Le salarié, confronté à un tel manquement peut alors saisir le conseil de prud’hommes pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Cette situation impose que le salarié soit toujours dans les effectifs de l’entreprise au jour de la saisine. En cas de reconnaissance par les conseillers prud’homaux de manquements graves de l’employeur, le contrat sera rompu aux torts de l’employeur. L’employeur sera alors condamné au paiement du solde de tout compte, de l’éventuelle indemnité de licenciement, de l’éventuel préavis et des congés payés afférents outre des dommages et intérêts. Le salarié aura le droit à son chômage.
Le salarié peut également prendre acte de la rupture de son contrat de travail à charge pour lui de saisir le conseil de prud’hommes pour demander la requalification de la prise d’acte de rupture en rupture aux torts de l’employeur.
La requalification de la prise d’acte de rupture entrainera la condamnation de l’employeur au paiement de son éventuelle indemnité de licenciement, de son éventuel préavis et des congés payés afférents outre des dommages et intérêts. Le salarié pourra également voir ses droits Pole emploi ouverts. En revanche, à défaut de requalification, la rupture produira les mêmes effets qu’une démission. Les risques sont donc importants et ne doivent pas être négligés.
Dans deux affaires récentes, un salarié a demandé la résiliation de son contrat de travail en reprochant à l’employeur d’avoir manqué à son obligation de sécurité lors de conflit entre salariés.
Il ressort de ces deux affaires deux solutions opposées face à deux réactions différentes de l’employeur.
L’inaction de l’employeur face à une souffrance morale peut entraîner la résiliation du contrat aux torts de l’employeur.
Dans son arrêt du 22 juin 2017 (Cass. soc., 22/06/2017, n°16-15507), la salariée a obtenu la résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif que l’employeur avait manqué à son obligation de sécurité « après avoir constaté que la relation de travail de la salariée avec une collègue avait entraîné chez l’intéressée une vive souffrance morale ayant participé de façon déterminante à la dégradation de son état de santé, la cour d’appel a relevé que l’employeur n’avait pas pris toutes les mesures utiles pour régler avec impartialité par sa médiation, le conflit persistant qui les opposait et permettre ainsi à la salariée de réintégrer son poste, ou à défaut, pour séparer les deux protagonistes, en lui proposant, sans attendre la fin de son arrêt de travail pour maladie, soit un changement de bureau comme préconisé par le médecin du travail, soit un poste disponible dans un autre centre à proximité ».
La salariée, médecin spécialisé, se plaignait d’une mise à l’écart au sein de l’équipe médicale d’une association de santé. Une de ses collègues, également médecin, était à l’origine de cette exclusion : elle refusait de la saluer ; de s’adresser à elle au cours des réunions ; elle ne partageait pas les discussions sur les dossiers de consultation etc. La salariée victime avait dénoncé auprès de son employeur « un processus pervers et destructeur ». Son état de santé s’était dégradé et elle avait été arrêtée en raison de son état de souffrance psychologique avancé.
La salariée après avoir saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire avait été licenciée pour inaptitude médicale.
L’action ferme de l’employeur face à des courriels racistes ne permet pas au salarié de demander la résiliation de son contrat.
Dans cette affaire, un salarié avait demandé la résiliation judiciaire de son contrat après avoir informé son employeur de la réception de courriels à caractère raciste.
Sa demande avait toutefois été rejetée au motif que l’employeur avait réagi avec diligence et efficacité en sanctionnant l’auteur des messages en lui demandant de s’excuser. Or ces mesures s’étaient avérées opérantes puisque les faits ne s’étaient pas reproduits (Cass. Soc., 21/06/2017, n°15-24272).
Enseignements : Lorsque l’employeur est informé de conflits entre salariés entraînant une souffrance au travail, il lui appartient d’intervenir pour y mettre fin. À défaut, l’employeur peut être considéré comme responsable de la rupture prononcée.
Conseils aux employeurs : Ne pas rester inactifs !
Au terme de décision du 22 juin 2017, les juges évoquent des voies de réflexion : médiations, changement de bureau ou d’équipe ou de site, répondre au courrier ou mail, mettre en place des procédures disciplinaires…
Le cas échéant, l’employeur peut également faire appel à un prestataire externe (médiateur, psychologue du travail etc.)
Conseils aux salariés : La saisine en dernier recours du conseil de prud’hommes
Une telle possibilité doit être envisagée lorsque l’employeur n’a pas mis en œuvre les mesures nécessaires pour tenter de remédier à la situation.
Elle devra l’être que la rupture ait ou non d’ores et déjà été prononcée (résiliation judiciaire ; prise d’acte de rupture ; licenciement ; démission etc.).