Textes de référence
Code de la route : article L224-7, article L224-8 du Code de la route, article L224-17 I.
Définition
L’élément matériel est caractérisé par le refus de restituer le permis suspendu ou annulé à l’agent de l’autorité chargé de l’exécution de cette décision, alors que la personne mise en cause s’est vu valablement notifier une décision prononçant à son encontre la suspension ou l’annulation du permis de conduire. Il y a donc deux éléments nécessaires à la matérialisation de l’infraction :
la notification valable d’une décision administrative enjoignant de restituer le permis de conduire ;
le refus de la personne destinataire de la décision administrative de restituer son permis de conduire.
La preuve de la connaissance par le prévenu de l’existence de la mesure prise résulte des constatations souveraines des juges du fond. Cependant, le défaut de constitution de l’infraction peut résulter de l’absence de notification valable de la décision d’injonction, de l’absence de preuve de l’existence d’une telle injonction, de l’absence de l’élément intentionnel, le conducteur ignorant l’existence de cette décision.
La restitution du permis de conduire est prévue par les textes, celle-ci intervient dans 4 cas limitativement énumérés par la loi.
a) Le cas de l’annulation ou de la suspension judiciaire du permis de conduire
Les tribunaux judiciaires disposent de la possibilité de prononcer à l’égard des conducteurs une peine principale ou accessoire de restitution du permis de conduire dans le cadre d’une suspension ou d’une annulation judiciaire du permis de conduire. Dans ces différents cas, le juge enjoindra au contrevenant de restituer son permis de conduire dans un délai laissé à la libre appréciation du juge et au besoin sous astreinte.
Pour se défendre le contrevenant ne dispose pas d’une grande marge de manœuvre si la peine est prononcée avec exécution provisoire. A défaut d’exécution provisoire le contrevenant peut faire appel dans un délai de 10 jours à compter du jugement ou de sa notification. L’appel ayant un effet suspensif, celui-ci dispose toujours du droit de garder son permis de conduire à la condition sine qua non d’interjeter appel et de pouvoir, en cas de contrôle de police, apporter la preuve de l’exercice de cette voie de recours.
b) Le cas de la suspension administrative du permis de conduire par le préfet.
Le préfet peut en cas de graves infractions au Code de la route (grands excès de vitesse, alcoolémie, conduite sous l’emprise de stupéfiants) prendre une décision administrative de suspension du permis de conduire dans les 72 heures suivant l’infraction. Cette décision administrative informe le contrevenant de la mesure de suspension du permis prise à son encontre et lui enjoignant de restituer son permis auprès des services préfectoraux (préfecture ou sous préfecture) de son département. Si le préfet ne prend pas de décision de suspension administrative du permis de conduire dans le délai de 72h, la suspension administrative est nulle en application de l’article L.224-2 du Code de la route.
c) Le cas de l’annulation du permis de conduire pour solde nul
Lorsqu’un automobiliste ne dispose plus de points sur son permis de conduire celui-ci reçoit par lettre recommandée avec accusé de réception une lettre référence 48 SI portant invalidation de son permis de conduire. Ce courrier l’informe que son solde de points est nul et lui enjoint également de restituer son permis de conduire auprès des services préfectoraux (préfecture ou sous préfecture) de son département.
L’automobiliste dispose alors d’un délai de 10 jours francs à compter de réception de la décision référence 48 SI pour restituer son permis de conduire. Dans le cas où celui-ci a été valablement notifié de cette décision et qu’il ne restitue pas son permis dans le délai de 10 jours, l’infraction de refus de restitution du permis de conduire est constituée.
Dans le cas d’une première annulation de permis de conduire, la restitution du permis de conduire permet, dans un délai de 6 mois à compter de dépôt du permis, d’obtenir un nouveau permis de conduire. Il est donc dans certains cas judicieux de le rendre rapidement afin de pouvoir repasser le code après le délai de 6 mois à compter du dépôt.
Cependant dans le cadre d’une procédure contentieuse devant le tribunal administratif, si le requérant obtient l’annulation rétroactive de la décision référence 48SI, les juridictions pénales relaxeront alors le requérant. En effet, l’annulation de la décision 48 SI invalidant le permis de conduire prive l’infraction de toute base légale, l’acte annulé étant considéré comme n’ayant jamais existé du fait de l’effet rétroactif de l’annulation des actes administratifs.
Il est dans ce cas nécessaire de demander au juge pénal de surseoir à statuer en attendant le jugement du tribunal administratif par le biais de conclusions d’exceptions d’illégalité. Cependant, les tribunaux ne sursoient pas à statuer de plein droit. Il convient de toujours exposer les éléments fondant l’exception d’illégalité afin de leur permettre, à défaut, d’accepter de surseoir à statuer, d’apprécier eux-mêmes les arguments et de déclarer la décision illégale et relaxer le prévenu.
De même, il arrive que certaines juridictions retiennent à tort et ce malgré l’annulation de la décision administrative enjoignant au contrevenant de restituer son permis de conduire que l’infraction est bien constituée dans la mesure où la mesure de suspension ou d’annulation était exécutoire lors des faits.
d) Le cas de rétention immédiate du permis de conduire par les autorités de police
Lorsque les dépistages de produits stupéfiants ou d’alcool ou encore le comportement du conducteur constituent des éléments permettant de présumer que celui-ci conduisait sous l’empire de stupéfiants ou d’un l’état alcoolique, les officiers et agents de police judiciaire retiennent à titre conservatoire le permis de conduire du résumé contrevenant pendant une durée maximale de 72 h dans l’attente de savoir si le préfet prend une mesure de suspension administrative du permis de conduire.
Le conducteur, à défaut de restituer son permis de conduire, peut être condamné pour défaut de restitution du permis malgré injonction de l’autorité. Ces mesures sont également applicables dans le cadre d’un excès de vitesse.
- Les différents moyens pouvant être soulevés :
- défaut de preuve de l’existence de la décision d’injonction,
- défaut de preuve de la notification de cette décision,
- défaut d’intention du conducteur de commettre l’infraction,
- illégalité de la décision notifiant l’injonction de restituer le titre de conduite,
- demande de sursis à statuer en attendant le jugement du tribunal administratif.
Décisions jurisprudentielles
Une visite des gendarmes, présentant au conducteur l’arrêté préfectoral de suspension administrative du permis de conduire « peut servir de base à une abstention volontaire d’obtempérer a une injonction des autorités chargées de l’exécution de la décision sans qu’aucune forme de notification soit exigée. »
Les juridictions considèrent que l’infraction est constituée dés lors que « le prévenu reconnaît devant les gendarmes avoir eu connaissance de l’existence de l’arrêté pris a son encontre et s’est volontairement abstenu de restituer son permis. » ou encore si celui-ci « reconnaît avoir reçu notification verbale de la décision. »
Cependant, « le prévenu qui a conduit un véhicule malgré la suspension du permis de conduire doit être relaxé dès lors que l’arrêté préfectoral de suspension a été notifié plus d’un mois après la constatation de l’infraction d’excès de vitesse. »
De même, doit être relaxé le conducteur lorsque « le tribunal administratif prive la poursuite de base juridique, l’injonction de restituer le permis objet de l’infraction étant censée n’avoir pas existé ».
Certains tribunaux considèrent que l’infraction est bien constituée, malgré l’annulation ultérieure de la décision de suspension ou d’annulation par le tribunal administratif dans la mesure où cette décision était exécutoire lors des faits.