A quel moment un salarié se trouve-t-il en télétravail ?
Commençons par rappeler que le télétravail désigne tout forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait pu également être exécuté dans les locaux de l’entreprise est effectué par un salarié hors desdits locaux, de façon volontaire et planifiée.
Le télétravail peut être mis en place dès la signature du contrat de travail mais également tout au long de l’exécution de la prestation de travail.
Toutefois, trois conditions simultanées doivent être remplies pour pouvoir se trouver dans une situation de télétravail, à savoir :
- un travail en dehors des locaux de l’entreprise, c’est-à-dire au domicile du salarié voire dans des espaces collectifs situés en dehors de l’entreprise et mis à disposition ;
- un travail effectué en dehors de l’entreprise alors qu’il aurait pu être effectué à l’intérieur de l’entreprise ;
- impliquant l’utilisation des technologies de l’information et de la communication.
A ce stade-là, nous pouvons d’ores et déjà en conclure qu’un salarié effectuant des prestations au domicile d’un client (pour effectuer un devis, des prestations d’entretien, des cours particuliers…) ne se trouve pas en télétravail.
Quelle est la compétence territoriale en matière prud’homale ?
La compétence territoriale ou compétence ratione loci (en raison du lieu) est l’aptitude légale conférée à une juridiction pour connaître d’une action en égard à sa situation géographique.
En matière prud’homale, la compétence territoriale est définie par l’article R1412-1 du Code du travail qui dispose :
« L’employeur et le salarié portent les différends et litiges devant le conseil de prud’hommes territorialement compétent.
Ce conseil est : 1° Soit celui dans le ressort duquel est situé l’établissement où est accompli le travail ; 2° Soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement, celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié. Le salarié peut également saisir les conseils de prud’hommes du lieu où l’engagement a été contracté ou celui du lieu où l’employeur est établi ».
En vertu de cet article, nous en concluons que l’alinéa 1 pose la compétence de principe du lieu de travail, alors que l’alinéa 2 s’exprime en faveur de la compétence de principe du domicile du salarié.
Qu’en conclure ?
Ledit article R1412-1 du code du travail retient bel et bien la compétence du domicile du salarié lorsque le travail est effectué à domicile où en dehors de tout établissement.
Sont donc concernés par le texte de loi les V.R.P., les conducteurs de travaux, les routiers, les forains, les travailleurs à domicile.
Bien avant que le télé travail ne se démocratise, la Cour de cassation s’était déjà prononcé sur la question. Au travers d’un arrêt rendu en 1989, elle estimait alors que la compétence territoriale doit être déterminée d’après les modalités réelles d’exécution du travail, et ce, quels que soient les termes du contrat de travail [1].
Concrètement, un salarié exerçant à 100% en télétravail à son domicile de Lille pour une société dont le siège social est à Limoges peut saisir le Conseil de Prud’Hommes de Lille (son domicile).
Mais prenons le cas d’un salarié exerçant habituellement son activité en France mais dont l’employeur est implanté dans un autre Etats membre de l’Union Européenne. Dans cette hypothèse, le salarié peut faire le choix d’assigner son employeur soit dans l’Etat membre de son siège social soit en France, devant le Conseil de Prud’hommes du lieu où le salarié exerce habituellement son activité [2].
Enfin, précisions que le domicile au sens de l’article R 517.1 du Code du travail est celui du salarié lors de la saisine du Conseil de Prud’hommes [3]. En outre, il reviendra toujours aux juges du fond d’apprécier souverainement la question de savoir si le travail s’accomplit hors de tout établissement [4].