Que faire lors du prononcé de condamnations judiciaires en paiement qui n’ont pourtant jamais été sollicitées au juge ?

Par Jamel Mallem, Avocat.

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Explorer : # irrégularité judiciaire # condamnation non sollicitée # procédure civile # indemnisation

Je suis condamné à payer alors que personne ne réclamait rien contre moi : irrégularité ou injustice ?

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Pour comprendre, prenons un exemple : dans une affaire, la CPAM est condamnée à rembourser les frais d’avocat d’un justiciable (honoraires), alors que ce dernier ne lui réclamait rien.

Un salarié, ayant contracté une maladie professionnelle lors de sa période d’emploi, engage une action à l’encontre de son employeur en reconnaissance de sa faute inexcusable devant le tribunal des affaires de Sécurité sociale.

Dans le cadre de cette procédure, la CPAM intervient puisqu’en cas d’indemnisation des préjudices du salarié, la Caisse fait l’avance des indemnisations qui reviennent au salarié avant de se retourner à l’encontre de l’employeur pour en obtenir le remboursement (article L 452-3 alinéa 3 du Code de la Sécurité sociale).

Dans cette affaire, la faute inexcusable de l’employeur est reconnue par le tribunal.

Le salarié présente donc ses demandes d’indemnisation contre l’employeur et non contre la CPAM (comprenant l’indemnisation de ses préjudices, le remboursement des honoraires de son médecin conseil, les frais avancés pour les expertises médicales réalisées, et ses frais d’avocat).

La CPAM est malgré tout condamné par le tribunal à verser au salarié le remboursement des frais d’avocat qu’il a engagés (article 700 du Code procédure civile) alors que le salarié n’avait demandé que la condamnation de son employeur à ce sujet.

En réalité, le tribunal ne pouvait condamner la CPAM à rembourser l’indemnité des frais d’avocat au justiciable puisqu’il n’en avait jamais fait la demande à l’encontre de la CPAM.

Ainsi, lorsque le juge rend une décision sur des choses non demandées ou lorsque le juge accorde plus que ce qui lui a été demandé, cela constitue une irrégularité.

Cette irrégularité peut être réparée selon la procédure de l’omission de statuer, prévue à l’article 464 du Code de procédure civile. Par simple requête, la demande doit être présentée au juge dans un délai d’un an au plus tard après que la décision est devenue définitive ou à compter de l’arrêt d’irrecevabilité en cas de pourvoi en cassation.

Cass. Soc. 21/01/2016 N° 14-30100

Ainsi, si la CPAM doit faire l’avance des indemnisations, du remboursement des honoraires du médecin conseil, du remboursement des frais d’expertise, il ne peut pas être condamné à rembourser les frais d’avocat du salarié qui ne lui demandait rien à ce titre.

En conséquence, si vous deviez être condamné à régler une somme alors que rien ne vous était réclamé ou si vous étiez condamné à payer bien plus que ce qui vous était demandé, il est possible de régulariser cette situation en déposant une requête devant le juge.

Jamel MALLEM Avocat au Barreau de Roanne
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SELARL Mallem-Kammoussi-Christophe

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Discussions en cours :

  • Bonjour, je viens de découvrir votre article et m’interroge sur la récupération de l’article 700 alloué par le juge en première instance en appel. Est-ce que je dois bien comprendre que si p. ex. la partie intimée a demandé la confirmation du jugement "en toutes ses dispositions" sans en préciser et chiffrer expressément la condamnation en première instance au titre de l’article 700, la Cour d’appel ne puisse donc pas intégrer "implicitement" la condamnation intervenue en première instance au titre de l’article 700 dans la condamnation des frais irrépétibles alloués (donc art. 700) ?
    En vous remerciant de votre réponse,
    bien cordialement,
    Susanne

    • par Me MALLEM , Le 21 octobre 2016 à 09:54

      Si la partie sollicite de la Cour confirmation du jugement en toutes ses dispositions (ce jugement intégrant la condamnation à l’article 700 du Code de Procédure Civile) et si la Cour confirme effectivement le jugement en toutes ses dispositions, il faut comprendre que la condamnation à l’indemnité de l’article 700 du CPC est bien confirmée.

      En revanche, si le jugement n’est que partiellement confirmé, et si aucune précision n’est faite quant à la condamnation de l’article 700 du Code de Procédure Civile, il y a lieu de penser que la Cour n’a aucunement confirmé ce chef de demande.

      C’est pourquoi, il est prudent en cause d’appel de bien préciser dans le "par ces motifs" des conclusions la demande de confirmation à condamnation à l’indemnité de l’article 700 allouée en première instance et d’ajouter en outre, une nouvelle condamnation à article 700 en cause d’appel.

      Ainsi, toutes les demandes sont bien précisées et chiffrées de sorte que la Cour est tenue de statuer sur de telles demandes, et en cas d’omission, il convient de déposer une requête en omission de statuer.

      J’espère avoir répondu à vos interrogations.

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