moyen tiré de l’insuffisance de motivation de la prescription n’était pas un moyen invocable. Il s’agirait donc d’un moyen inopérant.
En effet, dans le cadre de la jurisprudence Ciaudo, le rapporteur public du Conseil d’État avait lui-même rappelé que le Conseil considérait de longues dates, qu’en principe, la prescription assortie à un permis ou une autorisation d’urbanisme se suffise à elle-même (voir notamment en ce sens CE, 4 janvier 1985, n°41301).
Le tribunal a donc rejeté implicitement le moyen tiré de l’insuffisance de motivation de la prescription.
Il conviendra de voir si ce raisonnement est confirmé et validé en appel et surtout par le Conseil d’État.
Références : TA Rennes, 27 mai 2016, n°1404395, CE, 13 mai 2015, Ciaudo, n°358677 ; CE, 4 janvier 1985, n°41301