Rappel des grands principes en matière d’embauche de ressortissants étrangers.
Plusieurs questions se posent en cas d’embauche d’un salarié étranger.
De quelle nationalité est-il ?
Sa nationalité rend-t-elle obligatoire la détention d’un titre de séjour et d’une autorisation de travail pour pouvoir l’embaucher ?
Quelles vérifications peuvent ou doivent être effectuées sur ces questions ?
L’exercice d’une activité professionnelle salariée en France suppose la détention d’une autorisation de travail pour les étrangers non ressortissants de l’UE, de l’UEE, ou de Suisse, mais aussi pour les étrangers ressortissants d’un Etat membre de l’UE pendant la période d’application des mesures transitoires relatives à la libre circulation des travailleurs [2].
En complément, ces ressortissants étrangers doivent être titulaires d’un titre de séjour leur permettant d’exercer une activité salariée. Certains de ces titres dispensent d’ailleurs l’employeur de demander une autorisation de travail pour les embaucher [3].
« Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France » [4].
Pour éviter de se retrouver dans cette situation, l’employeur est tenu de vérifier que l’étranger qu’il compte embaucher est en situation régulière. Il saisit le préfet compétent, lors de l’embauche, afin de vérifier l’authenticité du titre de séjour du salarié et s’assure ultérieurement que le contrôle médical a bien été effectué dans les 3 mois suivant la délivrance de l’autorisation de travail [5].
Etude de l’arrêt.
L’employeur qui découvre que le salarié est en situation irrégulière peut rompre son contrat de travail sur ce seul motif.
L’irrégularité de la situation d’un travailleur étranger est une cause objective qui justifie la rupture de son contrat de travail [6]. Il s’agit là d’un rappel d’une jurisprudence antérieure [7].
En revanche, elle n’est pas constitutive en soi d’une faute grave, ce qui exclut toute retenue sur salaire au titre d’une mise à pied conservatoire, ainsi que le licenciement pour faute grave sur ce seul motif.
En l’espèce, le salarié avait été mis à pied à titre conservatoire, avec une retenue de salaire correspondante, puis licencié pour défaut de titre de séjour.
Le seul grief reproché au salarié était de ne pas avoir produit, en dépit de mises en demeure, de titre de séjour valable l’autorisant à travailler. Aucune faute grave n’était invoquée par l’employeur à l’appui du licenciement.
La cour d’appel a débouté le salarié de sa demande en paiement d’un rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire antérieure au licenciement.
La Cour de cassation censure l’arrêt rendu par la cour d’appel qui aurait dû faire droit à la demande du salarié : ce dernier devait bénéficier du paiement du salaire pour la période de mise à pied conservatoire antérieure à la rupture du contrat de travail, dans la mesure où l’employeur n’avait invoqué aucune faute grave à l’appui du licenciement.
La mise à pied conservatoire permet à l’employeur de suspendre provisoirement l’activité d’un salarié dont la présence pourrait nuire à l’entreprise. Si elle peut être prononcée, sans être suivie d’un licenciement pour faute grave ou lourde, elle doit dans ce cas être rémunérée. Seul le licenciement fondé sur une faute grave ou lourde dispense l’employeur de son obligation de paiement du salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire [8].
Quant à la situation irrégulière d’un travailleur étranger, elle ne constitue donc pas en soi une faute grave, mais uniquement une cause objective de rupture du contrat de travail.
L’employeur qui entend invoquer une faute grave distincte de la seule irrégularité de l’emploi doit en faire état dans la lettre de licenciement [9].
A défaut, la situation irrégulière d’un salarié étranger ne permet ni de le licencier pour faute grave, ni d’opérer une retenue sur son salaire sur le fondement d’une mise à pied conservatoire.
La faute grave peut par exemple être retenue lorsqu’une fraude est reprochée au salarié, qui avait fourni un faux titre de séjour lors de son embauche et pour se maintenir dans l’emploi, alors que l’employeur n’avait pas commis de faute
« dans la vérification du titre de séjour apparemment régulier et dont la fausseté n’est apparue que lors de la demande de confirmation du caractère régulier de son titre de séjour après renouvellement » [10].
Une vigilance accrue est attendue des employeurs en matière de vérification des titres de séjour des salariés étrangers… et de rédaction de la lettre de licenciement.