Salarié(e)s, cadres : l’interdiction des « agissements sexistes » fait son entrée dans le Code du travail, sera-t-elle efficace ?

Par Frédéric Chhum, Avocat.

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Explorer : # agissements sexistes # code du travail # harcèlement # protection des salariés

L’article 20 de la loi Rebsamen n°2015-994 du 17 août 2015 (entrée en vigueur le 19 août 2015) intègre une nouvelle disposition prohibant les « agissements sexistes ».

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1) Prohibition des agissements sexistes dans le nouvel article L. 1142-2-1 du Code du travail

L’article L. 1142-2-1 nouveau du Code du travail dispose ainsi que « nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. »

Cet article a été inséré dans le chapitre du Code du travail traitant de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes (Première Partie, Livre Ier, Titre IV du Code du travail).

En cas de licenciement, suite à des agissements sexistes, la sanction sera, selon nous, la nullité de celui-ci (cf. c.cass. 28 janv. 2009, n°07-44556).

2) Pour quelle efficacité ?

2.1) Renforcement de la protection des salariés victimes de sexisme

A première vue, cette nouvelle disposition fait écho avec la prohibition de l’interdiction des discriminations en raison du sexe codifiée à l’article L.1132-1 du Code du travail.

Le sexisme étant par ailleurs communément défini par une attitude discriminatoire fondée sur le sexe.

La nuance pourrait pourtant résider dans le fait qu’à la différence des « agissements sexistes », la discrimination fondée sur le sexe implique une action positive, émanant de l’employeur, à l’égard d’un salarié et ayant des répercussions sur sa carrière (un licenciement, une promotion, un recrutement, une formation, des conditions de rémunérations).

Le régime de la discrimination a ainsi pour but d’interdire les décisions de l’employeur uniquement motivées par le sexe de ses employées, mais ne vise pas directement les comportements sexistes potentiellement ordinaires et banalisés dans les entreprises.

Dès lors, l’interdiction des agissements sexistes ne suppose pas nécessairement que le salarié qui en est l’objet en pâtisse au regard de l’évolution de sa carrière, mais seulement dans son quotidien et ses conditions de travail, et ce peu important qu’il n’ait pas subit de retard de carrière ou d’une rémunération moindre par exemple.

En ce sens, cette nouvelle notion renforce la protection des salariés victimes de sexisme.

2.2) Agissements sexistes versus harcèlement moral ou sexuel

Ensuite, la notion d’agissements sexistes est proche de celle du harcèlement tant moral que sexuel, telles que définit aux articles L.1152-1 et L.1153-1 du Code du travail.

Le harcèlement sexuel étant définit comme « des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».

Tandis que le harcèlement moral est définit de la manière suivante : « agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».

A cet égard, les juges du fond ont déjà pu qualifier des agissements sexistes de harcèlement moral (Cour d’appel de Versailles, 2 décembre 2015, n°14/02653).

Néanmoins, la définition des agissements sexistes est plus étendue et ouverte, puisqu’il s’agit d’agissements ayant pour objet ou pour effet de «  créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».

Reste qu’il reviendra aux juges d’appréhender concrètement la nature de tels agissements, pour lesquels le législateur n’a pas donné de précision.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\’ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
chhum chez chhum-avocats.com
www.chhum-avocats.fr
http://twitter.com/#!/fchhum

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